Art de la verrerie
Sommatire du premier livre.
Hauteur enfeigne dans ce premier Livre comment il faut tirer les fels qui doivent entrer dans la fritte ou la composition du cri fl al & du verre commun; les différentes manières de faire ces compofitions, de préparer le fafire 9 la magnéfie 9 le ferret d'Efpagne, le fafran de Mars>/ Pas-filum; la façon de donner au verre la coulcur+d'aigue-marine, le bleu cétefle 9 le verd d'émeraude 9 le bleu de turquoife ; avec des obfervations fur les couleurs en général, &c.
Chapitre I.
Manière de tirer le (el de la pondre appelle'e Rochette ou Roquette & de la foude d'Efpagne.
La poudre vulgairement appellee Rochetta > ( Roquette ) que l’on apporte de Syrie ou du Levant, eft la cendre d’une plante qui y croît en abondance. Cette cendre donne un fel, incomparablement plus blanc que la foude d Efpagne. Si l’on veut faire un criftal parfaitement beau, il faudra donc donner la préférence au fel tiré delà Roquette Orientale ; car quoique la foude d’Efpagne contienne plus de fel que la Roquette , le criftai qui eft fait de cette foude a toujours une couleur bleuâtre, & l’on n’y remarque ni la blancheur ni l’éclat de celui où il entre de la Roquette Orientale. Voici la maniéré d’extraire parfaitement le fel, tant de la roquette, que de la foude d’Efpagne; j’en ai très-fouvent fait l’épreuve. Après avoir pilé la cendre de Syrie ou Roquette , dans un mortier de pierre , avec un pilon de fer , il faudra la fàfïer dans un tamis aftez ferré pour qu'il ne paftè point de morceaux, mais feulement de la poudre ; carc’eften cela que con- fifte tout le fecret de tirer plus ou moins de fèl. En achettant l’une ou l’autre de ces matières, il faudra avoir foin de préférer celle qui fera la plus chargée de fèl ; c’eft en les portant fur la langue & en les goûtant que l’on en pourra juger : cependant la meilleure façon de s’en alfurer, eft d’en faire l’épreuve dans le creufet, & d’examiner la¬quelle de ces cendres contient plus de fable ou de tartè’ cette maniéré d’éprouver les cendres eft: connue de tous ceux qui font au fait des premiers élemens de l’Art de la Verrerie. Il faut de plus avoir des chaudières de cuivre * avec leurs fourneaux , telles que celles des Teinturiers , & qu’el- L’on verra par la fuite que l’ufâge I la préparation des fels, & que Merret & de yaiffeaux de cuivre ne vaut rien pour | Kunckelc condamnent par tout l'ufage.
les foient proportionnées à la quantité de ici qu’on Voudra tirer : on remplira ces poêles d’eau claire ; °n allumera defl'ous un feu de bois fec & qui donne peu de fumée ; & lorfque l’eau aura com¬mencé à bien bouillir, il faudra y jetter une quali¬té de la poudre ou cendre tamifée proportionnée a celle de l’eau bouillante : on continuera le leu ; lailfera bouillir l’eau jufqu’à ce quelle foit réduite au tiers, en obfervant de remuer le fond avec une fpatule de bois, afin que la poudre puifle le mêler à l’eau, & que le fel fe diflolve plus ailiement : l’on remplira enfuite les poêles de nouvelle eau que l’on fera bouillir jufqu’à réduélion de la moitié ; par ce moyen , l’on aura une leffive tre$-chargée de fel. Si l’on veut obtenir un fel encore plus blanc, & en plus grande quantité ; avant de mettre la poudre de Roquette, l’on n aura qu’à jetter dans la chaudière dix livres de tartre rouge qui n’ait été calciné que jufqu’à devenir noir feulement. On le fera fondre dans 1 eau chaude, & on le remuera avec une Ipatule de bois ; enfuite de quoi l’on y jettera la poudre dont on vient de parler ; avec cette précaution
1 on obtiendra du lèl en plus grande quantité , 8c criftal qui en viendra fera plus blanc & plus beau. Lorfque l’eau fera réduite au tiers, & que la leffive fera bien chargée de fel , on dimi¬nuera le feu, 8c l’on rangera plufieurs vafes de terre qui auront été auparavant remplis d’eau pendant fix jours, afin qu’il s’y imbibe moins de ieflive & de fel : Cela fait, avec de grandes cuillères de ci ivre,on puifera de la leffive & de la cendre pour en emplir les vafes de terre dont on vient de par¬ler ; on les lailfera repofer pendant deux jours , au bout defquels, lorfque la cendre fera tombée au fond du vafe , on enlèvera doucement la lefîîve qui fera claire , pour la tranfvafer,en obfer¬vant bien de ne point troubler la cendre ou le fé- diment ; on la lailfera repofer de nouveaupendanC deux autres jours, afin qu’elle fe dégage de toute impureté & de fes parties terreftres,& pour qu’elle devienne claire & limpide ; l’on répétera cette opération jufqu’à trois fois ; l’on aura enfin une leffive claire & pure dont on pourra tirer un fèl très-parfait. L’on-réitérera la même chofe jufqu’à ce qu’on ait employé toute la cendre tamifée.
