Quand la toile est tendue sur son châssis, comme on l'a indiqué plus haut, depuis la page 552 et suivantes, on doit y passer d'abord une légère couche de colle de gants, dite colle de Flandre 1. Cette eau de colle doit être assez clair et tiède, afin qu'elle ne soit plus en consistance de gelée. Cet encollage sert à coucher et agglutiner tous les petits fils qui ressortent de la toile. On l'étend avec une grosse brosse de deux pouces de diamètre sur trois pouces de longueur, et on la laisse entièrement sécher à l'air, ce qui n'exige qu'une ou deux heures, selon la saison.,La toile étant encollé et sèche, vous la poncez légèrement partout, pour en user les noeuds, aussi bien que le duvet 2; après quoi, vous le vergetez pour en chasser la poussière de la pierre ponce. Cela fait, vous imprimez votre toile à l'huile avec une couleur fort épaisse et passablement broyée. L'on prend, pour faire cet enduit, du blanc de céruse, auquel on mêle, tantôt un peu de noir de vigne ou tel autre bon noir, pour en faire un gris de perle; tantôt un peu d'ocre rouge et un atome de noir, si l'on veut que la teinte soit un peu rosâtre; tantôt, enfin, un tiers d'ocre janue-clair, et une petite pointe d'ocre rouge, si, comme moi, l'on préfère la teinte orangée à toutes les autres; mais dans ce dernier cas l'on n'ajoute point de noir: dans les deux précédens on n'en fait entrer que fort peu, et seulement ce qu'il en faut pour atténuer le grand blanc de la céruse, qui est la couleur principale dont se forme l'enduit. ,Il faut que cette couleur soit assez épaisse pour qu'elle ne puisse s'étendre que comme un onguent tendre; l'on y met par conséquent moins d'huile que pour les couleurs à mettre en vessie. Pour étendre cet enduit sur la toile, l'on prend indifféremment ou une grande lame de fer, de vingt pouces de long sur vingt lignes de large, ou une lame de bois ou de corne de la même proportion. Il faut que la lame soit bien unie et en même temps assez forte pour qu'on puisse appuyer fortement sans craindre de la casser; car, si l'on n appuyait pas du tout, la couleur n'entrerait pas dans les interstices de la toile, et n'en remplirait pas tous les trous.,L'on fait cette opération grandement, et presque à tour de bras, en prenant beaucoup de couleur sur la lame, mais en la couchant néanmoins aussi également que possible partout; ce qui n'est pas difficile, puisque le grain de la toile vous guide, et qu'ensuite vous ratissez légèrement jusqu'à ce que vous sentiez qu'il n'y en a pas plus sur une place que sur une autre.,La couleur, ainsi refoulée avec cette grande lame, s'incruste dans le tissu de la toile, et y adhère très-solidement; il n'en faut appliquer sur la superficie que juste ce qu'il en faut pour couvrir les fils; car si l'on en mettait davantage, la toile serait lourde et cassante, et coûterait d'ailleurs trop cher. Ceci est d'autant plus important que le céruse, étant un blanc de plomb, fait toujours un fond préjudiciable aux autres couleurs, à moins que l'impression ne soit très-sèche, ce qui n'a tuères lieu qu'au bout de huis mois, ou même d'une année entière. Cependant aucune autre couleur ne peut remplacer la céruse pour l'enduit à l'huile; mais l'on peut s'en passer quand on imprime à la colle, comme on le verra bientôt. Quand la toile est imprimée d'une manière unie, on l'expose au grand air, et même au plus grand soleil, afin d'en hâter la dessication. ,,1 Si l'on veut faire cette colle soi-même, l'on prend des rognures de peaux de mouton ou de peaux de gants, qu'on fait bouillir et fondre dans de l'eau; après quoi on la passe à travers un linge: mais il est lus commode de l'acheter chez les marchands. On la trouve en tablettes, couleur de sucre d'orge, fort transparentes, et beaucoup moins noires que les tablettes de colle forte. Chaude, elle doit être fort claire, et refroidie, elle ne doit avoir que la consistance d'une gelée.,2 Il faut se servir d'une pierre ponce de quatre ou cinq pouces de diamètre, et qui soit bien dressée par-dessous, comme je l'ai indiqué page 563. On la prend d'une grandeur proportionnée aux toiles.