CHAPITRE II.
DES ÉLÉMENTS QUI CONSTITUENT ET QUI COMPOSENT
LE VERRE.
On ne trouve dai^ les anciens auteurs qui ont écrit sur le verre quo bien peu de renseignements sur les éléments dont on compo- sait le verre. Les termes mêmes dont ils se servent peuvent sou¬vent iuduire en erreur ceux qui ne connaissent que la nouvelle nomenclature chimique. Les recettes qifils vous communiquent coairae de précieux secrets n’offrent que des indications incom- plètes. On ne trouve dans Agricola, Neri, Merret, Kunckel, Hau- dicquer de Blancourt et autres que des données éparses, incohé- rentes, quelquefois fausses, et presque toujours envelöppées d’emblèmesalchimiques qui les rendent parfois inintelligibles. Les auteurs qui ont écrit vers le milieu du siècle dernier,, et en parti¬culier dans V Encyclopédie, ont commence a suivre dans Ia des¬cription de Tart de la verrerie une marche plus rationnelle; les progrès rapides de la chimie, après lafin du dix-huitième siècle, et 1’espritgénéral de méthode qui a marché parallèlement avee les sciences, imposent aujourd’hui la loi de mettre les faits pratiques en accord avec Ia science, de parler un langage- qui ne puisse donner lieu a des interprétations erronées; ctainsi, par exemple, pour les malières qui entrant dans la composition des différents verres et dont nous allons nous occuper dans le présent chapitre, elles doivent être spécifiées de telle sorte qu’on ne puisse plus jamais se méprendre, non-seulement sur leur nature, mais sur la proportion exacte de leurs principes constituants.
Silice. SZO3. — La silice, acide silicique, com bin ai son de la silice et de 1’oxygène SfO3, était connue autrefois sous le nom de terre vitrifiable, paree qu’en fait èlle est la partie essentielle de toutes les compositions de verre. La silice se présente sous plu- sieurs formes et est employee par les verriers a 1’état de sable plus ou moins pur, de grès, de quartz, ou enfin a 1’état de caillou, de
silex auquel elle doft son nom. Pure et cristallisée, la silice con- stitue le cristal de roche, qui a été longtemps le type du verre le plus beau.
La silice est dans un élal d’autant plus favorable a la vitrifica¬tion, qu’elle se trouve dans un plus grand élatde division; c’est pourquoi le verrier, a égalité de purelé, préfère 1’emploi du sable a celui du gres, du quartz, du silex; ear, dans ces derniers cas, il est obligó de faire subir & la silice une manutention dispen- dieuse dont il va être question tout a l’heurc.
Sables. — Le sable le plus apte a faire le plus beau -verre est naturellement celui'qui est le plus pur, le plus exempt de matièrcs élrangères. On peut le plus souvent le juger par 1’apparonce seule: s’il est parfaitementhlanc, qu’examinéti la loupe on le voie com¬pose depetitscrislaux blancs, transparents, semblables aucristal de roche, le verrier pourra a peu pres répondre de pouvoir avec ce sable produire de très-beau verre blanc; tels sont les sables que Ton extrail de certaines carrières de la forêl de Fontainebleau, des environs de Nemours, de la forel de Chantilly et de quelques aulres localités en France, des environs de Namur en Belgique. L’Angleterre ne possède aucun sable qui puissc elre compare a ceux que nous venons de citer; le plus blanc qu’eile possède pro- vient de 1’lle de Wight el a été longtemps employe par les fabri- ques de cristaux de co pays; elles se servent beaucoup a présent d'un sable envoyé des Etals-Unis d’Amérique, qui est peut-être
supérieur encore a nos beaux sables de France.
Le sable, même blanc, dans lequel on apenjoit & la loupe beau-
coup de grains‘amorphes, n’est pas aussi pur, il contient genera- lement des matières alumineuses et calcaires, que Ton peut du reste séparer en grande partie par un lavage. La plupart des fabricants de crislaux fontsubir ce lavage au sable quails emploient: on peut 1’opérer, soit sur une table légèrementinclinéesur la par¬tie supérieure de laquelle coule de 1’eau qui entraïne les parties
' les plus légères du sable que Pon agite sur cetle table dans le sens inverse de la chute de 1’eau, soit en mouvant le sable avec de F eau dans une caisse en bois dont, après cetle agitation, on ouvre un orifice par lequel s’écoule 1’eau enlrainant les parties les plus légères, parmi lesqüelles se trouvent les parties calcaires et alumi¬neuses. Ce lavage est surlout ütile pour la fabrication du cristal, dans lequel on n’emploie jamais dé chaux, Cette operation du la-
vage a encore un résultat utile, celui d’enlever les petites portions :? de matières organiques que peut contenir le sable, et qui, étant plus jé^ères, s’cn vont avec 1’eau. Pour les verres blancs, les glacés, il semblerait que, pour vu que le sable ne contienne pas de parties fer- - rugineuses, peu iinporle qu’il contienne des parties calcaires dont
Panalyse aurait seulement a faire le dosage exact pour régler en consequence les proportions de la composition ; mais telle n’est pas cependant la réalilé : les verriers ont généralement reconnu que les sables dont la formation est la plus cristalline, la plus
• exemple de parties amorphes, sont les plus favorables a la vitrifi¬cation : plusieurs même croienl que ces sables exigent une moindre proportion d’alcali. Pour moi, je crois seulement que les sables amorphes exigent une plus grande quantilé d’alcali quand ils con- tiennent une foTte proportion d’aïumine, mais non pas quand ces portions amorphes sont cependant de la silice. Toutefois, je con- sidère ces sables amorphes comme d’une qualité fiieheuse, non pas paree qu’ils exigent une plus forte proportion d’alcali, mais paree que le verre produit par ce sable est d’un affinage plus long, se purge plus lentement des gaz dontle verre doit être exempt avant de commencer le travail du coulage ou du soufflage. Lorsque 1’on n’a a sa disposition que des sables contenant une polite pro¬portion d’oxyde de fer, on les lave a 1’acide chlorhydrique étendu d’eau; quelques verriers ernploient de préférence 1’acide sulfu- rique. J'engagerais généralement le verrier a se procurer un sable plus pur d’une localité éloignée, même avec un petit surcroit de dépense.
Quand le sable a été iavé, il faut le faire sécher, ce que i’on opère dans de grandes chambres sous le sol desquelles on con- struit un foyer.
Suffit-il de sécher le sable, c’est-a-dire de lui enlever toute l’eau provenant du lavage, et doit-on le chauffer au rouge avant de le faire entrer dans les compositions ? C’est une question dont la so¬lution n’est pas encore nette pour moi. Un assez grand nornbre de verriers sont dans 1’habitude de faire subir cette operation a leur sable: ils prétendent que le sable chauffé au rouge fond plus faci- lement lorsqu’il a subi cetté operation, qu’il requiert une moindre quanlité d’alcali. Un chimiste allemand très-versé dans tout ce qui coucerne les verreries, Al. E. Engel, ingénieur des mines, ad- metiant comme positif ce que plusieurs verriers lui ont dit & eet
égard, a cherché a 1’expliquer d’une manière qui s’applique aussi è 1’état plus favorable è la vitrification des sables conlenant le plus de petits cristaux. « La silice, dit M. Engel, lie serait-elle passemblable a 1’arsenic, qui, a 1’élat AaO", est parfaitement trans¬parent et cristallisé, et a 1’état A2OS n’est que translucide et opa¬que et assez semblable a un émail blanc? II n’y a la que des dif¬ferences d’oxydation : il en est de même peut-être de la silice par rapport aux diverses espèces de sable, et peut-être I’opération de chauffer au rouge les sables avant de les employer produit-elle
une suroxydation de la silice qui la rend plus fusible. » -
M. Engel n’a pas vérifié par des opérations délicates de Iabora- toire cette hypothese, et j’avoue que, cetle plus grande fusibilité du sable chauffó au rouge ne nrayant pas élé pratiquement prou- vée dans ma longue carrière verrière, je n’ai pas recherché moi- même si par cette operation la silice absorbait une quantilé appréciabte d’oxygène.
Nous dirons peu de chose ici des sables employés par les verre- rics de bouteilles. Cette fabrication n’exigeant pas un verre blanc, il n’est guère de localilés qui ne présentent a proximité un sable ayant les qualités siiffisantes pour ces verreries.
Gi'ês. — Le grès n’est autre chose qu’un sable agglutiné par un ciment qui consiste généralement en argile ou en carbonate de cbaux; ce ciment, quelque peu abondant qu’ii soit, constitue toutefois une impureté qui met le grès dans un élat d'infériorité vis-a-vis du sable dépourvu de ce ciment; dans certaines localitós toutefois ces grès sont employés quand ils ne sont pas trop durs a écraser, et qu’ils sont plus exempts de matières étrangères et surtout de fer que les sables qui se trouvent a proximité; ils peu- veht surtout être employés pour la fabrication des verres a vitres, dans lesquels la chaux, loin de nuire, forme un des éléments de la composition. Nous ne croyons pas utile de nous étendre ici sur Ia manulention a faire subir au grès avant de 1’employer, ni sur les prix de cette manulention, qui dependent de la dureté du grès.
Quartz. — Presque toules les verreries de Bohème et quelques verreries dans le midi de la France emploient Ia silice a 1’état de quartz : ce quartz hyalin se rencontre quelquefois en fllons dans Ie granit et le gneiss, quelquefois en fragments plus ou moins anguleux en diverses localités. Ce quartz ne peut être facilement broyé qu’après avoir été rendu friable en le chauffant aü rouge et
lo projetant ensuite dans 1’oau. Nous dohnons (fig. 3} lo plan et les coupes d’un four dans lequel on peut opérer la calcination du quartz.
[image]
La grille AA, sur Fig. 3.
laquelle on brüle du charbon de terre, com¬munique avec Vair# a a a a sur laquelle le quartz est chanffé au rouge cerise; la clie- minée est placée en D.
On n’éleint pas ce four tant qu’on a du quartz a calciner, ce qui di- minue bëaucoup les frais de combustible.
Aussitót üne fournée jetée a Peau, on rem- plit de nouveau le four, en sorte que la nouvelle charge arrive promptement a être pénótrée de la chaleur nécessaire. On peut compter sur une four¬née toutes les quatre heures. On enfourne, paria porte B, Ie quartz sur 1’aire du four, qui est légèrement inclinée deBen C. On remue les fragments de quartz avec un rablë en fer pari’ouvertureB, pour que toutes lés parties s’égalïsent de tempe¬rature. Quand toute la Coupe suivant la ligtlft elL
fournée est a une temperature suffisammènt élevée, on pousse tous ces fragments de quartz par Couverture B vers 1’ouver-
lure G, ét ils tombent ainsi dans la cuye E, qui est pleine d’eau j ils sent ainsi êtonncs et rêndus très-friablcs. Cet effet s’ex- plique facilement par la dilatation que produit sur Ie qq^rlz la temperature élevée a laquelle il est exposé, el la contraction rapide que tend a prodüire la projection dans Peau; p est un effet analogue a celui de la lariqe batavique. Il s’agit ensuite de ie pé- duirea 1’état de sable; celas’ppère généralement, en Bohème, au moyen de pilons armés de tetes en fonte mus par une chute d’eaü ; niais nous préfórops 1’usage de meules verlicales en pierre dure roulant sur qn fond de la. même pierre dure. Le sable se trouv.e aipsi exempt de parcel les de fer; et si les meules s’usent, dumoinS eeja n?entraine qu’uqe bien faible proportion de malière
siliceuse §t calcaire sans addition appreciable d’oxyde colorant.
Silex. p’est dans le silex pyromaque que la silice se trouve
a Pun des états de plus grqnde pureté, aussi les fabricants de verre « ; 1 J
blanc, en Angleterre, n’ayant gucre a leur disposition de sable blanc, employèrent-ils originairement Ie silex {flint} broyé, pour leur fabrication, d’oiï est venu a leur verre le nom de flint-glass. La couleur noire du silex. pyromaque lendrait a faire croire qu’il contient des parties colgrantes; on n’y relrouve cepen-
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dant ordipaipenient que d§s IJPftces presque insqnsibles de fer, ce qui ferait suppose? que cptte couleur noire est due a quelques
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principes organiqqes qui se brillent quand on calcine ce silex, qui,
. aprgs le broyagej fournit une farine très-blanche. Je ne crois pas qu!aupune ygrrerie de nos jours emploie le silex, dontles fabricants de poteries seuls se servent pour faire la faïenpe ponnue sous le
nom de cailloutage, terre de pipe.
Cailloux. — Le quartz se trouve parfois dans cgrtaines rivières a 1’état dé gailjoux roqlps, très-propres a faire un sable Irès-blane.