Pour tirer le fel de la leffive ainfi purifiée, on lavera les chaudières avec de l’eau pure , après quoi on les remplira de la leffive que l’on fera bouillir lentement, comme il a été dit ci-deflus ; en obfervant fioigneufement de remplir continuel¬lement les chaudières de leffive , jufqu’à ce qu’elle commence à s’épaiffir, & à fe'dégager de fon fel ; il ne faut pour cela qu’environ vingt-quatre heures, au bout defquelles le fel commence à fè montrer à la furlace fous la forme d’une petite toile ou pellicule : alors on tirera petit à petit du chaudron, avec une écumoire, le fel qui fè fera précipite au fond; on en lailfera égouter la leffive ; enfùit-e de quoi on mettra le fel dans des, pots de terre troués,afin qu’il puiffe s’eiTuier, &. ce qui en découlera fera remis dans les chaudières; l’on procédera de la meme maniéré julqu’à ce qu’on aye retiré tout le fel. Mais il faudra avoir foin de modérer le feu lorfque le fel commencera àparoître; car fi on continuoit à le pouTer, ce fel s'attache¬nt aux chaudières & les gâte voit,attendu quileft ycs-corrofif & très-vioitnt. Après que le fel aura ece bien égouté, on le tirera des pots pour le met¬tre dans des boëtes de bois , afin d’achever d’en faire partir toute l’humidité; c’eft la faifon de l’an- llee qui décidera du teins qu’il lui faudra pour fe ficher. Tout 1' art de faire un beau fel dépend de 1 addition du tartre, comme nous l’avons déjà dit.
trois cent livres de cendre orientale, j’ai or-dinairement tiré quatre-vingt à quatre-vingt-dix livres de fel.
Le fel étant bien feché , il faudra le rompre en gros morceaux , & l’expofer au feu dans le four' neau à calciner, afin que la chaleur douce & lente le faffe encore fecher davantage : on le brifera entaite avec un Inftrument de 1er ; on le remuera connue on le pratique ordinairement pour la fritte: après que le fel aura perdu toute fon humidité, il faudra le retirer, le piler dans un mortier de pierre & le faffer dans un tamis affez ferré pour que les grains de fel qui palferont ne foient pas plus gros que des grains de froment. On mettra a part & à couvert de la pouffiere, ce fel ainfi pre- Rarej l’on s’en fervirapour faire la fritte de criftal, ainfique je l’expoferai dans le Chapitre fùivant.
Notes de Merret Jùr le premier Chapitre.
