CHAP IT RE CX.
Manier e de tirer la Laqué & la couleur des fleurs d Dranger, du Pavot (duvage, de l Iris , • de Vio- leites ordinaires & des Violettes rouges , des Rofles rouges, des fleur s de Bouroche, de Glayeul > &c. aiufl que d'extraire la couleur verte de la Mauve > de la Pimprenellc & des au tres her bes.
O N prend telles fleurs, ou herbes que 1’on veut; rnais pour être bonnes, ilfautqu’en les écrafant elles colorentle papier, fans cela elles ne vau- drountrien pour i’opération ; onremplit un grand chapiteau,des feuilles des fleurs ou des plantes dont on veut faire 1’extrait; on roet ce chapiteau fur Une cucurbite remplie d’eau-de-vie; 1’onyadapte un recipient; & après avoir luté les jointures, on donne un feu doux : la partie la plus fubtile de 1’eau-de-vie monte dans le chapiteau , & en tom- bant fur fon rebord , extrait la couleur des herbes °u fleurs qui y font; & après s’en être chargée tQmbe dans le recipient. Sion remet cette partie ^plus fubtile a difliller de nouveau , elle paffera couleur & pourra refervir aux mêmes ufages,
II reftera au fond une teinture qu’on féchera dou- cement; dcl’on aura une lacque excellente pour .U Peinture.
Notes de Merret Jïtr le Chapitre C X.
La maniere indiquée par 1’Auteur pour s’afliirer de Ia bonté des herbes & des fleurs eft bonne; mais il vaut en- coremieux en Faire 1’eflai fur du iingc ; les Alatv hands opt coutume de prefcrire aux Matelots qui vont en voyage, de macherles plantes, Sc de voir fi elles donnenfüne oouleuï a la lalive : c’eft, fii’on veut, une marque qu’elles font bon¬nes; il en eftdemcme fi elles colorent ie papier ouletoffe» Je vais donner au Leéteur un catalogue des plantes-qui fourniffent de la couleur, & dontpar consequent on t ,ut tirer la lacque, en commencant par celles dont fe fer ent
les Teinturiers,
Le bois Néphrétique & fes trois diffe'rentes efpéces que les Anglois appellenttfufticks, dont onfe fert pour la cou¬leur jaune & ie verd.
La Compegiqne Ci le Sylveftqr; ce font des efpéces de bayes ou de grains, qu’on apporte des hides occidentals , & qui donnentla même couleur que la cochenille , mais moins éclatante & moins belle.
On peut y joindre la graine de fummach , les coque- licots, la régliffe , le Curcuma, les fleurs de faftran fauvage , l' Anotto , compofit’.on qui fe fait d’un mélange d algue pour¬prée , d’urine Sc de graifie, Sc qui donne une belle écariatte, le genét pour le jaune.
II y en a d’autres dont on ne fait point ufage dans la tein- ture, telles que le faftran , te PhalaturiumHx. [zTradefcantt qui donne un bleu foncé fort beau , lesbarbots dont onfait le beau bleu d’afur des Teinturiers , 1’algue- marine des Teinturiers qui eft différente de i’algue pourprée. Jean Bauhin en compte deux efpéces. Les jacinthes, notre Colchicum pourpre,le baccifera triplex, letournefol dont le fuc donne la couleur qui porte ce nom, la Blattaria ou herbeaiix mites dont la fleur eft jaune Sc bleue , le convol¬vulus d’Amérique a feuilles plifféesou Méchoacan.
Il y a encore quelques autres plantes qui contiennent
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decolorant, comme le Tithymale , le laitron épineux , le fichus after, le piffenlit, labarbe defeouc, Ia fcammonée \nncoife, les réponces, les laitues , dont la plupart jau- Hiflent en féchant auSoleil, ce qui me fait pénfer que la Cambaye eft un fuc de tithymale.Le mille-pertuis& laToute- ^ine ont un fuc rouge dans leurs boutons. La grande ché- Ijdoine, & le felfel des alpes donnentun fuc jaune. Il y a dautres baies de plantes quifourr.iffent aufli des couleurs, tellesfont la morelle, la vigne blanche, le houx 5 lefceau (;e Salomon, 1’aconit, le franiboifier, lecerizier, la bourge- dpine, le fuc verd des peintres, les nois vertes; ainlj que la bézettaou Tomafolts de Bezedinus,décrite de la maniere qui dit dans Wormius,Liv.2,Chap. 3 4.* C’eft: un lingetrès-fin, 3ï chargé d’un rouge très-vif & tres-beau, qui m’a été don- né par le fieur Herfurt, Apoticaire du Prince Chriftian V. taaais il ignoroit la facon de le préparer ; il paroitque c’eft avec la teinture du fantal rouge. On s’en fert pour fe farder
* & pour donner une couleur aux mets, comme on fait avec
* d toürnefol ordinaire ; maisla Bezetta eft bien au-deffus;
* c eft un cofmétique qui, trempé dans 1’eau, la teint de fa 60 Couleur, mais il nela donne point au vin, Óc encore moins 31 afefpritde vin ». Voila ce que dit Wormius : j en ai aiiftl vu de coton ; elle eft affez commune ici: on s’en fert Pour fe farder, & il n’eft pas douteux qu on n’en put tirer de la lacque très-belle.
On peut encore mettre de ce nombre les fleurs de §renadiers, lamarante, lagrained’héliotrope, qui broyée donne un fuc d’abord verd, qui devient enfuite bleu, & en* Inpourpre, fuivant Libavius. L’alaterne en donne un felon Clufius; les fleurs de la chicorée, de la fcabieufe Indes, le chryfanthemum de crete ? le creffondes Indes 5
** Une infinité d’autres dont on parlera par la fuite dans un particulier, attendu furtout qu’aucun Botanifte n’a obfervé les teintures des plantes , & ne les a range'es dans
^sclafles, quoique 1’ulage enfoit fort grand & que les archands en tirent bon parti.
