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CHAPITRE XV.
Autre maniere de faire le Ferret. *
Cette feconde maniere de faire le Ferret ert plus pénible que la premiere ; mais elle produit un effet merveilleux dans les verres. Au lieu de fouffre, il faut ftratifier & calciner le cuivre avec du vitriol, &. le laifter pendant trois jours dans la chambre du fourneau , qui eft voifine de l’ou¬verture que les Italiens nomment Occhio ou l’œil. On le retirera enfiate , Se on le {Ratifiera avec de nouveau vitriol; enfuiteonle mettra à réverbérer, comme il a été dit ci-devant ; en réitérant jufqu’à fix fois cette calcination avec le vitriol, l’on aura un ferret excellent, donton pourra fe fervir pour donner une couleur merveilleufe au verre.
* Le Ferret dont il ertici queftion Lemery & dans celui du Commerce à ne doit pas être confondu avec celui . qui n’eft autre choie que de. la pierre dont il cil parlé dans le Dictionnaire de 1 hématite & qu’une mine de fer,
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Notes de Merret fur les Chapitres XIV & XV.
Le Ferret d'Efpagne n’eft autre chofe que du cuivre cal¬ciné ou de Fœs-uftum, ainfî que Cefa.pin Livre 5. Cha¬pitre y. le nomme en Italien , &en Latin. « Le meilleur a> œs-uflum , dit-il, fe faifoit autrefois à Memphis en Egypte, “ & enfuite dans l’Ifle de Chypre. Pour être bon , il faut “ qu’il foit rouge, & que broyé il devienne de la couleur du “cinnabre : s’il eft noir, c’eft une preuve qu’il a été trop “calciné. On le fait aujourd’hui en Efpagne, & on lap- “ pelle Ferret; mais celui de ce pays eft noir & communique “cette couleur au verre: c’eft pourquoi on s'en fert pour “ noircir les cheveux. Si on le calcine médiocremenr , il “ paroîtra rouge, & aura la même couleur après avoir été “réduit en poudre. Il paroît que c’eft de fa couleur de fer “ que fon nom àefcrret eft dérivé ; car à ne confulter que le “ coup d’œil, le Saffran de Mars donne une couleur rouge, “ mais plus claire que le ferret ». Cefalpin affure au même endroit qu’il y a des Pays qui fourniflent de meilleur que d’autres, de même que la Caftille fournit le meilleur làvon , ôc Venife le meilleur verre. Mais il me femble que le climat n’y met pas une différence affez grande pour nous engagera tirer d’Efpagne par préférence aucune de ces matières.
Le bleu & le verre font deux couleurs principales tant par elles-mêmes qu’eu égard à l’œil & à l’Art de la Verrerie. Par elles-mêmes , parce qu’elles réfléchiffent beaucoup de tayons de lumière , comme on peut voir dans les prifmes triangulaires : & la raifon de ce qu’elles plaifent tant à la vûe , c’eft quelles ne refferrent & ne dilatent point trop la prunelle de l’œil ; une de ces chofes fuffit pour caufer de la douleur. Outre cela, elles font d’ufage dans l’Art de la Verrerie , dans les pâtes , dans les émaux & le verre de plomb: elles ont beaucoup de reffemblance & de rapports avec les pierres prétieufes , ôc on les employé en une infinité d’autres occafions ; fans parler
[62] des différentes nuances quelles ont par elles-mêmes, ou qu'on peut produire en les mêlant les unes avec les autres, l.e bleu Remployé fimplement & tel qu’il eft. Mais dans la teinture, le vert eft compofé de bleu & de jaune : dans d’autres Arts, on employé aufïilevert tout feui;& l’une & l’autre couleur doivent leur origine au cuivre préparé diver- fement. Il cil étonnant de voir qu’en fe fervant de la même matière un moment fuffifepour produire tantôt l’une , tan¬tôt l’autre : c’eft ce qu’éprouvent tous les jours ceux qui raf¬finent les métaux ; carenfaifant diffoudre dans l’eau forte la même quantité d’une feule & même matière, & des mêmes lames de cuivre de même couleur, quelque.'