Poudre & Rochette défignent la même matière & ne font autre chofe que les cendres d’une plante : elles ne font pas toujours d’une égale bonté , commenotre Auteur le faitre- marquer en plufieurs endroits. Le mot Rocketta eft entière¬ment inconnu dans nos Verreries d’Angleterre ; l’on y ap¬pelle poudres toutes les cendres qu’on apporte du Levant pour l’ufage de la Verrerie ; mais il me lenible que la feule différence qu’il pourroit y avoir entre poudre & rockette,na confifte qu’en ce qu’on appelle poudre, la roquette qui nous vient fous la forme de poudre -, au lieu qu’on appelle roquette la même matière lorfqu’elle nous vient en gros morceaux durs & compatis comme de la pierre. L’Expérience a fait connoître aux Verriers qu’on retire un fel beaucoup plus blanc & plus fort de cette derniere efpéce , que de celle qui vient en poudre. Je n’examine point ici quelle peut être la raifon de cette différence ; s’il faut l’attribuera ladiver- ftté de la plante, à la maniéré dont elle croît, dont elle eft cueillie & brûlée, ou à quelque falfification qui luifurvient par le mélange de matières hétérogènes qui en diminuent la qualité: ce qu’il y a de certain, c’eftque lorfqu’on veut faire un fel très-fort & qui forme des morceaux durs comme la pierre, on prépare une leffive de cendres, dont on arrofe les herbes qn’on veut brûler : on ne s’y prend pas autrement pour préparer une cendre très-acre , telle qu’il la faut pour les Savoniers & les Teinturiers ; mais je ne puis dire avec fureté où cette façon de préparer la roquette a été inventée jj ni pourquoi elle n’eft plus gueres en ufage.
Quon apporte de Syrie ou du Levant. La Syrie fait partie de l’Orient : préfentement on apporte cette cendre d’Alexandrie ôc de Tripoli.
DE LA VERRERIE. 7
Une plante. L’Auteur appelle cette plante dans fa pré’ &ce Kali ; c’eft aufll le nom que lui donnent la plupart des Auteurs en y changeant fort peu de chofe; Alpinus dans fon livre des plantes d’Egypte, l’appelle S*. K alu, d’au-
tresla nomment Cali ; Gefner W^eWcAlkali^foda ou foude; I^odonœus Salicornia ; on la nomme en François Salfol °U foude ; Camerarius , Cordus & Fuchfius l’appellent anhillis de Diofioride, &c. .
Les noms de foude, f ali corne paroiflent dérivés
du fel qui abonde dans cette plante. C’eft ce que le Docteur Turner dit dans fon herbier de l’origine , de l’ufage ancien & des noms de cette plante. Je ne connois point de terme Anglois pour la déligner , quoiqu’elle fe trouve abondamment en Angleterre. On pourroit la nommer Jaïtivurt j à caufe du goût falé qu’elle a, ouglajf- weed, parce quelle fert à faire le verre. Parkinfon dit que les Anglois 1 appellent frog-grajf9 herbe aux grenouilles, ou wab-grafl', herbe aux écrevilfes , parce quelle fert peut- &re de nourriture à ces animaux qui la cherchent à caufe de fon goût falé qui eft affez agréable. Gafpard Bauhin dans fon Pinax en compte dix efpéces dont nous omettrons les noms, ce détail n’étant pas de notre reflbrt : nous nous Contenterons de parler de trois efpéces dont, au rapport d’Alpinus, chap. 42 le$ Alexandrins & les autres Egyp¬tiens fcavent tirer une poudre qui fert a la préparation du Verre & du favon. La première efpéce eft le Kah-gencula- ou Kah plein de nœuds. Quelques autres fuivant Alpi¬nus , l’appellent anthilhs. Colonne la nomme Kah repens Neapolitanum ou le Kah de Naples, parce qu’il en a trouvé de femblable aux environs de cette Ville. Il dit dans la deftription qu’il en donne qu’elle lert à faire du verre. La fécondé efpéce fe trouve proprement en Egypte, c’eft par cctte raifon qu Alpinus l’appelle Kah Egyptien : fa feuille eft longue & hériffée. J’ai eu occafion de voir la troifiémo efpéce de Kali que les Botaniftes appellent Kah épineux ; d s’en rencontra une feuille dans un tonneau de poudre de SPquette. La première &. la derniere de ces efpéces croiffent
