L'ámidon est une fécule ou résidu qui se dépose au fond des tonneaux, dans lesquels les amidonniers ont mis tremper avec de l'eau des recoupes de froment. Ceux qui veulent avoir de bel amidon né s'en tiennent pas aux recoupes; ils emploient méme le plus beau grain de froment.,Outre l'amidon qui se fait avec les recoupes du froment, l'on a découvert sur la fin du dix-septieme siecle, la racine d'une plante avec laquelle on en peut faire de très bon. Le nom de la plante varie suivant les différens endroits de la France où elle se trouve.,Les amidonniers choisissent les issues des bleds les plus gras: c'est de ces issues qu'ils composent l'amidon fin , comme est celui dont on se sert en poudre pour poudrer la tête. Le bled gâté & moulu est employé à la confection de l'amidon commun , qui sert aux Afficheurs , aux relieurs, en un mot à tous les artisans qui font une consommarion considérable de colle. Les boulangers fournissent aux amidonniers les griots & les recoupettes qu'ils peuvent employer sur-le-champ.,L'eau est le principal instrument d'un amidonnier, sur-tout celle qui doit produire la fermentarion & servir de levain. Si l'on se propose de faire del'amidon dans un endroit où il n'y a point d'amidonnier , & qu'on soit embarassé pour emprunter du levain, que l'on appelle eau sûre , on peut s'en procurer par plusieurs expédiens, soit en délayant deux livres du levain avec lequel le boulanger fait lever sa pâté , dans un seau d'eau chaude; ou en faisant bouillir dans un chauderon quarre pintes d'eau-de-vie avec quarre pintes d'eau & deux livres d'alun de roche.,II faut avoir des tonneaux , qu'on appelle queues de bourgogne, & les défoncer par un bout ; mettre un seau d'eau sûre, empruntée d'un confrere, ou préparée comme nous l'avons dit ci-dessus, dans un de ces tonneaux. La quantité de levain n'est point déterminée; il-en faut plus en hiver qu'en été. On verse de l'eau pure sur ce levain jusqu'au bondon, & on acheve de remplir les tonneaux de recoupettes & de griots , moitié par moitié , ou de farine de bled gâté moulu gros. Cette premiere opérarion s'appelle mettre en trempe.,Après que les matieres auront été suffifamment en trempe ou en levain , il leur surnagera une eau, qu'on appelle eau grasse , qui n'est autre chose que le mucilage des marières que la fermentarion a envoyées à la surface. On jette cette eau. Après l'avoir jettée , on prend des sas de toile de crin de dix huit pouces de diametre, sur dixhuit pouces de hauteur: on en pose un sur un tonneau bien rincé: on puise trois seaux de matiere en trempe: on les verse sur le sas, & on les lave avec six seaux d'eau claire, de la maniere suivante. On verse sur les trois seaux de matiere en levain mise dans le sas, deux seaux d'eau claire; on remue le tout avec les bras. Quand ces deux seaux d'eau claire sont passés, on verse deux autres seaux sur le reste de la marière contenue dans le sas: on remue de nouveau. Quand ces deux seaux sont passés, on verse les deux derniers seaux sur ce qui reste dans le sas, & on remue pour la troisieme fois. Cette seconde opérarion s'appelle laver le son. Les amidonniers doivent bien laver & séparer le son, veiller à ce que leur sas soit bon, leurs eaux bien pures & bien nettes; les statuts leur prescrivent toutes ces artentions. On vuide dans un tonneau ce qui reste dans le sas : on lave ces résidus avec de l'eau claire, & ils fervent de nourriture aux bestiaux. On continue de passer de la matiere en trempe sur le même tonneau , jusqu'à ce qu'il soit plein.,Après cette seconde opération, on jette l'eau qui a passé à travers le sas avec la mariere en trempe: cette eau se nomme eau sûre; c'est le levain naturel des amidonniers, & celui que l'on doit emprunter d'eux quand il est possible. Lorsque l'on se sert de cette eau pour mettre en trempe, il en faut un seau sur chaque tonneau de matiere en été, & quelquefois trois ou quarre seaux en hiver. On enleve cette eau sûre avec une sébille de bois, jusqu'à ce que le blanc déposé au fond de chaque tonneau paroisse : on remplit ensuite les tonneaux de nouvelle eau , & on remue l'amidon avec une pelle de bois ;ensuite on remplit les tonneaux d'eau claire. Cette troisieme manœuvre s'appelle Rafraîchir l'amidon. Deux, jours après le rafraîchissemenr, on jette l'eau qui a servi à rafraîchir , jusqu'à ce que le premier blanc paroisse. Lés artistes appellent ce premier blanc, ou gros, ou noir, suivant les différens endroits où l'amidon se fabrique. Ce gros ou noir s'enleve de dessus le second blanc qui en est couvert. Les amidonniers ne le perdent point; ils s'en servent pour engraisser des cochons , ce qui leur procure un gain considérable. Quand le gros ou noir est enlevé, on jette un seau d'eau claire sur le résidu de crasse , que le gros ou noir laisse sur l'amidon qu'il couvroit. On rince bien la surface de cet amidon avec ce seau d'eau, & on met les rincures dans un tonneau prêt à les recevoir: elles y déposent, & ce dépôt de rincures s'appelle amidon commun. Les amidonniers nomment cette quatrieme opérarion, rincer. On trouve, après le rincer, au fond de chaque, quarre ou cinq pouces d'épaisseur d'amidon. On prend l'amidon qui est dans les tonneaux; & de deux tonneaux on n'en fait qu'un: cette cinquieme opérarion s'appelle Passer les blancs.,Quand les blancs sont passés d'un tonneau sur un au tre, on verse dessus une quantité d'eau claire suffisante pour les battre, broyer & délayer, avec une pelle de bois: cette sixieme opérarion s'appelle démêler les blancs.,Les blancs étant démêlés , on fait passer, à travers un tamis de soie dans un tonneau , les blancs qu'on vient de démêler: on continue ensuite ce travail sur le même tonneau jusqu'à ce qu'il soit plein. Deux jours après que les blancs ont été démêlés: on jette l'eau qui est dans le tonneau & qui a traversé le tamis de soie , jusqu'à ce que l'on soit au blanc. Il reste sur le blanc une eau de même couleur qui le couvre: après avoir versé cette eau dans un pot de terre: on jette un seau d'eau claire sur l'amidon même : on en rince la surface avec cette eau: on ajoute cette rincure à l'eau blanche, & on la laisse deposer; ce dépôt produit encore de l'amidon commun. L'amidon étant bien rincé, on l'enleve du fond des tonneaux , & on le met dans des paniers d'osier , garnis intérieurement de toile: cette opérarion s'appelle lever les blancs.,Le lendemain du jour qu'on a levé les blancs , il faut monter les paniers remplis d'amidon dans un grenier au haut de la maison. On doit faire attention que l'aire du plancher de ce grenier soit d'un plâtre bien blanc & bien propre. On divise un panier d'amidon en seize morceaux,& on les laisse, sur le planchet de plâtre jusqu'à ce qu'il ait tiré l'eau qui pouvoit se trouver dans l'amidon. Cette huitième opérarion s'appelle rompre l'amidon. Quand on voit que l'amidon rompu est suffisamment sec, on le met aux essuis. Cette neuvieme manœuvre consiste à l'exposer à l'air sur des planches situées horisontalement aux fenêtres de l'attelier. Lorsque l'amidon est suffisamment ressuyé sur les planches, on prend les morceaux, & on les ratisse; ces ratissures passent dans l'amidon commun; ensuite on met l’amidon à l'étuve. Cette derniere opération se fait de la maniere suivante: ,On écrase les morceaux ratissés , & on les porte dans une étuve, où on les répand à la hauteur de trois à quatre pouces sur des claies couvertes de toile. II faut observer de retourner l'amidon soir & matin ; car sans cette précaution il deviendroit verd, au lieu d'être d'un très beau blanc. Les Amidonniers qui n'ont point d'étuves, sont obligés de se servir du dessus des fours des boulangers.,Les amidonniers, suivant les reglémens, ne peuvent vendre l'amidon commun qu'en grain, sans qu'il leur soit permis de le réduire en poudre, sous quelque prétexte que ce soit. Le gros amidon doit rester quarante-huit heures aux fours des amidonniers: & au sortir du four , huit jours aux essuis. Suivant les statuts, l'amidonnier ne peut acheter des bleds gâtés , si le marchand n'a pas une permission du Magistrat qui l'autorise à les vendre.,L'amidon sert à faire de la collé , de l'empois blanc ôu bleu : le meilleur est blanc, doux, tendre & friable. Les Anciens ne faisoient point moudre le grain dont ils faisoient l'amidon : cette méthode est encore en usage dans quelques endróits de l'Allemagne.,L'amidon de racine est de l'invention de M- de Vaudreuil. Il obtint, en 1716, le privilege exclusif pour lui & pour sa famille , de le fabriquer pendant vingt ans: máis il a été expressément dit, par les Arrêts du Conseil & Lettres-Patentes, que tous les sujets de Sa Majesté pourroient fabriquer des amidons de recoupes; & qu'en cas que la fabrique des amidons de racines vînt à cesser pendànt un an, le privilege seroit pout cela seul éteint & supprimé. L'Arrêt du Conseil est du 20 Novembre 1714; les Lettres-Patentes de confirmation, du 20 Janvier 1716 , & l'enregistrement au Parlement du 10 Mars suivant.,L'Académie jugea, en 1759 , que quoique l'amidon de pommes de terre & de truffes , proposé par le sieur de Chise, fit un empois plus épais que celui de l'amidon ordinaire, cependant il seroit bon d'en permettre l'usage , pour se ménager des ressources dans des années de disette.,