Les plantes dont les feuilles donnent de la couleur, font ie Ff
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ftramonium, Parbre colorant de virginie dont les feuilles ? en les broyant dansla main , donnent le verd le plus foncd que je connoifle , les feuilles de Pacanthe , du tabac 3 dü fenouil d’Efpagne, qui donnent un beau verd , quoique en les frottant dans la main, fur du papier ou du linge* elles donnent du bleu.
La maniere de tirer les couleurs des plantes par la dif- dilation, eft très-connue & fort ufitée ; tous les efpritstirds paries operations Chymiques , deviennent blancs en moH" tant > & prennent la couleur des plantes colorées, c’eft ee qu’on voit dans Pefprit compofé delavande, 1’eau de pavoO &c. que tous les Apoticaires favent faire.
Mais Pextrait de Pefprit de vin ainfi coloré donne un^ couleur peu vive & mourante : il doit être fait a feu dou* & au bain-marie, & en petite quantité; une trop grande chaleur noircit les couleurs des végetaux ; le lapis-lazuli lui* menie perd fa couleur a un feu trop violent.
Rewarques de J. Kunckel fur le Chapitre C X.
L’operation que donne 1’Auteur eft fort curieufe ; mais elle exige bien plus de foin qu’il ne dit: il faut furtout faire une attention toute particulierea la couleur desgouttes qui viennent a la diftillation apty avoir agi fur lesplantes ; celles qui font le plus colorées font les men" leures ; mais fi on continue la diftillation trop long-tems , il arrive foü' vent que les dernieres gouttcs gatent ce qu’on avoit diftillc d'abord? pour bien faire, il faut mettre A part & garder la couleur qui vient la premiere.
Il eft aufli fort bon de remarquer que les plantes & fleurs qui fopC tendres ne doivcnt être ni coupées, ni écrafées ; fans quoi leur fllC le plus groffier pafte a la diftillation. & la lacque n’en eft pas fi beft* Mais cette attention n’eft point ft ne'ceffaire pour les plantes qui ne co*' tiennent pas trop de fuc, comme feroit la primprenelle. Void maniere dont je me luis ie mieux trouvé dans cette operation. prens un efprit dc vin bien rqélifié & déflegmé; je le verfe fur plante ou fleur dont je veuxextraire la teinture: f, ja plante eft grofle ou feche , jc la coupe en plufteurs morceaux; mais pour b' fleurs, comme on 1’a dit plushaut, il ne faut ni les couper ni écrafer; aufli-têt que mon efprit de vin s’eft coloré, je le décanr^? & j’en verfe de nouveau: ft la couleur qu’il me donne cette icco^c
f°is eft (emblable a la premiere , je les mets enfemble; fi elle eft dif- \.?.ntc » )‘e les laiffea part: j’en ête 1’efprit de vin par la voye de la filiation , & jen’en laiffequ’un peu dans 1’alembic pour pouvoir en ledrer la couleur -je la mets dans un vafe ou matras pour la faire éva- P°rer lentement, jufqu’a ce que la couleur ait une confiftance con- able , ou jufqu’a ce qu’elle foit entierement féche; mais il faut que lefeu fojt bjen j0V(X 5 parce que ces fortes de couleurs font fort tendres. V a des couleurs de fleurs qui changent & donnent une tcinture différente de la couleur qu’elles ont naturellcment, c eft ce qui arrive furtout au bleu : ilfaut un foin tout particulier pour tirer cette c°uleur : il n’y en a point qui m’ait couté autant de peines; & je ne Pas me vanter d’avoir jamais obtenu un bleu dont j’euffe lieu d etre
i. folument content, quoique j’en aye préparé differentes fois chez le Uc de Saxe-Lavembourg, au fervice dequi jYtois pour lors. Tous
e/fcret con^^e a y apporter une grande attention ; il n’y a que 1’ex- perience & la pratique qui puiflent mettre en état de réuftir: par le ^oyen que je viens d’indiquer, on s’épargne la peine de faire de fré- 4u-ntes diftillations , & l’on a une plus grande quantité de lacque ; 9uant a la maniere que donneNeri,elle doit être couteufe, eu égard a la Pe^ne qu’elle demande; on n’auraqu’a l’elïayer pour en etre convaincu: de la maniere que j’ai prefcrite, on connoïtra fur le champ les
Plantes qui font propres a donner des couleurs,& celles qu’on en peut On n’a pour cela qu’a en faire Peflai avec une couple donees efprit de vin. De plus , on ne pourra jamais , en fuivant la méthode
*CNeri, tirer ducochlearia un verd aufli beau, que par la m.enne; Car dans fon opération le fel volatil de cette plante étant accablé par 1’acide del’efprit de vin , devient rouge; il en eft de mêmedes autres. C’eft auffi la fa^on la plus prompte de s aflurer de la couleur de chaque plante ou fleur ; furquoi il eft bon de remarquer qu’elles donnent fou-: Vent dans 1’efprit de vin une couleur différente de celle qu’elles don-
a la leflive.
Il eft encore bon d’obferver que Pextra&ion ne doit fe faire que
j. a^un endroit frais; car pour peu qu’il y eut de chaleur , la couleur ƒ gateroit. C’eftpour la même raifon qu’il eft très-aifé en diftillant de ƒ r°mper au dégré de chaleur; cequi rend tout i’Ouvragc laid &
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