Maintenant pour les toiles, elles doivent etre neuves, asses claires, & avec le moins de noeuds qu'il est possible. On les tend sur des chassis de bois avec des broquettes, en rebordant la toile sur l'épaisseur du chassis où on l'attache, en mettant les broquettes à trois ou quatre doigts de distance les unes des autres. Quand la toile est bien tendue sur le chassis, qui doit etre ferme avec sa traverses & ses écharpes pour la maintenir en état, on l'encole d'abord avec la cole de cuir qui doit etre figue. On couche cette cole avec le tranchant d'un grand couteau qui est asses mince & en le planchant un peu ce couteau a son manche recourbé vers le dos, afin que la main qui tient ne touche pas à la toile lorsqu'on s'en sert. On pousse un peu la toile par derriere aux endroits où l'on passe le couteau, pour étendre la cole plus également & plus uniment, & on n'y en laisse que le moins qu'on peut.,On racle aussi-tot toute la cole qui a passe par derriere avec le meme couteau, afin que la toile soit plus également encolée. La toile devient alors fort tendue, & on la laisse bien secher. Cette cole sert à boucher tous les trous de la toile; mais pour la rendre bien unie quand elle est seche, on y frotte en tous sens une pierre de ponce bien dressée qui emporte tous les noeuds & toutes les inégalités. On imprime ensuite la toile avec du brun rouge broié à huile, & médiocrement épais, dans lequel on met quelque seccatif, qui est pour l'ordinaire un peu de mine rouge bien briée & bien melée avec le brun rouge. On étend cette impression sur la toile avec le couteau comme on a fait la cole, en poussant la toile par derriere de distance en distance à mesure qu'on étend la couleur pour n'y en laisser que fort peu, & seulement autant qu'il faut pour commencer à unir la toile.,S'il étoit passe un peu de cette couleur par derriere par quelques petits trous de la toile que la cole n'auroit pas bien bouché, on la ratisse encore toute fraiche avec le tranchant du couteau, & on laisse bien secher cette premiere impression. Ensuite on ponce encore la toile pour la rendre plus unie & pour donner une autre couche. Il y a des peintres qui se servent de ces toiles qui n'ont qu'une seule couche, & ils les preferent à celles qui en ont plusieurs, parce qu'elles font moins mourir les couleurs de la peinture, & qu'elles se peuvent rouler plus facilement pour etre transportées. Mais comme le grain de la toile paroit to.rs beaucoup quand elle n'a qu'une couche, on ne s'en sert ordinairement que dans les grands ouvrages.,On donne presque toujours deux autres couches d'impression l'une apres l'autre sur la premiere, & de la meme couleur que les dernieres qu'on a mises sur les planches de bois, en poncant toujours la precedente quand elle est seche avant que de mettre la suivante. Ces dernieres couches sont d'un gris rougeatre qui convient en general a toutes les couleurs de la peinture, & quand la toile est bien seche ell est alors preparée pour peindre.