Lorsqüe la prislallerje de Vonèche, prés de Givet, appartenant a M. d’Ariigues, se trouva par le traité de 1815» faire parlie dq terri- toire des Pays :Bas, il acheta la verrerie de Baccarat, dansje dépar- lement de la JJeurtlie, pour ppuvoir continuer a fabriquer poqr la France. Il chercha vainement dans les environs dq sable blanc; re-
marquant alors que le lit de la Meurtbe qui traversait son établisse-
ment offrail beaucoup de cailloux d’une très-grande blancheur, il
en filramasser de grandes quanlités qui furent traitées pQmmeqpqs
I’avons dit pour le quartz; en outre, il fit layer le sable qui en pro-
venait è qne eau acidulóe pour enleyer le pen d’oxydedc fer que
ces paillpux cpnten,aient, et il produisit ainsidu jcristal IrèSrblaoc; maispeu A peu ces caiiloux deyinrent plus rares, du moi ns dans le vpisinage immédiat, pips dispendieux par conséquent, et les successeurs de AL d’Artigues ne tardèrent pas a faire venir dés sables de Champagne, qui, malgré un transport d’ênviron 200 kir lomètres, revenaiept moins cher que lp sable des caillöpxi Après la silice, terre vitrifiable des anciens, qui, cómmp npjis 1’avons dit, est 1’élément principal de tous les verreSj les niajtières les plus essentielles, sans nul doute, sont ce qu’on appelait les fon-? dants alealins, c’est-a-dire les substances nontenant a différents élaIs la soutfc, alcali fixe mineral, ou \apotqsse, alcali fixp yégptal. Ce sont ces substances que nous allons passer en revue, en suivant les transformations que la science a apportées dans lëür prepara¬tion et leur emploi; nous commencerons par celles dont la soude forme la base. '
SOHUC, NaO. — Jé mentionnerai d’abord les diverses matières
qu’on appelait soudes dans le commerce, et qui étaient toutes le résultat de la combustion de plantes marines, surtoüt de celles appelées kali; puis je parlerai du natron, et je terminerai par les soudes a 1’élat de seis dont la chimie moderne a enrichi les com-
1 ‘ . - - C
positions du verre.
Le commerce donnait différents noms aux substances appelées génériquement du nom de soude; on les nommait barille, sali- cor, rochette ou roquette, varech, suivant les lieux de prove¬nance et les plantes qui les produisaient.
Les meilleures soudes venaient d’Espagne, d’ou elles prenaient le nom de soudes d’Alicanle. Les soudes de Sicile étaient aussi assez estimées, puis venaient celles de Carthagèhe, de Syrië, et a un degré moins recherché les soudes du Languedoc, supérieures aux soudes des cötes de Normandie, appelées varech, p;arc.e qu’elles étaient le résultat de la combustion du varech. Les soudes d’Espa¬gne ctaient eonnues aussi sous le nom de barille, paree qu’elles provenaient de 1’incinération de plantes marines appelées barilla qui est le kali hispanica.
Outre les differences qui existent dans les. soudes par la diversilé des plantes briilées, les barilles variant encore A cause des terrains dans lësqueis elles sont seinées, des soins pris pour les récolter et de la manière dont elles sont brülées. Quand on fait la récolte des kalis, on les fait fanèr; puis on pratique en terre des trousoü 1’on
met du feu. On y jette les plantes successi vemen t, è mesure qu’ëlles brülent, ayant soiri de pilonner les cendres qui en próviennent, et qüi formént une paté liquide qui conserve longtemps sa chalenr. Après avoir laissé refroidir spontanément cette püle, on la tire des tróus, on la brise et on la met dans le commerce.
Ces soudes ne doivent pasrester exposéesèl’humidité, qui les fait fondre a la surface; puis, si elles sont transportées dans un lieu sec, elles s’effïeurissent au point même de se réduire en pöus- sière.
On peut regarder F analyse suivante comme étant la représen- tation moyenne des soudes d’Alicante:
Acidc carbonique (uni tant & Ia soude qu’a la chaux). 16,66
Charbon 14,96
Chaux 6,43
Magnésie 2,20
Aluinine. 2,28
Silice.... 7,33
Soude libre.. 14,62
Sulfate de soude. 4,17
Chlorure de sodium. 2,22
Potasse 3,15
Eau et perte 25.98
' 100,00
Les soudes du midi de la France étaient connues sous le nom de salicor, du nom de la plante qu’on cultive sur les bords de la Mé- diterranéé.
IFaprès Ghaptal, ces soudes de Languedoc contenaient:
Silice, magnésie, chaux, aluniine 35,16
Soude libre ou combinée, c’est-è-dire soude causli-
que, carbonate et sülfate de soude 44,53
Chlorure de sodium 18,75
Sulfate de potasse 1,10
99,54
Nous remarquerons ici que cette analyse de Chaptal suppose que la soude sur laquelle il a opéré a été préalablement chaufïée au point de faire disparaltre toute trace d’eau et de charbon libre. Au roste, ce qui prouve Fimmense variété qui existait entre toutes ces
DES ELEMENTS QUI COMPOSENT LE VERRE. 53
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soudes, c’est que 1’analyse d’un échantillon de soude anglaise tftelp}, dont je püis garantir Inexactitude, a donné pour rósultat:
Carbonate de soude. 4,02
Charbon ^00
Silice 1,03
Sulfale de chaux. ..... 5,02
Carbonate de chaux 25,05
Chlorure de sodium 38,05
Sulfate de potasse 14,01
Eau 13,00
Perle en iode, brome, oxyde de fer, etc., n’ayant pu
clre dosés exactemeht 0,02
100,00
Les soudes venant du Levant et principalement de Syrië étaient r généralement connues sous le nom de rockette ou roquette, poudre ou cendre de roquette, poudre ou ccndrc du Levant; c’était tou- jours le produit de la combustion de différents kalis. Elles arri- vaient généralement en póudre, ce qui était dü probablement & 1’efflorescence qu’elles avaient subie, et qui leur faisait donner le nom de poudre de rochet!e. LJon trouve fréquemment cette poudre de roquette ou rockette citée dans les anciens auteurs qui ont écrit
sur la verrerie.
On faisait aussi beaucoup desoudes de cette espèce sur les cótes occidentales de France ; on les nommait soudes de varech. Elles étaient le résidu de la combustion des fucus ou varechs recueillis au printemps sur le bord de la mer ou apportés par la marée. Ces soudes n’étaient pas très-riches en alcali, on ne s’en servait guère qüe pour la fabrication des bouteilles ou du verre a vitre commun. M. Tillet a fait imprimer dans les mémoires de 1’Aca- démïe, on 1771, des observations sur la combustion du varech, et, en 1772, un mémoire fait avec M. Fougeroux de Bondaroy, oü ils déerivent les différentes espèces de fucus que 1’on brüle pour faire la soude. .
Enfin, 1’Angleterre fabriquait et fabrique encore le même genre de soude, connu dans ce pays sous le nom de kelp. Nous avons donné ci-d essus Fan alyse d’une de ces soudes anglaises.
Toutes les soudes dont nous venons de parler Se yendent gé- néralement ep.b.alles, sous forme de pierres plus ou moins grosses, recouvertes a Fextérieur par une efflorescence blanchêtre et dont
la ëdësüre ëst d’uri gris ardëisë jitüs öu riioihs föficéi parseriïé de pëtits charböris et dé trous dorit la gtaridëür vërië suivarit la nature des soudes. En general, les meilleures sont celles d’un gris pêu foncé, qüi eontiennent peu de charbons et des trous un peu grands.
A ces möyens de juger les soudes aTinspection, on joint le secours
de 1’odorat et du goüt: il faut que, mises sur la langue, elles soient
*
lixivielles sans êtré salées. On y recherche üne caüsticité tranche et piquanlesans amertume; enfin on met un peu desaiive sur un morceau dé soude pour juger s’il ne se développe pas d’odeur hé- patique qui dénotë des sullüres, sigrie d’uiié soude de mauvaise qualité.
Ces essais sont peu scientifiques, sans doule, mais en réalité la quantité intrinsèque de soude ne suffit pas pour reconnaïire la qualité d’ürie söridë qüi dépend aussi eü grande partie de la ma- riïère dont les élémerits se trouvent cömbinés• ëri sortó qü’il arrive Söuverit qü’urié soude moins riche est cëpendanl d’uri usage pré- férablë po’ur le Verrief qui, avant d’achi’ièr üne partie de söudë, prëfërë & ütiè' analysë chiniiquë 1’essai en grand sur ürië fóurnéc dê vëfrë.
Lés söüdës étaient souvent ëmployées par le terriër telles qu’elles ëtaient aöhëtéés; lëür püissaricë vilrifiante dépendait non-sèule- ment de Ia quantité de soude pure et libre qu’elles ëöritënaieüt, inais encore : 1‘’ dés terrês proveriarit dé la combustion du vógétal
dtiiït la presence facilite la fusion de la silice; 2° du sulfate de !<’;•? söudë dönt la décöiiipoSition est ëri tötalité Ou au möiris en partie HÉ ópéréë par les sübStarices charborineüses qui résültent de Ia com- P-R
'
büsiiöriimpaffaitëdu vegetal; 3’ düchiorüro de sodium; 4“ du car- böüalë de Öliaüx; 5° dëS öxydes riiétalliqüës, spécialeinent dü fer.
Gës Sóridèsriè pöüvöient toutefois être ëmployées qu’enfaisant su- Kir 'jjréalabléiiïërit S la composition 1’opëration dö la fritté dans tin fötir & rëverhèrëj qui ordinairement était attenant au four de
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fusion; Si öri avail ërifourné la coriipösition directemérit dans les creusets, la matière, par le fait de la presence du charhon en qüari- |§j iité très-nötable, se Sérait böursouflée ët aüfait passé- par-déssus les börds des creüsets.
Malgró cêtlë opëration dit frittage, öri ne pouvait pas obtenir
avec ces soüdes brutes un Verre taiit Soit pëu biaric. Elles étaient O
done róservées pour la fabrication des böuteilles et du vërrë A W
vitte cöirimuUi Avant dé les employer, ön les réduisait en pöudro ||
sur les lieux oü so rócolte le natron; le génóral Andréossy, chargé de les protéger, a décrit en ingénieur et en savant les endroits par ou Pon passe pour se rend re a la vallée des lacs. Son mémoire a étó imprimé dans le cinquantième numéro du Journal de Physi¬que, page 405; on en trouve un extrait dans les Annales de Chimie, tome XXXIII, page 330. Les observations que M. Berlhollet a pu- hliées ensuite sur cette intéressante substance, la manière dont elle se forme, le mode qui conviendrait pour ^exploiter, la puri¬fier et la rendre plus utile au commerce et a 1’industrie, réunissent sans nul doute la concision a 1’intérêt le plus vif; mais nous pen¬sons loutefois que leur relation nous éloignerait de notre sujet. Nous dirons seulement qu’il semblerait que la nature opère direc- tement sur les eaux de ces lacs une partie des résultals qui ont élé si ingénieusement obtenus de nos jours, par notre célèhre chi- mïste Balard, sur les eaux de mer, dans le midi de Ia France.
Avant qu’il fut permis aux verriers francais d’employer du sul¬fate de soude pour la fabrication du verre, ils employaient beau- coup de natron, surtout dans les pays tels que la Provence, oö. son importation n’était pas très-coüteuse. Le natron contient gé- néralement environ 18 a 20 pour 100 de carbonate de soude et 25 a 28 pour 100 de clilorure de sodium, de 1’eau de cristallisation et des matières terreuses; ce natron se vendait 6 a 7 francs la balie, qui pesait environ 40 kilogrammes, ce qui faisait environ 13 é 16 francs les 100 kilogrammes.
On trouvait aussi dans le commerce des natrons purifies, qui contenaient 46 pour 100 de carbonate de soude et 4 a 6 pour 100 de sel marin, et qui se vendaient environ 10 fr. 50 c. la balie de 40 kilogrammes, soit 25 francs les 100 kilogrammes. On tirait aussi des natrons crislallisés de Tripoli, qui se vendaient 26 francs les 100 kilogrammes. Les natrons sont aujourd’hui très-peu em¬ployés.
Carbonate <le soude, NöO.CO2; N«O = 31,2, CO2 22 ; OU bien, sur 100, soude, 58,6, acide carbonique, 41,4. — Les pro¬cédés de decomposition du sel marin, qui ont étó découverts et mis en pratique a la fin du siècle dernier, qui ont eu des consé- quences si importantes pour tant de produits chimiqties, oht pour ainsi dire transformé aussi 1’art de la verrerie.
Les verriers, habitués a 1’usage des soudes d’Alicante et autres similaires, employèrent d’abord la soude brute, c’est-é-dire le ré-
»ES ELEMENTS QUI GOMPOSENT LE VERRE.
sultat direct de la decomposition da sulfate de soude par la craie et le cliarbon, tel qu'il sortait du four; cette soude brute, conte- nant du charbon, no pouvait nalurellement être employee qu’en faisant subir au mélange destine i prodüire le verre 1’opération préalable de la fritte. On ne connaissait pas encore alors le moyen de faire le Verre directement avec le sulfate de soude, et, d’^illeurs, les fabricants desoWe artificielle, car c’est le nom qu’on donnait alors au produit de la décomposition du sel niarin, n’avaient pas la faculté de vendre le sulfate de soude; le gouvernement crai- gnait que 1’on ne püt, avec Ie sulfate, reproduire a bon marché le sel niarin, frappé d’un droit très-élevé.
Cette soude brute artificielle, plus ricbe que les soudes du com¬merce provenant de la combustion des plantes marines, n’était toutefois employée que par les verreries a bouteilles et a verre a vitre commun. Les fabricants de soude artificielle ne tardèrent pas a épurer cette soude et a prodüire ce qui.est connu dans le com¬merce sous le nom de sel de soude, vendu suivant son degré: ce degré pendant bien longtemps ne dépassait guère 70 a 75, ce qui signifiait que sur cent parties ce sel contenait soixante-dix è
soixanle-quinze parties de carbonate de soude sec; les vingt-cinq
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a trente autres parties étaient, eu grande parlie, du sulfate de soude non déeomposé, un peu d’eau et de chlorure de sodium. Nous ne croyons pas utile de donner ici la manière dont on apprécie le degré d’un sel de soude par les appareils de Descroizelle ou de Collardeau, de tels détails allongeraient outre mesure notre traité. Nous avons dit que les seis de soude se vendaient au degré; ce prix, a Paris, était d’environ 75 centimes Ie degré, en sorte qu’un sel de soude de 72 degrés coütait soixante-douze fois 75 centimes, soit 54 francs les 100 kilogrammes.