abondamment en Angleterre, près de la Tamife, ainfi qu’efl d’autres endroits voifins de la mer ; mais elles ne fe trou¬vent pas dans les Provinces les plus Septentrionales. Au refte, nos Verriers ne veulent point employer le Kali épineux pour faire leur verre ; & l’on a éprouvé dtms les Verreries , que cette herbe mife fur un fer rouge, s’en va en fumée & ne laifle que peu ou point de fel ; au lieu que le Kali du Levant, mis de même fur un fer rouge , laiffe une bonne quantité de cendre noire chargée de fel, ce qui le caratiérife. Ce Kali en brûlant fe reflerre, con¬ferve long-tems fa flamme , & donne un fel blanc très-acre ; au lieu que notre Kali d’Angleterre a un goût de fel fort femblable à celui de l’eau de la mer; & fi on le conferve dans un endroit humide , il s’affaiffe & devient à rien: C’eft ce qu’éprouva à fes dépens un marchand de confitures liquides de ma connoiflance , qui avoit achetté du kali au lieu de crête-marine car ayant fait confire cette plante dans de fort vinaigre, il arriva qu’au bout d'un certain tems il ne lui en reftoit que très - peu : prefque tout avoit été confirmé par le vinaigre. Cette différence qui fe trouve entre les plantes eu égard au terroir qui les produit, ne fe remarque pas feulement dans le kali dont nous parlons, mais encore dans une infinité d’autres plantes : nous l’appercevons dans le tabac , dans le vin du Rhin & de Canarie qui viennent tous deux du même fep de vigne , dans la Ciguë des Grecs & celle des autres pays, & dans une infinité d’autres productions de la nature. Quoique les différentes efpéces de kali croiffent d’elles-mêmes dans 1 eau & fur les bords des lacs d’eau falée ; cependant on en fente furies cotes d’Efpagne & d’Egypte; c’eft ce qui con¬tribue fans doute dans ces pays chauds à la quantité^ l’acreté, & a la fixité du fel que l’on en retire ; furtout dans l’Egypte où il ne tombe point de pluie, & qui n’eft arrofée tous les ans que par le Nil qui y dépofe fon limon, particularité connue de tout le monde. On coupe le kali vers le milieu de l’été f îorfqu’il eft dans fa plus grande force ; on le fait fecher au Soleil ; on le met en gerbe, & on le brûle enfuite fur des grils de fer ; parce moyen les cendres venant à tomber dans Une fofTe , y acquiérent la dureté de la pierre; c’eft cette fendre que Ton ramafle, & qui félon Lobel prend le nom fonde. L’on ne peut dire précifement dans quel tems on a commencé à faire ufage de cette plante: l’article Al qui Arabe, prouve affez que ce font les Arabes qui Font connue les premiers, & lui ont donné le nom qui lui eft refté parmi les Naturalises. Je trouve que Serapion & Avi¬cenne en font mention , ils lui attribuent des vertus contre a pierre, les ulcères & les maux d’yeux: Lobel penfeque fommes redevables de la connoiffance de cette plante, fonnom &de la maniéré de la préparer aux Philofophes ^fecs, & aux Arabes modernes qui s’appliquèrent à la Chy- & à Fart de la Verrerie ; mais je ne crois pas que les
^recs en ayent eu aucune connoiffance» en effetleurs Au- Jours n’en parlent nulle part, & elle n’a point de nom dans JeUr langue. Il n’y a donc pas lieu de douter que ce ne foient *es Arabes ou d’autres modernes qui nous Font fait connoître.
Pour ce qui eft de l’achat de cette cendre, la meilleure IaÇon d’en connoître la qualité, eft de fe fervir de la balance Ces Savoniers : ils diflblvent les cendres dans de l’eau claire;
en examinent la leffive après l’avoir filtrée , ôc en com¬parant le poids de l’eau à celui des cendres avant leur diffo- *ütion, ils trouvent combien la cendre doit donner de fel.
Chaudières de cuivre. Notre Auteur défaprouve par tout * ufage du cuivre , à moins qu’on ne veuille faire un verre, Verd ou bleu ; en effet, les leffives acres apiffent fur le cui- VRE J & font qu’il s’y forme du verd-de-gris , c’eft pour cela p.os Verriers n’employent que des vafes doublés de P’°nib, tels que ceux dont on fe fert pour travailler l’alun.