-fois ils ont un bleu très-beau, d’autres-fois un vert très-clair, fans pouvoir donner deraifons de ces divers changemens , ôc fans qu’il foit pofîible de prendre des mefures pour ob¬tenir un beau bleu plutôt que du vert ; c’eft une perte pour eux , attendu que cette derniere couleur eft moins prétieufe que la première. Quoique la couleur naturelle du cuivre foit le vert de mer, qui eft un compofé de ces deux cou¬leurs , elle panche néanmoins toujours plus d’un côté que de l’autre : cela paroît dépendre entièrement des dif- folvants dont on fe fert : en effet, les lames de cuivre en¬terrées avec des raifins donnent une couleur verte, tandis que le vitriol de cuivre & la piryte cuivreufe diffous par l’eau de pluye, donnent du bleu; c’eft ce qu’on voit dans le vitriol de Dantzic , d Hongrie & de Rome. Cela vient uniquement de ce que les parties ont été rendues plus déliées, & de la differente texture des molécules infenfibles de la matière rnife en diffolution. Il me femble que la raifon pour laquelle le léton donne un bleu plus beau que le cuivre, eft que la pierre calaminaire, qui feule met de la différence entre ces métaux , le faiiit de l’acide qui eft natu¬rel au cuivre , & s’y unit. C’eft par le moyen de cet acide qu’il fe forme une fubftance verte telle qu’on la voit dans le vert-de-gris factice où il eft développé par les raifins. C’eft aufti ce qui fait que les raifins de France font plus propres à cette opération que ceux d’Efpagne , parce qu’ils ont plus
[63] acidité que ces derniers, attendu que le climat d’Efpagne eft plus chaud. On voit par-là la force des fucs vitrioliques dans le vitriol d’Angleterre & dans celui de Mars , qui eft un compofé d’efprit de vitriol & de fer : en effet , la cou¬leur de fer qui eft jaune y devient verte ; il arrive la même chofe à la pierre d’Arménie, fi elle eft broyée avec du vinai¬gre fimple, ou avec du vinaigre diftillé. L’effet de la pierre calaminaire s eft fait fentir d’une maniéré bien vifible dans Une expérience dont j’ai été témoin. Un Raffineur de mes Voifins , ayant achetté des lames de cuivre pour s’en fervir 2 précipiter de l’argent qui étoit en diffolution dans l’eau forte, trouva qu’il n’en pouvoit venir à bout, &quc de 30 livres d’argent qui étoient en diffolution , il y en avoit tou¬jours 10 livres qu’il ne pouvoit parvenir à précipiter : la ïaifon de ce phénomène étoit , que ces lames de cuivre ^Voient été fondues dans un creufet où l’on avoit fait fondre précédemment du léton : le Raffineur prit donc un nouveau creufet, & donna fuivant la coutume un feu très-violent pour volatilifer les fleurs de la pierre calaminaire qui s’en¬volent aifément &, femblables à de la farine , s’attachent aux habits de ceux qui font pré lents à l’opération. A près avoir bien féparé ces fleurs, il lui fût aifé de précipiter tout l’argent qui étoit en diffolution dans cette expérience : la pierre ca- îaminaire , en s’emparant d’une partie de l’acide du vitriol, empêche que l’eau forte ne ronge entièrement le cuivre > & par-là, laiffe de l’efpace à l’argent pour nager dans leau forte : c’étoit-làce qui empêchoit la précipitation;car fi l’on jette un métal nouveau dans l’eau forre où il y a de l’argent en diffolution , ce métal prend la place de l’argent, & l’o¬blige de fe précipiter fous la forme d’une poudre blanche. Lour prouver clairement que cet effet n’eft produit que parce
l'acide de l’eau forte eft faifi , il fuffit de voir que l’eau forte , le vinaigre ou fefprit de vinaigre ou telle autre li¬gueur qu’on v >u Ira, verféefurla pierre calaminaire devient plus douce & plu - péfanteque fi l’on verfoit les mêmes li¬queur fur lu corail, des yeux d’écrevitfe , des coquilles > la pierre de linx, &c. Ç’eftauffi par la même raifon que l’eau forte clans l’expérience fufdite avoit pris une couleur d’un bleu fi beau , que mon Raffineur n’en avoit jamais eu ce pareille ; ce qui me fit fouvenir que lorfqu’à la lôlution du cuivre dans l’eau forte , on ajoute des yeux d’écreviffes , l’oif a un bleu très-beau.