Les seis de soude so fabriquent aujourd’hui a bien plus haut litre; on les fait jusqu’a 95 et 97 degrós, ce qui constitue du car-bonate de soude presque pur. Les fabricants de verrei vitre blanc ont longtemps employé le sel de soude de 72 i 75 degrés environ. Aujourd’hui, on a presque totalement subslitué ie suifate de soude au carbonate de soude, même pour la fabrication des glacés. Le sel de soude se vend aujourd’hui de 45 a 48 francs, au degré ordi- naire de 80 degrés, les 100 kilogrammes, et environ 50 francs quand il est a 95 degrés. Ce prix est encore beaucoup trop élevó par comparaison avec PAngleterre et la Belgique.
suifritfe rte &uüde, NtfÖ.SO3. II cöritièrit 31,2 dé soude sar 40 d’acide sülfurique, ou, pour 100 de sulfate do soüdë, 43,8 de solide sur 56;2 d’ëCide sulfurique. — Le sulfate de soude, produit immédiat de la decomposition dü sël mafiii par 1’acide sülfhy- driquo; iie pöuvait paSj pendant longtémps, comme notis 1’avons dil, êtr^livré aü commerce, ét,' dü resté, les fabricants de verre rie savaient pas encore 1’emplöyer directement j ie sulfate de söude et la silice enfoürnés dans üü pot de vérrerie iié sé vitrifiaiit qüe tr&s-imparfaitëment; mais les travaux de plusieürs chimistcs et entre autreS dü chimiste allemand Gehlén, en 1813, ayant indiquó les inoyens de faire le verre directement avec le Sulfate de soude, et la preuve ayant été rendüe bien évidente que le sel marin produit avec du sülfate dé soude sérait bien plus dispèndieux
que le sel mariii frappé alors d’un droit élevé, le gouvernement se décida enfin; vers 1824, & lever lés entraves qu’il avait mises a la vente dtt sulfate de soude, qui, sur les indications données par M. Clément Dèsörmes, fut d’abord employé a. la fabrique de verre a vilre de Prémontré (Aisne), et toutefois on commenga par fritter Ié mélange que 1’on faisait de sable, sulfate, craie et charboUi
Nous devöns le dire ici, de telles transformations de procédés ne peuvent, en général, s’öpérer en verrérie très-rapidement; lés résullats qü’on a pü obtëtiir en petit dans ün creüset de IabÖra- toiré; par exemple, sont qüélqueföis bien différents, quand on opère én grand dans les fours de. verrerie. On ne peut, d’autrë part, faire un essai eh grand sur tous les creüsets d’un four, sans risqüer une perte très-importante, resultant d’nüe fonlè mal réussie ou même totalemeni manquéê, qui éntravë loute la fabrication. Ou est dans le cas de payer des ouvriers sanS compensation de produc¬tion ; et, même quand On essaye sur tin seul des huit óu dix pots d’un four, on risque encore de perdrc, pendant plusieurs jours, un huitième ou un dixième do la fabrication; ce qui ne laisse pas que d’être important.
Il faut done procéder avec une grande prudence. Aussi, comme je 1’ai dit, commenga-t-on par fritter la composition de verre faite avec du sulfate de soude ; puis après on opéra directement dans leS creüsets, mais saUs süpprimër encore complétemeiit le carbonate de soude; ainsi, pendant un temps assez long, em¬ploy a-t-on 50 de carbonate et 50 de sulfate, puis 25 seulement do
DES ELEMENTS QUI COJITOSENt LÈ VERRE. 59
carböüate avec 75 de sulfate, ét öö en vifit enfin a supprimer UH talenient le carbonate de soude. L’emploi dü sulfate de söude, que riöüs avons dit avoir óté fait a Préfrióntré d’abord, ne tarda pas & s'intrödüiré dans löütès les atitres fabriques de verre avitre, et iriême de Verre deiiïi-blanc pöur göbëlettèrie.
On le decompose direciement dans les creusets de verrérié paf le ellarbon et la Craië; On se sort de charbón de bois piléj si öii peut Tóbtenif a bon marché; si, par exemplöj le bois ést le Com¬bustible employé dans la vefreriéj on a des braises presqüe sans valeur, on les eifiploie alors a la döse de 7 a 8 en pöids en¬viron pour 100 de sulfate; Si 1’oü n'eiriploie que la hóüille dans la verrerie, on se seft de coke pi ié prövenant des éscarbilles qui töiri- bent sous le foür dé fusion; si on peut so procurer a pföximité de l’anlhraeite, son usage est des plus favörables; paree que sött ac¬tion est plus égale, è un nlême pöids déterminé: pöur 100 de silice, on emploie généralement dë 33 a 40 de sulfate de soüde, de 20 a 40 de carbonate de chaux ou la quantité de chaux équivaléntej de 1 j65 a 2 d’atithfacile pilé, óü dë 2,30 a 2,80 dé braise de bois. :
Nous döhnöns ceci simplemeiit comirie ëkeniplej noüs rious éteiidrons davanlage a eet égard quattd il sëra question des com-positions de Verre.
Quoiquë théöfiquement on dut penser qüë le sulfate de söüdè décöiüpösé par la craië et le charbon dans le cféüsét dévait pro- duire un verre aussi blanc que le carbonate de söüdëj tel n'était pourlant pas le résultat pratique obtenu, èt les chiiüistes s’itnagi- nèferit que la légere’ teititë vërt-bieü&tfe dii verre com posé avec le sulfate poüVait être atlribuée a une féaction d’unó partie dü. charbon sur la söudë, analogue a ce qui se passe dans la fabrica¬tion de l’outremer facticë. :JML Gay-Lüssac lui-même, qui présida longtemps le coöseil de la manufacture de Saint-Göbain j étail péf- suadé que pour cëtte raisön on ne pourrait pas sübstitüër le sulfatö au carbonate dans la fabrication des glacés. C’est a M. Pélöüzë que rèvieiit 1’hönneuf d’aVöir détrüit cetle erreur; partant de cette conviction profonde que de la silice, dü sulfate de soude^ de la chaux et du charböüj tous chirniqueuaent pürs, dèvaiént prö- duire Un verre blanc, il rëeoïinut bientót qtie la coloration vert- bleuatre constamment obtenuo n’était düe qu’è la presence dé 1’öxyde dé fer, dontune très^rhiuime proportion prodüit ce résultat^
60 LIVB.E I. — CHAPITKE II.
et comme Ie sable, la chaux employés a Saint-Gobain sont exempts de fer, c’est vers le sulfate de soude qu’il dut porter ses recher¬ches, et c’est lè, en effet, qu’il décpuvrit la proportion d’oxyde de fer qui suffisait pour produire la coloration que Ton ne pouvait, jusqu’a lui, éviter qu’en employant le carbonate de soude. Le sul¬fate de soude contient généralement un léger exces d’acide sulfuri- que qui agit sur 1’argile du creuset. Cette argile contient de 1’oxyde de fer: voila déja une cause de coloration, quoique sans doute trcs-légère, mais c’est surtout de la sole en fonte du four dans le- quel on decompose le sel marin par 1’acide sulfurique que provient 1’oxyde de fer dont le sulfate de soude retient toujours une pro¬portion plus ou moins notable. M. Pelouze, ayant par une opéra- tion subséquento amenó le sulfate & un grand état de pureté, 1’a entièrement substitué au carbonate de soude dans la fabrication des glacés de Saint-Gobain, et a, par ce fait, apporté une très-im- portahte économie qui a permis de baisser beaucoup le prix des glacés. .
Nous dironssommairement comment on peut opérer la purifica¬tion du sulfate de soude :
1° On ajoute au sulfate de soude environ 5 pour 100 de chaux éteinle, on mélange le mieux possible ces deux substances, puis on arrose d’eau ce mélange, en ayant soin de le remuer a la pelle de manière que toutes ses parties soient également bien humec- lées. Comme le sulfate de soude se combine avec 1’eau en la soli- difiant, il faut employer une quantité suffisante de ce liquide pour amener le tout a un état a peu pres pateux.
2° Deux ou trois jours après, le précédent mélange est dis-sous dans de i’eau chauffée de 50 a 70 degrés, dans des cuviers en bóis dont les parois et le fond sont revêtus de plomb laminé de 2 a 3 millimetres d’épaisseur. La dissolution étant effectuée, on doit s’assurer si la liqueur est neutre; si elie était encore acide, on devrait y ajouter de la chaux jusqu’a neutralisation parfaite.
3° On amène la liqueur neutre a 30 degrés de 1’aréomètre de Baumé, on la fait reposer et on lasoutire au moyen de siphons ou de robinets pour 1’introduire dans des poêles a évaporer, sem- blabïes a celles employees dans les raffineries de sel. La liqueur soumise è 1’évaporatioh laisse déposer le sulfate de soude au fond des poêles, d’oü on le retire au fur et è mesure de son dópót, pour Ie
DES ELEMENTS QUI COMPOSENT LÉ VERRE. 61
mettre sur des égouttoirs placés au-dessus même desdites poêles.
4» x,a dessiccation du sulfate de soude ainsi obtenu se fait soit dans un four a réverbère chauffe avec du coke, soit dans un four è. moufle chauffé avec de la houilïe, et dorit on peut employer la
chaleur perdue a chauffer les poêles a évaporer. .
La chaux, a Ia temperature & laquelle ón a porté 1’eaü de dis¬
solution (de 50 & 70 dégrés), précipite tout le fer au fond des cuviers, et on congoit que 1’opéralion du décantage doive être surveillée avec le plus grand soin; si toute Fopération n’est pas conduite par des ouvriers trés-soigneux, il arrive, par suite de leur négligence, qu’on obtient un sulfate de soude tout aussi impur qu’avant de subir 1’opération du raffinage. -
M. Pelouze dit que les sulfates, après leur purification, doivent êlreessayés, et qifon doitlivrer au commerce, pour la fabrication des verres ordinaires ou pour d’autres usages, ceux qui contien- nent encore plus de un a deux cent-millièmes de fer.
Nous ajouterons que sans doute cette proportion, au-dessous même de un a deux cent-millièmes de fer, exerce encore une in¬fluence, car M. Pelouze convient qu’il y a encore une supériorité appréciable de blancheur dans le verre fabriqué avec le carbonate de soude. On peut estimer de 3 francs A 3 fr. 50 c. par 100 kilo¬grammes le cout de la purification du sulfate de soude, en suppo-. sant le prix de la journée d’un ouvrier de 2 francs a 2 fr. 50 e, et 12 francs le prix de la tonne de houille.
Nous ferons remarquer ici que, si on veut obtenir un verre très-blanc, Pon doit proscrire Fusage de 1’anthracite pilé peur la decomposition du sulfate, attendu que ce charbon contient géné- ralement une assez notable proportion d’oxyde de fer.
L’économie qui résulte de la substitution du sulfate au carbo¬nate de soude n’est pas égale a la différence du prix entre ces deux matières premières, car il faut employer une plus grande propor¬tion de sulfate, qui sur 100 ne contient que 43,8 de soude, tandis que 100 de.carbonate contiennent 58,6 de soude. *
Le prix du sulfate de soude dans le commerce est de 12 a 14francs les 100 kilogrammes; ce prix nous paralt beaucoup trop élevé vu le prix du sulfate de soude en Angleterre, qui est de 10 francs, et en Belgique de 11 francs. .
On trouve aussi dans le commerce un sulfate de soude prove- nant de la décomposition du nitrate ou azotate de soude pour la
fabrication 4e Pacide azolique. Ce sel se vend 9 k '10 francs les 100 kilogrammes; mais ce sel, moins pur, contient génóra- lement un excès d’acide, et, en outre, une proportion notable d’oxyde de fer provenant de Ia préparation dans des chaudières en fonte. .
Enfin, qüoique lp chlorure de sodium np puisse pas êlro em¬ployé soula la fusion du verre, on a épróüvé qu’il pouvait entrer en assez grande proportion dans la composition des bouteilles, et comme le chlorure de sodium n’est exempt de droits que lorsqu’il est destiné a être decompose par les fabricants de sulfate et de car- bpnate de «oude, les fabricants de bouteilles ont obtenu de 1’Etat qu’onfit poureux un sel demi-décompósé, c’est-è-dire con tenant environ moitié sulfate, moitié chlorure de sodium, qui leur est livré ainsi a bien meilleur marché que Ie sulfate pur et s’emploib avec avanlage dans la fabrication des bouteilles.
ixiirate de soude, — II n’y a qu’un certain nombre d’années (trente a trente-cinq ans) que le nitrate de soude, produit naturel qui se trouve dans 1’Amérique du Sud, a été importé en Europe; ónlesubstitue, dans la plupart des usages, au nitre ou nitrate de potasse, et il coüte beaucoup moins cher. Les verriers Pemploient dans certaines compositions, comme produisant de 1’oxygène, pour brdler des malières charbonneuses, ou plus souvent encore pour raviver lescouleurs en main tenant 1’oxydation des métaux dans Ia fabrication du verre de couleur.