'Cart;e, Ce que Neri appelle Greppola & Grume dei hotti, e * Proprement la lie de vin * qu’il faut diftinguer de ce nous appelions ordinairement tartre, par où nous Entendons ce qui s’attache toujours aux parois des tonneaux, Peut ctre Neri a-t’il eu en vue la 1 tic liquide & que l’on brûle enfuite.
n’eftautre chofè que j Voyez dans PÉncyclopcdie l’article > & fe durcit en morceaux , ce qu’on ne trouve jamais dans la lie, qui eftfort différente, n’étant qu’un afTemblage de particules liquides & humides quis’arnaffent au fond des tonneaux. Suivant le témoignage de Vanhelmont, le tartre du vin rouge eft le meilleur & contient un fel plus acre & en plus grande abondance que celui du vin blanc. On le calcine pour en enlever les parties hétérogènes, en rendre le fel plus blanc, faire qu ilfe diffolve plus aifémentdans l’eau, & qu’il fe dégage plus facilement de la partie terreftre dans laquelle fon fel eft enveloppé ; de même que le nître lorf- qu’on en fait de l’eau forte ou de l’efprit de nître, eft dé¬veloppé par l’alum & le vitriol, ce qui n’arriveroit pas fi l’on n’y joignoit point ces matières. C’eft pour la même raifon que l’on doit faire diffoudre le tartre dans l’eau avant que de mettre la roquette dans la chaudière. Notre Auteur dit, qu’il faut calciner le tartre pendant fix heures dans le fourneau, jufqu’à ce qu’il devienne blanc : en effet, l’expérience nous apprend que cette calcination lente réuffit mieux que celle qui eft précipitée.
La maniéré particulière dont procèdent quelques Chy- miftes, montre affez de quelle importance il eft de bien ôter au tartre fon humidité ; car pour obtenir les criftaux ou la crème de tartre en plus grande quantité, & la rendre plus blanche , ils caftent le tartre en morceaux groftiers, qu’ils calcinent ou plutôt qu’ils fontfecher fortement au fourneau, dans des plats d’étain; de cette façonla crème de tartre de¬vient beaucoup meilleure quelle n’auroit été fans cela. Le fel tombe au fond de la chaudière, d’où il faut le tirer avec une écumoire, de maniéré que tout ce qui eft liquide puiffe y retomber : quand le fédiment de la lcfïive eft tombé au fond, l’on en retire la lefTive qui fumage, par le moyen d’un fiphon.
Remarques de J. Kunckel fur le premier Livre de ƒ Art de
[La Verrerie d'Antoine Neri] Chapitre I.
On peut faire un très-bon verre même avec la foude d’Efpagne pourvu qu’après l’avoir réduite en poudre, l’on y mêle une certaine quantité de fable fin : iln’eft pas aifé de déterminer au jufte quelle doit être cette quantité, attendu que parmi les différentes efpéces de loude, les unes contiennent plus de terre ou de fable que d’autres," Ôc qu’elles ne font par conféquent point fî chargées de fel : ce fera donc aux Verriers à chercher cette proportion ; ce qui leur fera facile, puifque même lors qu’il n’eft queftion que de faire un verre com¬mun , ils font obligés de fe regler fur la force des cendres dont ils font ufage, pour fçavoir combien l’on peut y joindre de fable. En effet, en luppofant qu’en mettant fur cent livres de foude quatre-vingt à quatre- vingt-dix livres de fable , la matière fût trop difficile à fondre, il feu- droit ajouter de la foude ; fi au contraire la matière entroit trop aifé- Illent en fufion (ce qui arrivera rarement en obfervant la proportion parquée ci-deffus), l’on n’auroit qu’à prendre une plus grande quantité de fable. Néantmoins le verre fait avec la foude, n’eft pas cftimé , quoiqu’il fe travaille aifément ; car outre qu’il fe caffe très-facilement c,i fe refroidiffant, il conferve toujours une couleur bleuâtre , & quand même on y mêleroit de la magnéfie, cela ne l’empêcheroit Nullement de conferver une couleur ou noirâtre , .ou verdâtre ; en un mot, la foude ne produit point un beau verre. Pour ce qui eftdu fel que l’on en tire , & dont il nous eft facile de nous paner dans nos Verreries d’Allemagne ; il eft à remarquer que , fi après avoir fait diffoudre la foude dans de l’eau , on en tire le fel par acuiffon , que l’on calcine ce fel, qu’aprèseela on le faffe diffoudre de JJûUveau dans de Peau,qu’on réitéré cette opération jufqu’à quatre fois, 1 On obtiendra un fel très-beau dont on pourra faire un verre auffi par¬tit que d’aucune autre matière , fans même en excepter la roquette : fi cependant la couleur tiroit encore fur le verd, l’on pourroit rémé- à cet inconvénient par le fecours de la magnéfie ou jragïwe/é’.Pour
