On choisit du coutil, ou de la toile la plus unie, & lorsqu'elle est bien tendue sur un chassis, l'on y donne une couche d'eau de colle, & après on passe par dessus une pierre de ponce pour en ôter les nœuds. L'eau de colle sert à coucher tous les petits fils sur la toile, & remplir les petits troux, afin que la couleur ne passe pas au travers. Quand la toile est bien seiche, on l'imprime d'une couleur simple, & qui ne fasse point mourir les autres couleurs, comme du Brun rouge qui est une terre naturelle qui a du corps, & qui subsiste, & avec lequel on melle quelquefois un peu de blanc de plomb, pour le faire plutôt seicher. Cette imprime se fait après que la couleur est broyée avec de l'huile de noix, ou de lin; & pour la couche la moins épaisse que l'on peut, on prend un grand couteau propre pour cela. Quand cette couleur est seiche, on passe encore la pierre de ponce par dessus pour la rendre plus unie; puis l'on fait, si l'on veut, une seconde imprime composée de blanc de plomb, & d'un peu de noir de charbon , pour rendre le fond grisatre, & en l'une ou l'autre des deux manieres on met le moins de couleur que l'on peut, afin que la toile ne casse pas sitôt, & que les couleurs qu'on vient ensuite à coucher dessus en peignant, se conservent mieux; Car quand l'on n'imprimeroit point les toiles, & qu'on peindrait tout d'un coup dessus, les couleurs ne s'en porteraient que mieux , & demeureraient plus belles. L'on voit dans quelques Tableaux de Titien, & de Paul Veronese, qu'ils observoient d'en faire l'imprime à détrempe, sur laquelle ils peignoient ensuite avec des couleurs à l'huile; Ce qui a beaucoup servi à rendre leurs ouvrages plus vifs, & plus frais: parce que l'imprime à détrempe attire, & boit l'huile qui est dans les couleurs, & fait qu'elles restent plus belles, l'huile ôtant beaucoup de leur vivacité.