Les nitrates de soude raffinés se vendent environ 45 francs les 100 kilogrammes.
Le borate de soude 2BO3.NaO, ou borax du commerce, est une substance d’un grand usage dans les laboraloires pour les vitrifica¬tions d’essais, et la fusion des oxydes métalliques. On Pemploie aussi quelquefois dans les verreries pour certains verres de cou¬leur, ainsiqu’on le Yerra dans la suite de eet ouvrage. On a es- sayé aussi, dans ces dernières années, de Pemployer dans la fabrication du verre blanc; on a ainsi produit du verre très- blanc; mais, comme le prix de revient en est fort éievé, et que, d’aulre part, Pacide borique altère sensiblementlescreusets, on -peut dire que jusqu’a présent la production de ce verre iPa pas ; pris rang dans la pratique. ’
Le borax est fabrigué spécialement sur les liêux oü so produit ; naturelioment Pacide borique, particulièrement en Toscane. On h
DES ELEMENTS OEI COMPOSENT LE VERRE, 63
le tirail autrefois entièrempnt deTInde, Quand on veut employer le borax dansla vitrification, on le débarrasse préalablement par Ia chaleur de son eau de crislallisation, pour éviter Ia fusion aqueuse; dans cette opération, ilsê boursoufle et se réduit en une poussière blanphe. Le borate de sonde pp pept qu’augmenter la diaphanéité du verre, en raison de la tendance de 1’acide boriquè a former avec les diverses bases terreuses ou métalliques des ver- ros très-transparents, mais le prix dn borax et son action sur les creusels se sont jusqu'ici opposés, comme nous 1’avons dit, & son emploi en grand.
Le prix du borax est d’environ 175 francs les 100 kilogrammes.
Le sel marin, ou chlorure de sodium, n’est jamais employé seul dans la fabrication du verre, paree qu’il ne se combine pas directe- ment avec la silice, ou, du moins, quoique théoriquement le chlorure de sodium et la silice se combinent sous 1’influence de 1’eau, on n’a pas encore le nioyen pratique de faire cette opéra- tion en grand dans les creusels de verrerie. Quand il se trouve du chlorure de sodium dans la composition du verre, il est en partie vaporisé, en partie vient se mêler aux spls ou fiels de verre qui surnagent vers la fin de Topération, et une faible partie dé- composée se combine dans le verre.
J’ai ajouté quelquefois du chlorure de sodium è la composition du verre; je dirai en quelles cïrconstances, dans la suite de eet ou- vrage.
La potasse, KO, connue aüssi autrefois sous le nom d’alcali fixe végélal, est employée dans les verreries., daps divers états que nous allons successivement examiner.
Les eendres provenant de la combustion du bóis ou d’autres vé- gétaux sont quelquefois employees directement comme fondant dans quelques verreries a bouteilles placées dans des localités oü le1 bois est a bon marché. Ces eendres sont plus ou moins riches en potasse, suivant les végétaüx qüi les ont produites, le sol sur lequel ils out fait leur croissance et J’époque a laqueile ces végé- taux ont été coupés.
Parmi les bois, ceux qui donnent le plus de residu par 1’inciné- ralion, et dont on préfère généralemerit les eendres, sont les bois durs, Iels que Forme, le chêne, le bêtre, le charme; les bois blancs, les bois résineux donnent des eendres en moindre quantité et moins riches en alcali. .......
Nous donnerons ici un extrait d’un ouvrage du citoyen Perthuis, VArf de fabriquer le satin et la potasse, et d’un mémoire du mêmo auteur, ayant pour titre : Experiences sur les moyens de multiplier la fabrication de la potasse.
Rapportant au système decimal les résultats que Perthuis a énoncés et qui se trouventcompliquós des anciennes mesures, nous prendrons le chiffre de 10 000 kilogrammes pour poids de la quan¬tile de chaque vegetal sur lequel on a opéré et nous formerons ainsi la table suivante:
«I
'-\1
p.',d
j
\“U
Mows
des végólaux.
Chêne <*<*.
Menues branches de chêne prises en mai * *
Hêtre .
Menues branches de hêtre prises en mai * *. *
Charme********************** Menues branches de charme prises en mai* * * *
Bourgeons de charme el de hêtre cueillis dans le moment ou ils se developpaiept *. -
Orme *
Menues branches d’orme et de
ProUtats
en cendr<?3.
Produils on sc Is.
125,20
251,56
58,50
235,92
113,00
214,00
421,09
236,84
15,40
14,64
12,56
39,14
charrnille a la fin d’aout*, 675,00
Menues branches d’orme prises *
vertes a la fin de juilletj et sé-
chées ensuite aux Irois quarts.. 548,65
Sapin 54,00 3,32
Saule 284,92 29,00
Tremble * 115,50 7,55
Sarment de vigne 357^96 78,20
Feuilles de lilleul fraiches, déta-
chées en octobre * *.. 653,92
Genet commun, en avril. * * * 200
Tiges de maïs...; 886,40 176,58
Tiges de lournesol . * 572,20 200
Or tie commune, • * t • > 1071,68 250,56
Chardon en pleine fleur..... 408,27 47.28
Fougere verte, en juillet.... ■ * * • * 250
Fougere sfeche, en septembre. 500 62,60
De ses expériences Perthuis conclut:
1° Que le residu dëla combustion des arbres est d’environ 0,01 de leur poids primitif en moyenne;
2° Que les cendres des arbustes et branchages sont environ les 0,03 de leur poids;
3° Que les plantes donnent toujours, les unes dans les autres, plus de 0,05;
4® Que- les branches fournissent plus que les troncs, et les feuilles plus que les branches;
5® Que les plantes brüiées a leur point de maturilé produisent plus que les mêmes plantes brüiées avant ou après leur maturité;
6° Que les végétaux brülés verts produisent plus de cendres que brülés secs après avoir été pesés verts.
Que si la production des cendres des plantes aux bois est comme 5;1 en moyenne, celie en seis est comme 8x1, les cendres des plantes étant plus riches que celles des bois. Kirwan a fait sur le même sujet un travail dónt les résultats s’accordent assez bien avee ceux de Perthuis, car il trouve lesnombres suivants:
- Cendres. Quantité de sel Set pour J 00 de cendres.
Sur 10000 en poids de tiges de maïs 886 175 19,8
— grand soletl...... 572 20 54,9
— sarmeuts de vigne. 340 55 16,2
— saiile 280 28,5 7,8
— or me. ■■*.>* 255 . 59 10,2
— clïêne 135 15 11,4
— tremble 122 7,4 6,1
— hêtrc 58 12,7 21,9
— sapin 34 4,5 13,2
— fougere, en aoftt. 564 42,5 11,6
Nous n'entrerons pas ici dans le détail des instructions relatives a la meilleure manière de brüler les bois et végétaux pour en re- cueillir les meilleures cendres; car, pour le verrier qui emploie ses propres cendres quand il se sert de bois, le principal but est de brüler son bois de manière è produire la plus haute temperature avec la moindre quantité de combustible.
,Si c’est uu verrier en bouteilles, il peut employer ces cendres en nature dans la composition de son verre, après toutefois les avoir calcinées forternent et assez longtemps, afin d’achever dé brüler le reste de charbon qui se trouve mélangé, dans les. arches du four de fusion destinées ü eet usage, d’oü. leur est venu le nom d arches cendrières. Ensuite on les tamise pour séparer les petites
pierres, les ordures et même les eharbons qui n’auraient pas été brulés, et malgré tout il faudra encore fritter la composition qui aura été faite avee ces cendres.
Les fabricants de bouteilles dans le voisinage des grandes villes emploient ou plutöt employaient les charrées, c’est-è-dire les cen-dres ayant servi aux bïanehisseurs pour leurs lessives. Ces char- rées naturellement no sont pas très-riches en alcaii, mais elles ai- dent encore toutefois beaucoup a la vitrification; de jour en jour lesJ cliarrées tendent a disparaltre, depuis que le blanchissage est sorti de son ancie'nne routine et emploie directement et sans mélange de malières impures les seis qui, dans les cendres, agis- saient seuls utilement.
Salins. — Si J’on veut employer les cendres pour la fabrica¬tion d’un verre blanc, il faut les lessi ver, évaporer ensuite les eaux salurées au maximum, et obtenir ainsi les seis qui, dans les pays oü 1’on fait cette operation, sont connus sous le nom de salins. ' ' .
Tout le monde connait la manière de conduire une pareille opéralion, aussi je cruis inutile de la décrire ici.
Le salin du commerce, dans les pays oü le bois est abondant, est ordinairement d’un brun assez foncé. Les parlies les plus chauffées sont d’un jaune plus ctair; il faut le conserver dans des lieux secs pour éviter qu’il ne se fonde. On peut reconnaitre sa richesse en alcaii par les procédés d’épreuves ordinaires; mais la plupart des verriers se contentent de le juger par 1’apparence, ou quelquefois en faisant chauffer au rouge un öchantillon ; quand il est devenu d’un blanc mêlé de veines bleues ou verdatres claires, qu’il nes’est point étalé sur le têt a rötir, mais qu’il s’est boursouflé en devenant friable, alors on le juge de bonne qualitó.
Quelques verriers emploient le salin en nature dans leur com-position, s’ils ont 1’habitude de fritter cette composition. L’opéra- lion du frittage achève de détruire les parties organiques qui exis-tent encore, et produit le même effet que la calcination è 1’aide de laquelle on transforme le salin en. potasse, Cette dernière trans-formation toutefois est bien preferable, car le salin qu’on trans-forme en potasse varie beaucoup dans les résultals qu’il produit et perd de 8 a 25 pour 100 de son poids par la calcination, et, par conséquent, 100 de salin peuvent représenter 75 ou 92 de po¬tasse. Ce n’esl pas, d’ailleurs, le seul inconvénient que présentent
Jes salins, ils contiennent non-seulement des malie res combusti-bles, mais des sels impropres a la vitrification et nuisibles consé- quemment a la qualité du verre. (
Le mieux est done de calciner les salins; cette opération de la calcination du salin se fait dans un four a réverbèro dont la tem- pérature ne doit pas être très-élevëe au commencement de 1’opé- ration, pour éviter une fusion aqueuse qui serait très-nuisible. On augmente le feu a mesure qu’on voit que Ie salin se sèche, et on continue en remuant de temps en temps avec un rable en fer, iusqü’ace quon voie que les pelits morceaux qu’on retire et que 1’on briso sont homogènes ét de Ia même couleur blanche veiuée a Fintérieür qu’ü 1’extórieur. Alors on retire Ia fournée dans des caisses en töle ou des chaudières en fonte, et 1’on obtient ainsi une polasse semblable aux potasses de Russie, de Dantzig, de Toscane, etc. Cette potasse est un compose de carbonate et de sul¬fate de potasse (en ne mentionnant que les deux élémenls princi- paux), et il convient encore de séparer ces deux seis, car le sulfate de polasse n’est que nuisible a la vitrification, fl ne se combine pas avec la silice, surnage sur les pots, d’oü il faut 1’enlever avec des poebes en fer, s’il est très-abondant, ou le faire évaporer, ce qui retarde 1’opération. II est d’aulant plus avantageüx de faire ce depart des deux seis, que le sulfate de potasse, qui ne concóurt pas a la vitrification, se vend a un prix assez élevé aux fabriques d’alun.
Pour séparer le sulfate du carbonate, on dissout le produit,de la calcination dans 1’eau, de manière a obtenir des eaux concen- trées a un dogré oü déja une partie du sulfate et les impuretés se deposent au fond des cuviers, et on transvase par decantation les eaux claires concentrées dans des chaudières posées sur foyer, oü, par 1c fait de la différence de solubilitó des sulfates et des carbonates, ces sulfates se précipitent au fond des chaudières oü on les regoit dans des poêles en fer. Quand il ne se précipite plus de sulfate, on évapore a siccitó, ét on obtient ainsi un carbonate de potasse CO2.K0, très-propre a la fabrication des plus beaux verres blancs et des cristaux.
Les potasses de Russie, de Dantzig, de Toscane sont des salins calcines comme nous 1’avons dit précédémment; celles de Dantzig viennent de la Pologne, d’oü elles sont expédiées pour être em- barquées. .
68 IIVRE I. — GHAfITHE H,
Les potasses de Dantzig, première qualité, contiennont en moyenne;
Pofasse 60
Acide carbonique.. 23
Sulfate de pofasse 9
Matières terreuses. 2
Eau et perte 6
100
On voit par Ia qu’une partie de Ia potasse est a 1’état libre, non
combinée avec 1’acide carbonique, puisque les proportions du car-
*
bonate sont 68,2 de potasse sur 31,8 d’acide.
Les potasses d’Amérique sont les plus généralement estimées;
elles sont de deux genres, la potasse causlique, rouge ou grise, et la potasse perlasse. Nous avons traduit par potasse et perlasse les mots pof ashes et pearl ashes, dont la traduction serait : Cendres passées a la cbaudière et cendres perlées.
Les unes et les autres sont le résultat de salins produits par le défrichement et la combustion des forêls de PAmérique du Nord. Pour les potasses, ces salins sont rendus caustiques par la chaux: elles contiennent done la potasse presque entièrement libre, et les perlasses sont le résultat de la calcination des salins, comme nous 1’avons indiqué précédemment et ainsi que ceia se faitenRussic et en Pologne.
Én Anglelerre, les venders achètent généralement leurs potasses a des fabricants de produits chimiques, qui les leur livrent a 1’état de carbonate de potasse sec et pur.