Ce qui eft de cette matière , les Allemands n’ont pas beloin d’avoir *ecours aux Piémontois ; il s^en trouve en Mifnie, dans le pays de Eunebourg en Bohême, &en Silefie, aufli-bien qu’en Norwege : on * appelle en Allemand braunftein * ou pierre brune ; elle eft même
» mont ; lor/que l’on en mêle trop à « la fritte du verre , ou que l’on ne «tient pointle verreaflezlongtemsen « fufion pour qu’il fe purifie, il prend * une couleur brnne ,femblable à celle » de laTopafe & meme tirant fur le noir; » & fi l’on n’y joint que trop peu ou » point du tout ce magnéfie, le verre » demeure trop blanc, c’eft ce qui pro- » duit la différence qu’il eft aife de re- » marquer entre le verre de Bohême & » celui de Venife. Les Potiers /ê fervent
fouvent préférable à celle de Piémont. Au refte la maniéré de tirer Je fel de la foude eft décrite d’une façon affez circonfianciée dans ce Chap. de l’Auteur, pour n’avoir pas befoin d’être éclaircie davantage: l’on obfervera feulement qu’il n’eftpasabfolument nécefl'aire d’avoir un mor¬tier de pierre pour piller lafoude ; une auge de bois garnie de plaques de fer , peut fervir également à cet ufage. Quant a !a cuiflon du fel, il n’y a rien de plus commode qu’une chaudière de fer de fonte , parce qu’on peut fans inconvénient y cuire le fel jufqu’à ficcité : on peuc en- fuite l’en retirer en morceaux que l’on fait difioudre de nouveau dans l’eau , en réitérant plufieurs fois l’opération , comme il a déjà été dit. Il n’eft pas douteux qu’on n’obtienne plus de fel,en y joignant le tartre calciné ; laraifon eneft facile à deviner pour les Chymiftes, mais elle n’eft pas du refl'ortdes Verriers. Ceux qui n’auront pas de chaudières de fer de fonte pour la préparation du fel, pourront y fuppléer en fe fervant de vaiffeaux de fer blanc ou de plomb, & dans ce cas ils auront foin de s’en tenir exa&ement aux réglés que preferit notre Auteur, & de ne pas rendre le fel trop dur par la cuiffon , car alors on ne pourroit le retirer fans endommager les chaudières : l’expérience m'a aufli fait connoître qu’il eft égal de conferver la leflive dans des vaiffeaux de terre ou de bois ; & même je penfe que ces derniers font à préfé¬rer , parce que la leflive agit fur les vaiffeaux de terre & les ronge au bout d’un certain tems. Quant à l’origine de la roquette , elle eft luffi- famment éclaircie dans les notes de Merret. La remarque qu’il fait, de bien fe garder d'employer des vaiffeaux de cuivre dans la prépa¬ration des fels , eft d’une très-grande importance. Pour le mot de fritte, il ne fignifie autre choie que le mélange d’une certaine quantité ou proportion de fel ou cendres & de fable. J’obferverai en dernier lieu , que lorfque le fel de la foude eft tiré par la leflive , il ne faut pas jetter les cendres qui reftent ; car on peut encore s’en fervir avec utilité pour faire le verre le plus commun ; * il n’eft en effet pas poflîble de taire une leflive affez exafte des cendres , pour qu’elles ne contiennent pas toujours quelques parties de fel.
»auffi de ce minerai pour donner un M vernis noir à leurs poteries. Les Ita- » liens la nomment Manganefe Quel- M ques Auteurs François la confondent M avec ce que Ton nomme Pérjgueux, » qui eft une pierre noire comme du ,ocharbon, & meme avec le /offre ou »ileil d’émail ? Le façayant M. Wallerius diflingue 4 efpéces de magnéfîe- i°. Magnefa Jblida, Magnefiafriata, 3°. Magnefa. fquamofa 4°. Magnefa teffiilata fvlendens. Elle ne contient que tres-peu de fer fuivant cet Auteur.
L'on appelle dans les Verreries de France ce^te cendreainfi leïfiyée, delà charte QU tes charrèest