Le cuivre eft un des métaux les plus malléables, & il com-munique cette qualité à l’or & à l’argent, lorfqu'on en fait de la monnoye. Il fond à un feu modéré ; les efprits acides & les fels agiffent très-aifément fur lui, & le feu le réduit en poudre lans grande peine ; ce que notre Auteur enfeigne à faire de cinq façons differentes. ï°. Par la calci¬nation du cuivre au Chapitre 14. & par celle du léton,Chap. 2 f. 20. Par le fouffre & le vitriol, Chap. 1 $. 3 ç. Par la fim- ple calcination du léton au feu, Chap. 20, & parcelle des écailles de cuivre Chap. 24. 40. Au moyen d’une triple cal¬cination du léton aux Chap. 2^,28. j°. En préparant le vitriol de Venus, Chap. 3 1 , 1 52 & 1 33. Comme toutes ces chofes s’apprennent avec les éiémens de la Chymie , je n’ai que peu de chofes à y ajouter,fur tout apres avoir parlé affez au long de la production de ces deux couleurs, c’eft- à-dire,du bleu & du vert : de toutes les préparations, la meil¬leure eft celle qui fe fait avec le vitriol de Venus; vient en- fuite celle qui fe fait par la calcination, en fuivant la même méthode ôc au moyen du fouffre , furtout de celui qui eft vif > & cette maniéré eft la meilleure & produit une couleur plus belle qu’aucune de celles que l’Auteur indique , pourvu qu’on donne un feu violent. Car quoique le fouffre & le vitriol viennent d’une même efpéce de marcaffites 5 ôepro- duifent des efprits qui n’ont point de différence notable ; néantmoins le fouffre > pouffé par la vivacité du feu pénétre plus vite & plus facilement les métaux , & par conféquent fépare leurs parties lès plus déliées : outre cela, le feucon-
5 Ce que Merret appelle ici Mir-cafîte n’eft autre choie qu'. /une vraye Pyrite dont on tire le fouffre, le vitriol, & l'arfenic. Le Scavant Henckel prouve dans la Pyritologie que Marcaftite efc un mot entièrement vuide de fens.
fuma
6; fume-les efprits de fouffre, dont la propriété eft de noircir & de ternir les couleurs : car on fcait que le vitriol, fi 1 on y ajoute ou de la noix de galle, ou quelqu’autre vé¬gétal aftringent , fait de l’encre, ou une couleur noire pour les Teinturiers. Si l’on a cette expérience à tenter, il ne faudra point fe fervir du vitriol d’Angleterre, parce qu'il eft compofé de fer; mais il vaudra mieux prendre de celui qui eft compofé de cuivre ; car l’expérience a montré aux Raffineurs que , l’eau forte faite avec le vitriol d’Angleterre, communique fes faletés à toute la diffoludon , ce qui en fend la couleur nébuleufe ; c’eft pourquoi ils ne fe fervent que de l’eau forte faite avec le vitriol de Dantzic.
Si Ton veut donc avoir une bonne eau forte pour extraire tes couleurs, ( ce dont notre Auteur ne parle que dans la préparation du faftfan de Mars), Ton n’aura qu’à fe fervir de nitre & d’alun au lieu de vitriol, comme il fera dit au Chapitre 38. où il eft traité de la Calcédoine : l’on pourroit auffi fe fervir du vitriol d’Hongrie ou du Romain , ce der¬nier eft furtout excellent, & rend le diflolvant très-fort ; &. comme il eft chargé de parties de cuivre, il approche plus du vitriol de Venus, car en diftillant l’eau forte il s’en éléve des petites parties de cuivre , & fi l’on préfente un couteau aux yapeursqui en fbrtent, il fe teint en couleur de cuivre, comme tout le monde le fait. Si on diflout de bon cuivre dans de l’eau forte faite delà maniéré qui vient d’être dite , & qu’on en fafie la précipitation, l’on aura un bleu très-beau & très-propre à donner.une couleur au verre. J ai fait fouvent cette expérience avec l’eau fécondé des Raffineursqui eft très-chargée de cuivre. Je ne doute point que le feu violent des fourneaux ne doive difïîper ou vitri¬fier entièrement le zinc & tout ce qui eft d’une nature fulfureufe. Si on le fait diflbudre dans l’eau forte , il donne des criftaux verts qui furpaflent en beauté le cuivre dont en le fert pour colorer le verre ; ce qui prouve que la voie de la précipitation eft meilleure que celle de l’extraâion des efprits par la chaleur du feu ou l’exficcation, parce que les parties les plus fubtiles ôc les plus pures du cuivra partent avec l’eau à la diftillation , c’eft ce que démontrent, l'expérience du couteau & plufieurs autres qui fe trouvent rapportées dans les ouvrages des Chymiftes.