En France, oü les verriers achètent directement les potasses ou perlasses d’Amérique, nous dirons quelques mots de la manière dont ils les traitent, Pour les perlasses, ils séparent les sulfates comme nous 1’avons indiqué pour les salins calcines; pour les po-tasses caustiques, on les fait passer dan3 un foür a réverbère sem- blablo a celui oü 1’on calcine les salins, en y mêlant une assez forte proportion de braises de bois, dans les localités oü les ver¬riers se servent de ce combustible. II n’y a pas d’inconvénient a mëtlreun excédant de charbon, car eet excédant estbrülé, ou bien surnage sur les eaux des baquets oü 1’on fait dissoudre le produit de cette calcination.
On remue de temps en temps ces matières enfournées avec un
DES ÉLÉMENTS QÜI GOMPOSENT EE VERRE. 69
rable en fer, afin de bien les mêler, et de faire pénétrer 1’acide carbonique dans toutes les molecules de la potasse. Qnand tout le charbon est a peu pres brüló, on tire la fournée et on met le pro- duit dans des chaudières ou baquets pleins d’eau, en ayantsoin de n'en mettre que peu a Ja fois. Les charbons non brülés surna- gent, on les retire avec un écumoir. Les parties insolubles et ter- reuses se précipitent au fond, et les eaux claires sont traitées comrae nous 1’avons vu pour les eaux des salins calcinés et des perlasses.
Ajoutons ici que la fabrication du sucre de betterave et de Pal- cool, dans le Nord de la France, a donné naissance & la production d’une assez grande quantité de potasse provenant de la combus¬tion des résidus de ces üsines. Cette production ne peut suffire en- tièrement a notre consommation de potasse, mais toutefois ello est uri obstacle au renchérissement qui ne manquerait pas d’avoir lieu sur les potasses d’Amérique, ou les défrichements de forêts s’éloignent chaque jour davantage des cótes.
Les potasses d’Amérique valent, a Paris, environ 90 francs les •
*
100 kilogrammes;
Les perlasses, 110 è 120 francs;
Les potasses indigenes (de Valenciennes), 80 francs.
* I-
Cendres gravel ces. — On appelle cendres gravelées les cendres qui proviennent de la combustion dès lies de vins. Pour bruter ces lies, on exprime d’abord Phumidité qu’elles contiennent, on les réduit en plaques semblables a des tuiles et on les fait sécher; dans eet état on les brille dans des fourneaux faits exprès. Le re¬sidu de cetle combustion est ce qu’on appelle cendres gravelées, qui contiennent do la potasse caustique, du carbonate et du tartrate de potasse et des matières organiques.
Les cendres gravelées ótaient autrefois très-estïmées des ver- riers ; les anciens auteurs les mentionnent souvent, surtout pour la fabrication de certains verres de couleur. Comme l’effet qü’elles produisaientrésultait en partie des matières'charbonneuses qu’elles contenaient encore, et surtout de 1’acide tartrique, nous préférons aujourd’hui employer le tartrate de potasse, dont nous ne croyons pas devoir décrire la fabrication, qui est du domaine des fabricants de produits chimiques, et que le vérrier aurait tort de vouloir préparer lui-même, surtout en raison de la petite quantité qu’il est dans le cas d’employer.
Le nitrate de potasse ou azotate de potasse KO.NO8, com posé d’acide nitrique ou azotique 57,15, potasse 42,85, est appoló aussi nitre, sel de nitre ou salpêtre raffiné.
Ce sel est un des plus usités dans la fabrication des beaux verres; ilótait connu des anciens auteurs, qui le considéraient corame Ie fondant du verre par excellence; il est vrai qu’ils ont souvent con- fondu (et les commentateurs ou (raducteurs plus souvent encore) le nitre avecle natriim ou natron, ces substances étant toutes deux produites par la nature en Egypte et dans 1’Inde. Ce que nous pouvons considérer comrae certain, c’est que les anciens verriers de Phénicie et d’Egypte ne confondaient certainement pas ces deux seis, dont Pernploi est si différent.
Le nitrate de potasse agit dans la vitrification, comrae nous 1’avons dit pour le nitrate de soude, et par la potasse qui s’unit 5 la silice, et par 1’oxygène qui, a cetle temperature, se sépare de 1’azole et serl soit a bruler les matières cliarbonneuses qui peuvent se trouver dans la composition, soit a suroxyder les oxydes métal- liques qui ont besoin de l’étre; aussi le nitre est-il le plus souvent employé dans la fabrication des cristaux et de certains verres de couleur dans lesquels la soude ne peut pas sans inconvénients être substituée a la potasse.
Comrne les verriers ne préparent jamais eux-mêmes leur nitre, nous n’entrerons pas ici dans les détails relatifs a la récolte des salpêtres naturels, a la fabrication des salpêtres et a leur raffinage.
Le salpêtre raffiné vaut généralement environ 60 a 65 francs les 100 kilogrammes.
En terminant les généralités que nous voulions exposer sur la soude et la potasse, il convient peut-être de dire quelques mots sur le pouvoir relatif de ces deux bases, qui seront une réponse a cette question : Peut-on indifféremment employer 1’une ou Tautre sui- vant que les conditions du marchó sont plus favorables a 1’une ou a 1’autre ?
■ *
Rappelons d’abord la composition des seis employés le plus communémenl:
.fe..
- Acide.. Base, - .. ‘
Sulfate de soude 56,20 43^80
Carbonate de soude 41*40 58*60 -Sa
Nitrate de soude...: 68,96 31,04 Ï-T
&
Sulfate de potasse. 45,90 54,10
Carbonate de potasse. 51,80 68,20 t-
■ A&d
Nitrate de potasse. 57;i5 42,85
-as
- ' ■ - F
• «
«1
II résulte de cette table que pour introduire dans le verre 100 de base, il faut y raettre :
288 de sulfate de soude»
170 de carbonate de soude.
322 de nitrate de sonde.
183 de sulfate de potasse.
147 de carbonate de potasse. .
233 de nitrate de potasse.
Tous ces seis étant supposes secs.
Tels sontles éléments du caleul A faire, mais il y a d’autres con-siderations dont on doit tenir cómpte:
1° Le sulfate de soude, ainsi que nous 1’avons fait observer, ne donne jamais du verre aussi Wane que le carbonate de soude;
2° Le carbonate.,de soude lui-même le plus pur ne donne pas du verre dJun blanc aussi beau que le carbonate de polasse. II y a toujours une légere teinte azurée qui ne se remarque pas, par example, dans l’épaisseur dune belle glace, mais sur sa tranche, pour peu qu’on regarde a travers une lame de quelques centime^ tres. Les fabricants de cristaux preferent done toujours Pemploi de la potasse A celui de la soude, et les fabricants de gobeletterie
fine de Bohème continuent, par la même raison, A employer Ja
• _ ■
potasse pour la fabrication de leur beau verre blanc, qui peut Ótre compare au cristal de roche. -
3° Dans des conditions semblables de fusibililé, la potasse produit un verre plus dur, moins souple que la soude. Les fabri¬cants de verre A vitre préféreront done toujours employer la soude, quand même ils seraient plaeés de manière a avoir de la potasse a très-bas prix, paree que leursfnane/mns s’allongent plus facilement. Cette plus grande dureté du verre fondu a la potasse est aussi un inconvenient dans la fabrication de la gobeletterie, dont nous re- parlerons au chapitre de la gobeletterie de Bohème.
Chanx, CÖO. — La chaux et la silice, seules ne se vitrifient pas au feu ordinaire des fours de verrerie; mais quand a ces deux sub¬stances on ajoute la soude ou Ia potasse, la vitrification de la chaux s’opère alors avec la plus grande facilité.
Le vender a tout avantage a employer la ch’aux dans aes com-positions ; elle rend le verre moins déliquescent, elle lui donne aussi une bien plus grande dimtilité. Le verre compose de silice
Si
/- -i=i ■
72
LIVKE I.—• CHAPITIlE II.
et de soude, ou de silice et de potasse seules, est cassant, aigre, et il devient beaucoup plus doux par Faddition de la chaux. Eu termes de verrerie, la chaux donne du corps au verre, c’est-a- dire que les verriers le travaillent plus facilement. La chaux
partage celte propriété de donner plus de corps au verre, avec
■ *
plusieurs autres bases terreuses, telles que 1’alumme, la magné- sie; aussi les maitres de verrerie qui avaient été habitués a ena-
‘ ployer pour la composition de leurs verres les seules matières qui existassent dans le commerce, telles que les soudes d’Alicanle, les natrons, les saïins, et qui employaient ces matières dans 1’état ou ils les achetaient, lorsqu’ils vöulurent essayer il y a trente a quarante ans les seis épurés, tels que la nouvelle chimie les leur ofïrait, se récrièrent d’abord sur la mauvaise qualité du verre qu’ils obtenaient avec ces matières raffinées: « Le verre se souffle mal, disaient-ils, il est aigre; les manchons (quand il s’agissait des verres a vitre) ne peuvent pas s’allonger. Ce verre se recuit mal, est dur a couper au diamant; enfin ce verre a le grave inconvenient de ressuer, de se couvrir d’humidité. » II ne s’agissait pourtant que d’ajouter au mélange les matières ter reuses, et principalement la chaux qui était contenue dans les soudes brutes, et qui donnait au verre les qualités désiróes. Maïs, tout en avouant d’abord que la plupart des maitres de verrerie avaient fort peu de connaissances chimiques, et étaient guidés sur- tout par la routine, nous devons dire aussi qu’en verrerie les essais sont coüleux, etil s’agissait Ia d’une sorte de transformation com¬plete des compositions. En Angleterre, oh jusqu’en 1832 on fa- briquait les vilres exclusivement en plateaux ronds, 1’emploi des soudes brutes (kelp) se perpélua plus longtemps encore. On com- prendra mieux, quand nous aurons décrit cette fabrication, com- bien il faut que le verre soit ductile, pour que 1’ouverture d’une espèce de boule, qui a quelques centimètres de diamètre, se dé- veloppe jusqu’a. atleindre lm,50 environ; aussi ai-je entendu dire a cette époque a un fabricant anglais : Il sera a tout jamais impos¬sible d’ouvrir un plateau avec du verre fabriqué avec le sulfate de soude. Nous ajouterons qu’un motif plus grave encore s’opposait aussi dans ce pays a ^adoption d’une nouvelle composition : le verre a vitro, en Ahglelerre, était sujet a un droit d’excfse très- élèvé (90 centimes par 450 grammes, soit environ 10 francs par metre carré, plusieurs fois la valeqxdu verre), droit qui était pergu
d’après lo jaugeage des creusets, quel qu’enfüt Ie produit. Un ver-der ne se risquait done guère è faire des essais qui 1’eussent amené a payer un droit de plusieurs milliers de francs sur une mauvaise fabrication, ou mêmesur 1’absence totale de production.
La chaux rend done au verre fabriqué avec les sulfates ou car-bonates purs les qualités qu’il tenait des matières précédemment employees et qui contenaiént des matières terreuses, chaux, alu- mine, magnésie.
La chaux, employée en proportion convenable, óte au verre Ia tendance a attirer 1’humidité de fair, tendance résultant de Tal - caïi libre, soude ou potasse, qui s’empare de Peau atmosphérique. Comment expliquer cette neut^ralisation de la soude ou potasse par la chaux? Comment le verre compose de silice et de soude seulé- ment et avec Ie minimum de soude, c’est-è-dire le plus dur pos¬sible eu égard a la température du four, verre dans lequél il doit ou devrait y avoir le minimum de soude librej est-il cependant plus hydroscopique que le verre dans lequel, aux mêmes óléments de silice et de soude, on aura ajouté une certaine proportion de chaux? Nous hasardons a eet égard Texplication suivante : je suis porto è admettre que la chaux agit directement sur une portion d’alcalique Ia chaux agit comme acide, qu’il se forme un calciate desoude et un silicate de soude, ou, si Ton veut, un siiico-calciate de soude. C’est très-humblement que j’avance cette explication, hasée d’ailleurs sur le fait de Taction de la chaux sur* la soude et la potasse, ou réciproquement; celaest bien établi par les essais" duchimiste allemand Polt et consigne dans sa Litkogêognésie. On voil, dans la table de ses essais, que la craie seule, exposée a une température ólevée dans un creuset, ne fond pas; que la craie et
la silice, exposées a la mêmo température, ne se fondent pas non plus; que trois parties de craie et une de selalcali ne fondent pas, deux parties de craie et une de sel alcali commencent a former un corps opaque aggloméré, une partie de craie et une partie d’alcali torment une masse transparente jaünatfe, enfin une partie de craie et deux parties d’alcali forment un vérre transparent jaüne verdêtre assez dur. Ne résulte-t-il pas de ces essais quê Ia craie, on pour mieux dire la chaux mélangée avec une certaine propor¬tion d’alcali, a une température élevée, fond en un verre? et si la vitrification de la silice et de la soude, a la même température, est un sel, pourquoila vitrification de la chaux et de la soude ne
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74
LTVHE I.—CMAPITKE 11.
serait-elle pas aussi un-sel ? La formation de co sol n’cxpliquerait- ello pas fabsorption de Falcaii libre des verres purement alca- lins ?
D’autre part, on pourrait dire aussi que la chaux, vis-a-vis de la silice et de falcaii, joue un role catalytique, c’est-a-dire que sa pré - sence éveillerait entre ces deux corps un jeu plus puissant d’affi- nité qui rendrait la silice capable de neutraliser une plus forte proportion d'alcali. Quelle que soit, du resle, la veritable explica¬tion, le fait pratique est hors de doute : la chaux agit directement sur falcaii a la température des fours de verrerie.
Si la chaux exerce une action salutaire dans la composition du verre, il est toutefois une proportion qu’il ne faut pas dópasser sous peine de tomber dans d’autres inconvénients; si on force le dosage de la chaüx, le verre perd sa transparence et il prend une tendance a se devitrifier, surlout s’il n’est pas maintenu a. une température très-élevée. Ainsi, par exemple, le refroidissement simple, resultant du travail du soufflage, amene un commence¬ment de devitrification avant même que la piece soit terminée. G’estun effet donl nous aurons occasion de reparler dans la suite de 1’ouvrage.
Il est important, surtout pour la fabrication des verres blancs, d’employer la chaux dans un assez grand état de pureté, exempte surlout d’oxyde de fer qui donnerait au verre une teinte verdatre. On trouva dans la nature des pierres & chaux assez exemptes de ‘fer; le verrier ne les emploie pas dans eet état, car il lui faudrait opérer le broyage de ces pierres qui sont très-dures, ce qui serait très-dispendieux; on cuit done ces pierres, ce carbonate, pour les ramener è 1’état de chaux caustique, que fon fait éteindre avec seulenient la petite quantité d’eau nécessaire pour 1’amener a 1'état de poudre, et on 1’ajoute en eet état dans la composition du verre.
D’autres verriers, qui ont a proximité de la craie pure, qui est facile a réduire en poudre, 1’emploient a eet état de craie sans lui . faire subir fopération de la cuisson. II en est qui pensent que puisque la chaux seule agit dans le mélange, il est mieux defy introduire pure, et non combinée avec 1’acide carbonique, puis- qu’il faudra que eet acide carbonique soit chassé du mélange par la chaleur .du four. Ces verriers préfèrenl done femploi de la chaux caustique. Pour moi, je prófère 1’emploi de la craie, quand
W cede craie est aussi pure, par example, que la eraie de Meudon; Iffi plusieurs motifs me font préférer cet emploi:
H 1° L’usage de la ohaux caustique, qu’il faut d’abord tamiser avant de 1’inlroduire dans le mélange, lequel mélange doit encore ? ètre remué ou a la pelle ou dans tine machine spéciale, produit une poussière très-subtile nuisible aux ouvriers, et qui, d’ailleurs, S altère un pcu la proportion du melange.
H 2° ba chaux s’éteint au moyen de 1’eau qu’elle absorbe en plus H ou moins grande quantile, et comrae elle resle susceptible- d’en f|| absorber suivant les changements de Pétat hygromélrique de Pair, H vous ne pouvez être stir de la proportion exacte de chaux que fS vous ajoutez a la composition. Ceci n’a pas une grande impor- f| lance pour les verres ordinaircs, dans lesquels quelques centiènaés || de ebaux en plus ou en moins ne peuvent altérer les résultats; B mais pour des verres d’optique, oü il s’agit d’avoir des pouvoirs |§ réfraclif et dispersif constants, il est important de ne pas avoir la moindre variation dans les principes constituants. Nous verrons dans Ie Iivre VI, Verves cVoptique, combien les moindres chan¬gements peuvent avoir tf’influence sur le résultat.
■
3° Bien queFacide carbonique Centre.pas dans la composition du verre, je pense que sa presence dans Pintérieur du creuset ne peut qu’avoir un résultat utile, celui d’agiter Ie mélange, de le brasser en quelque sorte, d’amener une action plus intime des elements les uns sur les autres et de produire un tout,plus ho- mogène.
Toutefois, quand ie verrier n’aura pas è proximité une eraie bien pure, je lui conseillerai d’employer la chaux en poudre pro- venant de pierres a chaux pures, plutót que de se procurer de la craio a grands frais.
La craie contient généralement des dépóts de silice sous forme de rognons de silex quïl est important de séparer avant Pemploi; d’abord iis rendentla craie plus difficile a broyer; puis, quelque soin que 1’on prit, il en resterait toujours des fragments plus gros que les grains du sable dont on se sert, qui résisteraient a la vitrification, et dont la présence dans le verre fondu est un défaut tres-grave, car ce point opaque détermine autour de lui, dans le refroidissement, de petites fentes qui souvent amènent- Ia brisure totale de la pièce de verre.
Les exlracteurs de la craio de Meudon la délayent dans 1’eau,
76
LIVRE I.
CHAPITRE II.
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les cailloux se prócipitent au fond; puis, quand 1’espèce de bouil- lie de craie a pris une certaine consistance, on en fait des pains que 1’on sèche sur des séchoirs a 1’air libre.
Ie marbre, qui est aussi un carbonate de chaux, n’est pas em- . ployé par les verriers, a cause de son prix, supérieur a celui des pierres a chaux ordinaires.
Phosphate de chaux. — Les fabricants de cristaux font usage du phosphate de chaux pour la composition des verres opales; ils seserventa eet effet d’os d’animaux brülés et piles qu’ils achèlent desfabrïques de noir anima! ou qu’ils préparent eux-mêmes. Ges os, calcinés a blanc, sont composes en très-grande partie de phos¬phate de chaux, d’une petite quantité de chlorure de sodium, de phosphate de soude et d’ammoniaque. Les anciens auteurs atta- chaient une grande importance a la nature des os qu’ils em- ployaient : ainsi ils recommandaient surtout la corne de cerf ou les os de mouton. Nous ne pensons pas que ces prescriptions soient juslifiées; seulement, ayant longtemps préparé moi-même les os que j’employais, je préfórais les gros os, surtout les os creux des jambes de cheval, qui brölaïent mieux et produisaient un phosphate plus blanc que les os menus ou plats, qui produisaient une cendre grise, quoique portés au même degré de température.
Le cristal opale, produit par 1’addition du phosphate de chaux des os, n’est pas opale directement, e’est-a-dire que lorsqu’on le cueille, il est transparent; ce n’est qu’en refroidissant qu’il devient opalin, et a chacun des réchauffages successifs, nócessilés par la confection d'une piece de cristal, l’opalisation augmente; il faut done calculer la proportion d’os suivant les pièces que 1’on a & fabriquer, en mettre davantage pour les pièces d’une fabrication rapide, pour celles, par exemple, qui ne subissent qu’un moulage, ét en mettre moins pour les pièces compliquées- L’opalisation produite par les os est tout è fait différente de 1’opacité produite pa'r 1’acide arsénieux ou par 1’acide stannique; ces derniers pro- duisent un blanc mat plus ou moins opaque, tandis que les os produisènt une opalisation avec reflets plus ou moins compara¬bles a ceüx de la pierre fine du nom d’opale. Cette opalisation n’est autre chose qu’un précipité de chaux qui s’opère a mesure que le verre se refroidit. Nous ne saurions préciser le rölè que joue 1’acide phosphorique dans eet effet d’opalisation; probable- ment eet acide abandonne peu a peu la chaux pour s’unir a Tune
t des autres bases, è. mesure quo le verre se ï’efroidit; et c’est bien I" ■ le refroidissement qui produit Fopalisation, car les couches extó- * rieures sont les premières opalisées; et, en effet, si vous brisez la ? pièce qui n’a subi qu’un premier refroidissement, vous voyez sur la tranche de la fracture que 1’intérieur a encore toute sa transpa-
•>' rence et que Fextérieur seul a commence è être opaque. A mesure i done que 1’on réchauffe et refroidit, les couches intérieures s’opa- | lisent successivement. S’il y a beaucoup d’os dans la composition ou qu’on opère un grand nombre de réchauffages, Fopalisation
? devient de 1’opacitó semblable a celle produite par 1’acide arsé-
'■ nieux et Facide stannique; ce qui démontre bien que eet effet
d’opalisation, ce jeu de lumière résulte de ce que Ie verre n’est pas homogene, qu’il y a des parties transparentes et d’autres plus ou moins opaques. Ce précipité de chaux n’explique pas suffisam- rnent Fopalisation produite par le phosphate de chaux, car si, au
lieu de ce phosphate de chaux, on ajoute au mélange l’équivalent de chaux, on n’obtient pas le mème effet. -
n r"i
Nous devons mentionner ici le spatli fluor (fluatc de chaux ou plutöt fluorure de calcium] qui depuis quelque temps est employé dans la fabrication des verres blancs opaques, principalement pour les verres d’éclairage.
Aiumine, A/2O\ — L’alumine joue un grand róle dans Ia ver- rerie, puisqu’elle est 1’élóment principal de Fargile, avec laquelle on fait les fours et les creusets; sous ce rapport ce n’est pas ici qu’il y a lieu de 1’examiner. L’alumine se rencontre aussi dans I’analyse de tous les verres, mais ce n’est que rarement avec in¬tention qu’elle s’y trouve; c’est Ie résultat ou de 1’emploi de sub¬stances qui en contenaient, telles que des craies, ou des sables, ou des alcalis impurs, et de Faction de la composition sur la sub¬stance du ereuset.
II y a toutefois quelques cas oü. le verrier eroit utile d’ajouter une petite quantité d’alumine dans sa composition pour dönner une base de plus a son verre, ce qui ajoute a Feffet de la chaux et donne plus de corps au verre. C’est ce que nous verrons quand il sera question de la composition du Verre a vitré en plateau.
Dans la composition des bouteilles, il y a toujours une assez forte proportion d’alumine resultant de Fargile qu’on y ajoute; ön con- Qoit que cela fait de la composition a bon marché, car on n’est pas diflicile sur le choix de Fargile. Un peu de fer ne fonce pas par
78 LfVBE I- — CHAPITMS IL .
trop lateinte de Ia bouteille, et 1’argile, composée de silice, d’alu- mine et d’un peü de fer, se vitrifie pour ainsi dire sans addition d’autra fondant, bi en que Palumine pure et la silice pure ne puis- sent ensemble se vitrifier au feu de verrerie. Il n’y a dans la com-position des bouteilles qu’une limite è ^addition de la chaux et de Fargile, celle qui résulte de la dévitrifi cation qui s’opère pendant le travail même des bouteilles; on a beau maintenir le four aussi chaud que possible, le verre dans lequel on a forcé la dose de ces substances devient galeux peu de temps après le commencement du travail, qui ne peut plus se continuer.
Baryte, BoO. Sulfate de baryte, BaO.SO8: sa pesanteur spéci- fique est de 4,08; carbonate de baryte, BaO.CO2. — Le sulfate de baryte existe en assez grande quantité dans piusieurs localités; lo carbonate de baryte n’est pas aussi commun, et loutefois c’est le seul qui pourrait être utilement employé dans la fabrication du verre.
La silice se combinanl avec la baryte et produisant ün verre Irès- blanc, quelques fabricants onl employe cette dernière en la substi- tuant a une portion seulement do la soude ou de la potasse; mais nous feroiis observer qu’en raison de la composition du carbonate de baryte, il faut98 de carbonate de baryte pour équiValoir a 72 do sulfate de soude ou 54 de carbonate de soude; et comrne le car¬bonate de baryte ne se trouve guère dans la nature qu’assez im- pur, qu’il exige des procédés de purification assez coAteux, ily aura sans doute fort peu de localités oü il sera avantageux d’em- ployer d'assez grandes quantiles de baryte. Cette substance donne au verre une pesanteur spécifique très-considérable, et qui pour¬rait être utile pour dü verre d’optique, mais qui est désavanta- geuse pour desverresordinaires, qui ont a supporter des frais de transport plus élevés. Quant aux proportions de baryte qui pour- raient être utilement employees, nous engagerions les verriers a prendre en grande considération 1’observalion faite par M. Péligot
' dans les termessui van ts ;
«Il y a d’ailleurs une importante remarque & faire en ce qui concerne la fusibilile des silicates multiples. Si Von chauffe un melange de deux silicates qui pris séparément sont infusibles, on obtient un produit fusible, un verre. Je mets sous vos yeux une belle glace fabriquée è titre d’essai ét d’étude dans la glacerie de Saint-Gobain, avec un mélange dé sable, de chaux éteinte et de
DES ELEMENTS QUI COMPOSENT LE VERRE. 79
carbonate de baryte Soumise a Vanalysö, elle a donné la compo-sition suivante• •
Silice 46,50
Baryte 39,20
Ghaux. 44,30
400,00
clle provïent done d’un mélange ou d’une combination parfaite- ment fusible de deux silicates qui, étant pris separémént, auraient fourni des composes extrêmement réfractaires. Ces fails ont pour leverrier une grande signification; ils lui montrent la nécessité d’introduire plusieurs bases dans sa composition . »
Nous allons a présent passer a 1’examen des oxydes métalliques employés dans la fabrication du verre. Qüoique tous les oxydes métalliques soient susceplibles de se vitrifier, nous üvons cru devoir nous abstenir de mentionner ceux dont le verrier n’a pas encore reconnu Putilité pratique. Nous commencerons par 1’oxyde de plomb, celui dont 1’emploi est le plus considérable, et aussi le plus important, puisqu’il entre pour un tiers dans la composition du cristal.
Oxydes de plomb. — Protoxyde ou massicot, PóO; sesqui- oxydé ou minium, Pó O -|-PóO. Le minium estun composé de protoxyde et de peroxyde. .