J’ajouterai encore un moyen d’extraire la couleur du cuivre : je l’ai fait de la maniéré fuivante. Je prends du cui¬vre calciné & du vert-de-gris, de chacun une once; & après les avoir mis dans deux matras de verre , je les rem¬plis du fuc exprimé du Cochlearia des jardins , qui contient beaucoup de fel volatil : après avoir bien bouché les vaif- feaux.. je les laiffe à la cave pendant un mois ; je les expofe enfuite au foleil pendant tout l’été ; au bout de ce tems, je filtre la liqueur à travers un papier gris, & j’ai parce moyen une bouteille d'un beau bleu, & l’autre d’un vert de mer. Je me fais un plaifir d'autant plus grand de rapporter cette expérience , que ie u’ai jamais remarqué femblable efFet du fel volatil ; & il eft très-probable que toutes les autres plantes de ce genre qui contiennent beaucoup de fel vola¬til & de fuc vifqueux , tel que l’ail, produiroient des effets finguliers, fi on les mêloit avec le cuivre ; car les feuilles de ces végétaux font d’un verd foncé, mêlé d’un peu de bleu. Je conclus donc que tous les acides ,& les fels neutres qui contiennent de l’acide peuvent diffoudre le cuivre, & qu’il y a une infinité de procédés & de maniérés différentes de faire des diflolvants pour extraire les teintures. Notre Auteur dit au Chapitre 20 , que le léton eft composé de cuivre & de pierre calaminaire : comme je n’en connois nulle part le procédé , je vais le donner ici. On trouve la pierre ca’am maire dans le Comté deSommerfet & dans les parties méridionales delà Province de Galles; &quoi- qu on en apporte de Dantzic , notre pierre calaminaire d Angleterre lui eft préférable. Il faut bien des prépa¬rations à cette pierre avant que d’en faire ufage. On com¬mence d abord par la calciner dans un fourneau qui a d’un fes , avant que de s’en fervir à fairfl du cuivre de léton ; parce que le plomb mêle au cuivre le rend caflàut.
[67] une couverture étroite qui fert à allumer le feu : l’on fait un feu de charbons, on de bois ; ce dernier vaut encore mieux, car il donne plus de flammes, & par conféôuent eft plus propre à réverbérer. La calcination fe fait ordinairement en cinq heures ; & pendant ce terns , il faut fouvent remuer la matière avec un grand rable : il faut bien de l’at¬tention pour faire cette calcination , car fl cette pierre n’eft pas calcinée à point, elle ne fe mêle pas avec le cuivre ; fi elle l’efttrop, elle rend le cuivre caffant, & dans 1 un & l’autre cas il ne teint point le verre comme il faut. La marque d’une bonne calcination eft lorfque la pierre eft changée en une poudre blanche très-déliée. Il fe perd en-viron la moitié de cette cadmie , comme on l’appelle ordi¬nairement , qui s’en va en fleurs , & s’atache à l’orifice du fourneau fous différentes formes : ces fleurs font de peu d ufage , quoiqu’on pût aifément prouver que c’eft le vrai Pompholyx des anciens qui s’en fervoient dans les on¬guents qui en ont pris leurs noms. C’eft un remède très- defliccatif, & fi on l’applique fur les tendons & les nerfs ulcérés, il deffeche promptement ces playes & fans douleur. J’ai communiqué mon fentiment fur cette poudre au fa¬meux M. Harvey, & il eft convenu avec moi, que c’étoit le Pomphoiyx des Anciens. Ce grand Médecin s’en fervoit fouvent & avec beaucoup de fuccès.
Après avoir calciné la pierre calaminaire , on la broyé , & on la paffe par un tamis très-fin ; on la mêle avec des charbons bien pulvérifés ; on met ce mélange au fond d’un creufet, & l’on met par-deffus une lame de cuivre , c’eft- a-dire, cinq livres de cuivre fur fept livres de ce mélange,ce qui eftla proportion communément obfervée. On prépare fes pots ou creufets pour cette opération avec de la terre graffe qui fe trouve à Nonfuch ; on la fait calciner toute feule. On la mêle avec moitié de morceaux de pots pilés. Lorfque les creufets font bien préparés de cette façon, As font en état de réfifter au feu pendant quinze jours,on même davantage.