Les fabricants de cristal préfèrent femploi du minium a celui du massicot, paree que, bien que Ia silice s’unisse a Poxyde de plomb A 1’ótat de protoxyde ou de massicot, comme ce massicot est facilement réductible, que les moindres parcelles de substances combustibles peuvent en ramener des portions a Pétat de mótal, que d’ailleurs ii peut se trouver aussi dans le massicot des por¬tions de plomb ayant échappé a 1’oxydation, il y a sureté plus grande è employer le minium, qui ne tarde pas dans le creuset a passer a 1’ótat de massicot, abandonnant une portion d’oxygéne qui peut brüler le peu de matières charbonneuses qui pourraient se trouver dans la composition, ét même oxyder le peu dé par¬celles de plomb qui auraient échappé a 1’oxydation.
80
L’oxydede plomb ajoutó A la silice et a la potasse dans les pro¬. portions ordinaires de 3 de silice, 2 de minium et 1 de carbonate de potasse, constitue le verre auquel on a réservé en France le nom de cristal, le flinl-glass des Anglais. Ce verre, ayant un pou- voir réfractif plus considerable que le verre silico-alcalin, est doué d’un plus grand éclat; c’est en cela qu’il est supérieur au
plus beau verre blane et au cristal de rocbe..
Le fabricant de cristal ayant a sa disposition de la silice et un carbonate de potasse très-purs, doit mettre tous ses soins a se pro¬curer aussi un oxyde de plomb bien pur : quel que soit le soin avec lequel 1’oxyde de plomb est préparé, le minium ne sera pas d’une qualité convenable si lejilomb contenaitdes métaux étrangers qui s’oxydent on partie avec le plomb.
Les plombs ordinaires du commerce contiennent souvent une proportion d’oxyde de cuivre, qui, quelque minime qu’elle soit, doit les faire rejeter de la fabrication du minium destine a la com-position du cristal, auquel eet oxyde de cuivre donne une teinte bleu verd&tre très-désagróable. Ils contiennent aussi parfois de Pargent, du fer, de farsenic, et quelquefois de I’étain si, dans la foute des saumons, on a introduit des vieux plombs avec soudures. Lors done qu’un fabricant de cristaux est salisfait de la qualité d’un minium, il doit engager le fabricant de ce minium a luifournir Une qualité constante, provenant du plomb de la même mine.
Les plombs d’Espagne, et surtout certaines marques, sont gé- néralement assez bons. Je ne citerai pas ces marques, car il arrive que dans les mines d’un même producteur, certain filon s’épuise, et le suivant a quelquefois des qualités differentes. Les plombs anglais sont généralemenl bons; je citerai surtout celui connu sous le nom de snail beach, qui est reconnu par les fabricants de cristaux comme donnanl le meilleur minium, fl. y a de bonnes qualités de plomb en Belgique. Certains plombs du Hartz sont aussi assez bons; il y en a qui contiennent une petite proportion de manganèse, qui sont recherchés par les fabricants de cristal qui, Femployant en petite proportion, obtiennent une très-lé- gère teinte rosée, qui par elle-même est agréable quand elle est a peine perceptible, et qui peut d’ailleurs détruire quelque autre teinte désagréable.
L’importance de la qualité de 1’oxyde de plomb est tefle pour le fabricant de cristal, que si sa production est considérable,
son intérèt sera tóujours de fabriquer son minium; c’est pourquoi je ne croirai pas m’éloigner de mon sujet en donuant quelqües détails sur cette fabrication.
La première oxydationdu plomb s’opère dans un four a rever- bère, dont la sole doit être faite avec lé plus grand soin, car le plomb, a 1’état liquide, s’introduit Irès-facilement entrejes inter¬stices des briques, et peut ainsi détruire Irès-rapidement cette sole. H J’engagerai le fabricant a faire des briques spéeiales, de Ia nature de celles avec lesquelles il conslruit les siéges des fours de fusion, a faire bröler ces briques avantde les employer, et a co uier entre ces briques un mortier compose simplement de raclures des memos briques dólayées. Les briques de cette sole doivent d’ailleurs être fagonnées en clef de voute, et être posées de manière a former une voute renversée dequelquescentimètres doflèche,7 è8 seulement, pour que le plomb foridu occupe une plus grande surface, et §! s’oxyde plus facilement.
Le four, dans la forme ci-contre (fig. 4 ), élant chauffé au rouge foncé, on y enfourne les saumons de plomb, environ C00 ki-logrammes en totalité.
Au bont d’un temps assez court, le plomb est fondu ct se recouvre d’une pel- licule poudreuse, que 1’on attire avec un long rabie en fer sur le devant du lour et que 1’on enlève, paree que dans cette sorle d’écume sont contenus des corps étrangers. et aussi desportionsde métalmoins fusibles que le plomb, en sorte que 1’enlèvement de
cette crasse est une sorte
do purification du plomb qu’on a employé. On a d’aillcurs la preuve de ce fait, en réunissant toutes les crasses resultant d’une suite d’opórations, et les convertissant ensuite en minium. Si on
essaye do les faire entrer dans la composition du cristal^ on ob- tiént unc coloration assez intense, lantöt verd&tre, lantöt vert bleuatre, indico certain de la presence de métaux étrangers.
Quatid celte crasse ést enlevée, on voitde nouveau la surface du bain se couvrir d’une couche d’oxyde; et alors un ouvrier doil presqüe constamment, avec Ie ringard enjfer, agiler légèrenient la surface, dé manière a écarler sur les bords les parties oxydóos, et a reriöuveler constamment la surface du centre pour mettrc le plomb en contact avec Fair. II est important de ne pas pousser la temperature a uu degré trop élevé, car alors on fondrait le massi¬cot, on produirait de Ia litharge qui renfermerait du plomb non oxydé. Les fabricants de minium ont observé que toutes les qua- lités de plomb n’exigentpas lemêmefeu ; en général les pfus purs s’oxydent le plus facilemenl a Ia plus basse temperature. Au bout de quatre a six lienres, on ne voit plus de plomb métallique au centre du four; mais toulefois, il y a encore une grande parlie du
plomb entralnée dans un grand état de division, mêlé avec 1’oxydc dója formé. Alors Fouvrier répand eet oxyde sur toute la sole du four avec son rable, et son travail consiste alors a tracer des sil- lons sur cette poudre, de manière a changer constamment les points de contact de Fair et de la matière a oxyder. L’opérationdoit être faité avec precaution, car si 1’ouvrier agite brusquement, il se forute une poussière subtile d'oxyde qui est en trainee par lc courant de la cheminée. ’
Aü bout de huit heures généraiement, on estime que le travail est aussi complet que possible, et avec des pelies en fer on retire la fournée, que 1’on met a refroidir dans des caisses en tóle ou des auges en pierre de composition, ce qui est preferable. Jamais, par cette première operation, tout Ie plomb n’est oxydé; il ne faut guère généralement compter que sur 70 pour 100 environ d’oxyde par céllë première opéfation; Quand eet oxyde est refroidi, en procédé au broyage, lavage el décantage. Je ne crois pas néces¬saire d’entrer ici dans les détails des appareils destinés è cette operation; qu’il suffise de dire que ce broyage se fait au moyen de meules placées au fond de cures rondes, et mises en mouve¬ment par un manége ou un moteur mécahique. La meule infé¬rieure est fixe ou dormante et cylindrique; elle occupe tout le fond de la cuve; la meule volante est échancrée a peu prés en forme de trèfle, de manière noii-seuiement a engrainer 1’oxyde,
mais aussi a lenir constamment agitée 1’eau de Ia cave. Ces cuves ont des trous percés a diverses hauteurs ét bouchós a-Vec des bondes en beis, que 1’on ouvre de mafiière a opéïer lé dé- cantage. Au fond de la cuve est une autre bonde, pór Iaqüélle s’écoulent les parties non oxydées, quand on a opéré lé décan- lage. Par cette opération on sépare le massicot, qui est la partie la plus légere, du plomb non oxydé qui roste au fond des vases sous forine de poudre grise qui est du plomb métallique mêié ó quelques parties de massicot qui y sout restées adhérerites. Le massicot est ensuite égoullé et est apte ó passer a 1’état de mi¬nium. Cette suroxydation doits’opérer a une température moins élevée que celle a laquelie a été próduite la première oxydation, el, a eet effet, certains fabricants mettent le massicot dans de petïtes caissetles en fer qu’ils enfournent dans le four a oxydér, quarid iis ont sorti la fournée de plomb oxydé. D’autres fabricants font cette opération dans un four spécial qu’ils appellant four a roïigi^ don I la sole est plate, et dans lequel on enfourne le massicot après avoir porté ce four a une cbaleur. rouge cerise’, mais qui dévient rouge-brun obscur par le fait de l’enfournemeitf du massicot, et on l’y laisse séjourner pendant deux fois vingMjuatre heures, on bouchanl le four et la cheminée pour quo la chaleür se riiain- tienne le plus longtemps possible, mais en le ramenant au boüt de vingt-quatre heures a la température du rouge-brun, a laquelie on ratnène le four au moyen d’un feu clair. Ce système a l’avan- tage de permettre d’opérer d’une manière continue dans ie pre¬mier four d’oxydation. Ce four a rougir a été avantageusemenfc remplacé par üne chambre pratiquée au-dess us du four a oxyder; dans laquelie on met les caissetles en tólé rémplies de massicot simplement égoutté : la chaleur communiquée par le four est süf- fisante pour dessécher d’abord, puis fougir le massicot, et ily a cela de remarquable, que, sansêtre oblige de remuer ce massicot pour renouveler les surfaces, l’oxydation pénètre tout aussi bieri dans les couches inférieures que dans les couches* supérieures* e’est a la température de 200 a 220 degrés que s’opère le rougis- sage : au-dessus de cette température, le minium, redevient massicot; au-dessous de 200 degrés, le massicot ne rougit pas
1 Dans celte operation du passage du prolpxyde de plomb a 1’état de minium, 1’eau dn broyage et du decant age pie semble jouer un röle; car quand on'défourne *e proloxyde melange avecles parcelles de piomb non oxydé, cc mélange est ver.*
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Ce travail se pour suit ainsi jour et nuit avec dos ouvriers so relayant de huit en huit heures; les plus grands soins, la plus grande propreté doivent ótre recommandés a ces ouvriers, et on devra même en avoir de suppléraentaires, de manièro a no pas laisser chaque ouvrier dans ï’atelier de minium plus de deux se- maines, apres lesquelles on 1’occupe au moins une semaine a d’autres travaux, ce qui est toujours facile dans une cristallerie oiiilyatantdesorlesdetravauxa.faire; on préserve ainsi les ou- vriers de coliques de plomb qu’ils éviteraient difficilemenl s'ils travaillaienfc sans interruption dans eet atelier.
Quand tous les saumons de plomb d’une même provenance ont passé au four a oxyder^ il faut arrêter son operation, ou au moins ne pas mélanger les oxydes qui proviennent d’une autre partie de plomb, et qui pourraient se trouver d’une qualilé différente. De cette manière, le fabricant qui aura fait des essais sur les premiers miniums provenus d’une partie, pourra poursuivre sa fabrication avec une continuité du même résullat, tant que cette partie durera.
Nousavons dit que par la première opération on obtenait en-viron 70 pour 100 d’oxyde de la quanlité de plomb enfournéc; les parties non oxydées restées au fond des baquets a decanter sont misesdecöté, et quand on en aunecertaine quanlité, on fait passer ces résidus a leur tour au four d’oxydation è. un feu un peu supé-rieur a celui employé pour la première oxydation du métal 5 on en met environ 600 a 800 kilogrammes dans le four, et on leremuo égalemeut pendant huit heures, puis on broie et décante comme on 1’a fait précédemmenl. On obtienl ainsi environ 70 pour 100 d’oxyde pur; mais je conseille fort de ne pas mêler le minium provenant de cette deuxième opération avec celui des premiers massicots: ce deuxième minium se Irouve mêló a des mélaux moins facilement oxydables que le plomb; le cuivre surtout s’y trouve en plus grande quantité que dans les premiers oxydes, si le plomb en contenait primitivement. Les cristaux fabriqués avec ce deuxième minium se trouvent done plus colorés. Ces miniums
datre foncé, tan dis qu’ayant passé au décantage, 1’oxyde preud une ieinle jaune clair : c’est saus (Joule alors de 1’oxyde hydraté qui, porlé a la température dc 220 degrés, devient le minium 011 sesquioxyde de plomb. Si cette température était suffisanle sans eau pour opérer ce rougissage, 1’oxyde qu’on retire du pre¬mier four devrail devenir rouge au moment oil il passe par les températures de 220 a 200 degrés.
peuveiit étre ven dus dans Ie commerce pour des fabricants de poteries; c’est celte consideration surtout qui doit engager le fa-bricant de cristaux a faire son minium, car on comprend que le fabricant ordinaire do minium ne prend pas cette precaution, et ineie ensemble tous les massicots qui proviennent d'un même plomb.
Les résidus provenant du fond des baquets & decanter de la seconde operation sont d’une qualité encore inférieure a celle des precedents. On peut encore, quand on en a une sufüsante quan- tité, les repasser au four a oxyder pour produire du minium de commerce; mais quant aux résidus suivants, je n’engagerai pas le fabricant it les remettre encore au four a oxyder, mais & les rcduire avec la première crasse en les faisant passer avec un mé¬lange de poussière de charbon dans un four a réverbère légere- -
ment incline, de sorte que le plomb coule en dehors dans un reservoir a mesure qu’il se revivifie.