Les fourneaux où l’on fait fondre le cuivre & la cadmie font àfix ou fept pieds de profondeur en terre ; on creufe le terrein par degrés & en rond depuis l’aire du laboratoire jufqu’à l'embouchure de ia foffe. C’eft par cette ouverture qu’on jette le feu & les matières dans le fourneau qui eftau milieu du terrein creufé, & fe trouve perpendiculaire à l’aire du laboratoire. Ce fourneau a par le fond trois ou quarté pieds de diamètre, & fe termine en cône à l’ouver¬ture qui a un pied de diamètre , ce qui luffit pour en tirer le creufets & le feu. A cette ouverture, il y a un couver¬cle de fer avec un trou pour pouvoir gouverner le feu ; au fond du fourneau eft un canal oblong, ou une concavité par laquelle on fouffle le feu. L’on donne d’abord un feu très-modéré qu’on augmente par dégrés jufqu’à ce que le cuivre entre en fufion & fe mêle avec la cadmie, ce qui arrive ordinairement au bout de douze heures : chaque douze heures-, à compter depuis cinq heures du matin juf¬qu’à cinq du foir , l’on y jette les lames de cuivre. On retire les pots ou creufets qui font communément au nom¬bre de huit, ou dix avec une longue ténaille, & on les met pendant quelque tems dans un lieu chaud, afin que le métal réfroidilfe peu à peu : on le verfe enfuite dans des moules de pierre , & on en fait des lingots de trois pieds de long & d’un pied & demi de large , qui pefent 60 à 80 livres. Les moules ou lingetieres font faites de deux pierres du genre des calcaires , autant que j’ai pu le voir ; car elles ont plufieurs petites parties brillantes, que le long ufage n’emporte point , quoique leur couleur à la longue , de bleuâtre devienne d’une couleur de cuivre. On appor- toit autrefois ces pierres de Hollande; mais on en a depuis trouvé dans les montagnes de Cornouailles d’auffi grandes que les pierres dont en fe fert pour couvrir les tombes. Il faut bien échauffer ces pierres, avant d’y couler le métal, car fans cela il faüteroit, &les moules fe briferoient; iifaut en avoir piuiieurs mouie> tous prêts ; car après qu’ils ont fervi trois jours, iis 'e fatiguent & fe fendent : il faut alors les frotter defuif& de charbons. L’on obfervera de toujours mettre du mélange de charbons & de pierre cala-
[ 69 ] hnnaire fous les lames de cuivre ; de cette façon, la cadmie échauffée par la chaleur du fourneau & des char¬bons 9 pénétrera plus aifément le cuivre , fe mêlera infen- «blement avec lui , pour ne faire plus qu’une même maffe , & conftituera le corps que nous appelions léton ; au lieu que fi l’onmettoit la cadmie fur le cuivre , elle s’en voleroit. Cela n’empêche pourtant point qu’il ne s’en fépare une grande partie qui s’attache aux parois du fourneau. On donne à cette partie différens noms, fuivantfes fituations, figures & couleurs différentes. Pline, Livre 34.Chap. 10. L nomme Capnitis, Botrytis , Placitis, Onyckitis , Oflracitis. Les fleurs de cadmie contiennent toujours un peu de cuivre , & on peut aifément l’en féparer, foit en y verfant de l’eau forte, foit en l’expofantà l’air $ & même lorfque Vous la tirerez du fourneau , vous lui trouverez quelquefois Une couleur bleue tirant fur le vert. L’augmentation du poids eftde 38 à40 livres, de forte que 60 livres de cuivre , lorfqu’on y a mêlé la cadmie, font 100 liv. de léton. ïl faut obferver ici que le feu ne foit point trop fort, & que les creufets ne refient point dans le fourneau trop long-tems après la fufion du cuivre , de peur que la cadmie ne s’en¬vole avant que les charbons , qui étoient mêlés avec elle & qui font au fond du creufetne l'oient réduits en cendres. Il n’eft pas rare de trouver ces charbons au fond des creufets, entiers & tels qu’on les a mis, quoique les creufets ayent été pendant plu fleurs heures dans une chaleur continuelle. Ïl faut même de néceffité que cela arrive, attendu que le cuivre mêlé à la cadmie , c’eft-à-dire le léton, demande plus de tems pour fe fondre que le cuivre feul.
Nous ajouterons à ce qui a déjà été dit de la féparation du cuivre d’avec la cadmie, que lorfqu’on veut faire des fils de léton , il faut toujours échauffer ce métal : car fi on n’a pas foin de le faire, il fe caffe toutes les fois qu’on fait effort
70 pourle tirer: mais il ne faut l’échauffer qu’au point de lui donner un rouge couleur de cerife, fit point davantage ; car fi l’on paffoit ce dégré de chaleur , la cadmie s’en fépa- reroit , & c eft ce qui arrive bien vîtelorfqu’on en fait des fils déliés.
Remarques de Kunckel fur les Chapitres XI V_ XV.
Tout ce que ditPAuteur fur la maniéré de calciner le cuivre dans ces deux Chapitres eft très-exadie, & doit être fuivi de point en pointa