On comprend, d’après ce que nous avons dit, qu’une analyse cbimique d’un minium ne peut êlre qu’un très-insuffisant indice do la qualité d’un minium, puisque les quantités de métaux étrangers qui peuvent rendre un minium impropre a la fabrication du cristal sont tellement minimes qu’elles échappent, pour ainsi dire, a 1’analyse. Quelques fabricants sont dans 1’usage de passer a un feu de mouffle de pctites plaques de faience recouvertes d’une légere couche du minium qu’ils veulenl essayer; ce mi¬nium produit un vernis jaune, dont la teinte indique assez bien 1’absence de cuivre, ou sa présence qui se manifeste par une faible nuance verdalre.
La couleur du minium est aussi un indice qui trompe rarement le fabricant. Le minium de bonne qualité est d’un rouge orange lics-vif; sila couleur en est un peu terne, s’il y a une tendance vers un rouge brique, il y a grande probabilitó que la qualité ne sera pas satisfaisante. Le fabricant qui en voit de beaucoup de soiies a 1’oeil assez exercé a eet égard, et se trompe rarement.
Le fabricant de minium ne devra pas manquer d’avoir pour cet atelier une comptabilité en nature bien établie. On doit constater les poids des enfournements, des défournements des premières crasses, des premiers massicots, des premiers résidus, etc.
La théorie indique que 100 de plomb en passant a 1’état de massicot absorbent 7,72 d’oxygène, et pèsent alors 107^7, et que,
pour passer a 1’êtat de sesquioxyde, il y a encore 2,6 d’oxygène absorbé; qu’enfin 100 de plomb doivent produire 110,3 de minium; mais on conceit que dans une opération en grand, il y a des pertes ïnévitables dans le four & oxyder, dans le broyage et decantage, séchage et roügissage. Si 1’atelier n’est pas conduit avec le plus grand soin, au lieu de trouver 110 de minium, on n’obtient que 100 ou même 95; on peut croire alors qü’iï y a eu des détourne- ments de plomb ou d’oxyde, tandis que la perte n’est provenue que d’une mauvaise manulention. Un atelier do fabrication de minium bien conduit doit dpnner environ 106 de minium pour 100 de plomb, de lelie sorte que 100 kilogrammes de minium ne reviennent pas a un prix beaucoup plus élevé que les 100 de plomb Je donne ce résultal coinme étant celui que j’ai obtenu.
Nous reviendrons naturellement (au livre V, du Cristal} aux détails de Teinploi du minium : il ne s’agit ici que de notions générales.
Nous n’avons pas parlé de la litharge, quoique autrefois elle ait élé employee assez généralement dans la fabrication des cris- taux, et qu’elle le soit encore dans quelques vorreries d’Angle- terre et d’Amérique. La litharge eotite moins que le minium, puisqu’elle provienl d’une opération qui a pour but dé séparer Pargent du plomb; et quand un plomb est parfaitement pur, nul doute que 1’usage de la litharge ne soit sans inconvenient; mais d’après ce que nous avons dit de la fabrication du minium, on congoit la préfórence accordée depuis longtemps au minium par les fabricants de eristaux.
Le minium vaut généralement 65 a 70 francs les 100 kilo-grammes.
Zinc.—L’oxyde de zinc Z?zO a, comme I’oxyde de plomb, la pro¬priety de ne donner aucune coloration au verre; celte propriété ótait connue depuis longtemps. Un fabricant habile, M. Maës, a fait passer cettê vérité dans le domaine de la pratique en fabri- quant un verre blanc dont les elements sont la silice, 1’acide bo- rique, 1’oxyde de zinc et la pptasse; c’est done un silicodiorate dé zihc et de pótasse. L’analyse de ce verre indique aussi une petite proportion de plomb, environ 0,04. Ce verre est d’une parfaite blancheur, très-limpide; mais il est tout a fait inférieur au cristal sous le rapport de 1’éclat, paree qu’en effet sa densité n’etaut que celle des verres ordinaires, environ 2,5, sa puissance réfrangible
DES ELEMENTS <?IH COMPOSENT LE VEBBE.
n’est pas aussi forte a beaucoup prés que colle du cristal. Ainsi, ce verre, comme usage ordinaire, n’est comparable qn’aux beaux verres blancs, et est inférieur au cristal. Quant a ses usages pour 1’oplique, il ne peut que suppléer le crown-glass, Nous en reparle- rons plus tard aux deux livres V et VL
C’est, du reste, a 1’usage de 1’optique que le zinc a été a peu pres bornó par co fabricant. La fabrication de la gobelctlerie au zinc a óléun essai en grand a la vérité, mais n’a pas eude suites pra¬tiques.
Oxydes «lcfer. Protoxyde de fer, F<-0; pero xyde, Fes-O\ — Le fer, qui se rencontre, en plus ou moins grande quantité dans pres- que tous les corps de la nature, est, en raison de cola, Tun des fléaux les plus fréquents du verrier. La couleur verd&lre qu’affec- Icut tant de sortes de verres est le résultat du fer qui existq dans les sables, la chaux ou les alcalis, combiné avec 1’effet des mo¬lières charbonneuses qui peuvent se trouver dans la composition memo après le frittage, ou qui proviennent du combustible jnèrne du 1'our de fusion.
Les sables sont raremeul exempts de fer, cc qui n’est pas un inconvenient quand il s’agit de fabriquer des bouteilles, puisque 1’on ne peut craindre dans celte fabrication la teinte que produit eet oxyde, qui, d’ailleurs, est un fondant trèsractif.
Blais il n’en est pas de inême quand il s’agit de verres blancs, méine du verre a vilre, pourlesquels ondoit cherclier a se procu¬rer les sables les plus purs.
La chaux aussi est assez raremeul exempts d*pxyde de fer; lo fer se rencontre plus ou moins abondammentdans les cendres des végétaux qui servent a fabriquer les seis de potasse; aussi n’est-ce que par une preparation très-soignée qu’on peut obtenir des car¬bonates de potasse assez purs; le plomb, qui est employ é è grandes doses pour la fabrication des cristaux, n’est pas non plus toujours exempt de fer ; c'est a ce métal autant qu’au cuivre que tous les plombs de France doivent Tiinpurele qui les fait exclure de la fa¬brication du minium pour les crislalieries.
Maisso rend-on bieri exactemeiit compte de 1’efïet de 1’oxydo de for dans Ia composition du verre ? Si vous ouvrez les différents
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auteurs qui en ont parló, tous vous diront que l’oxydo de fer pro - <tu.it dans Ie verre une teinte verdatre. Ce résultat n’est pas dou- ^eux; mais cette teiple verte elle-inême n’est-elle pas un offet.
-
com posé ? Je suis disposé a le croire par les rósultats que pro- düisent dans certains cas les doses d’oxyde de fer qu’on introduit dansle Verre. Nousverrons, lorsquenoüs traiterons des verres co- lorés, qu’il y a des circonstances oil1’oxyde de fer donne au verre une teinte bleue, et dans d’autres 1’oxyde de fer donne au verre une teinte jaune. Sans nul doute, dans ces deux casle fer se trouve a des degrés différents d’oxydation. Ainsi la couleur jaune a lieu quand le fer se trouve au maximum d’oxydalion, puisque cette couleur jaune se produït quand 1’oxyde de fer dans la composi¬tion se trouve en présence d’une certaine quantité de peroxyde de manganèse qui, a la temperature du four de verrérie, cède une partie de son oxygène è 1’oxyde de fer : tandis qu’au contraire la teinte bleue semblerait résulter du fer a un moindre degró d’oxydation, puisqu’elle se produit quand l’oxyde de fer se trouve seul mêló a une composition de verre blanc. La couleur jaune produite par 1’oxyde de fer au maximum d’oxydatión est bien prouvée par 1’aventurine dont la couleur jaune orange foncé est produite par J’oxyde de fer ayant absorbé 1’oxygène de l’oxyde de cuivre, réduit al’élément métallique et cristallisant. Nous ex- pliquerions alors la teinte verte comme le résultat combine de deux silicates composes, dont 1’un contiendrait 1’oxyde de fer au summum d’oxydation, et 1’autre le protoxyde. Dans cette produc¬tion du vert par 1’oxyde de fer, le jaune prédornine toujours, car loujours la couleur verte produite est d’un vert jaunatre. Je ne parle pas ici de la couleur rouge que produit 1’oxyde de fer dans les émaux, lefeu de verrerie est trop intense pour qu’on puissejamais y faire rósister la coloration en rouge par le fer. Nous verrons, quand nous parlerons de la peinture sur verre, liv. VII, comment, au moyen du fer, on peut se procurer les teintes rouge, orange, brune, qui, mêlées convenablement, produisent d’autres nuanees, et entre autres la couleur de chair.
L’oxyde de fer est employé, comme nous le verrons aux livres II et V, pour faire les verres des différentes teintes de vert, en faisant varier les proportions d’oxyde de cuivre qui donne la teinte bleue
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inclinant au vert, et d’oxyde de fer qui produit le vert jaune. Nous engagerons ici les verriers a no jamais se servir d’oxyde de fer provenant de la décömposition de la couperose verte ou sulfate do fer par la chaleur ; 1’oxyde rouge qui en résulle étant bien dé- canté est très-bon pour le travail du polissage des glacés, mais il
egt très-pernicieux dans la fusion dü verre, paree que, le sulfate n’étant pas entièrement décomposé par la chaleur, on sö trouve ainsi niettre dans Ie creuset du sulfate de fer, dont 1'acide sulfu- riques’unit a la soude ou a la potasse de la composition^ et forme uii bain de sel qui ne remonte pas assez franchement a la surface du verre, pour que la chaleur du four puisse le volatiliser et en dóbarrasser le verre, qui reste avec une apparence graisseuse, et
. est impropre au travail.
L’oxyde provenant des baltitures de fer est d’un très-bon em- ploi, mais ondevra toujours les faire passer, avant de les employer, dans un four & réverbère chauffé au rouge, paree que ces batli- tures se trouvent souvent mêlées a des parcelles charbonneuses. Il faut ensuite les piler et tamiser, car il est bien important aussi de ne pas introduire dans la composition des fragments de fer non oxydé qui tomberit dans le fond du creuset, et le percent en peu de jours. Cette action du fer sur le creuset est due sans doute a ce qu’il se forme un silicate d’alumine et de fer aux dépens de 1’alumine et de la silice du creuset, au lieu même oü. so trouve le fragment de fer.
Nous avons dit qu’il importait de passer au four a réverbère les battitures de fer pour brüler les matières charbonneuses qui s’y trouvent mêlées; en effet, le fer et le charbon, même en petites proportions, donnent au verre une teinte olive pourrie (la cou¬leur des bouteilles qu’on fabriquait autrefois, et dont la fritte n’était jamais entièrement purgée de matières charbonneuses). Si la proportion de ces deus éléments se trouve en plus grande quan-tile, le verre devient tout a fait noir ; ce que j’expliquerais par un élat de verre enfwnè, Le fer et le charbon étant tous deux avides d’oxygène, le charbon ne peut passer a 1’élatd’acide carbonique et se dégager, il se répand dans la masse du verre et le colore en noir.
Manganeses, Protoxyde de manganèse, Ma O; deutoxyde dé manganese, M?z3O4; peroxyde de manganèse, Ma O2. — Le man¬ganèse, appelé autrefois magnésie, est, dans Ia nomenclature ac- tuelle, très-distinct de la lerre qui porie ce nom. Les anciens met- taient ce minéral dans la classe des pierres d’aimant (magrnew), et a cause de cela attribuaient a des vertus magnétiques les effets de celle matière dans le verre. II est vrai, d’une part, que le manga¬nèse se trouve souvent mêlé a dés mineraux de fer magnétique, ot, d’autre part, lesQxydes de manganèse et do fer agïssent d’uno
maïiière tellement intime 1’un sur 1’autre, que sous ce rapport même le nom de magnes aurait été en quelque sorte justifié. Cette action de ces deux oxydes Hun sur 1’autre, dont le résultat est dë corriger la couleur produite parl’oxyde de ferquisetrouve dans presque toules les matières employees par Ie verrier, a fait de tout temps donner au manganese le nom de savon du verrier.
La couleur propre produite par 1’oxyde de manganese dans la composition du verre est le violet; et par cela seul on peut déja se rendre compte de quelle fagon il détruit Ia couleur jaune verd&tre produite par le fer. Le peroxyde de manganèse cédaut une portion de son oxygène quand ces deux oxydes se Irouvent en presence, la parlic bleue de la teinte verdatre se trouve détruite, il ne reste plus que la teinte jaunatre; d’autre part, la couleur violette produite par lp manganèse a 1’état de peroxyde se trouve atténuée par la perle d’une portion de son oxygène : il reste done en presence une légère teinte jaune et une légère teinte violette, dont la résultante est le blanc, car le jaune est la couleur complé¬mentaire du violet, qui est compose de rouge et de bleu. On peut prouver dailleurs ce résultat en appliquant unie feuille de verre
jaune sur une feuille de verre violet les objets regardés au tra¬vers de ces deux feu.il les superposées sont comme s’ils étaient vus au travers d’un verre blanc, mais seulement moins éclairés : voiei done le phénomène du blanchiment du verre par le manganèse expliqné par une experience d’optique, et de même que les objets vus au travers des deux feuilles ont été vus comme au travers d’un verre blanc, mais moins éclairés, de même les verres déco- lorés par Poxyde de manganèse sont-ils aussi d’un blanc plus ou moins sombre.
Cet efïet de 1’atlénuation ou de la destruction de la couleur vio-lette du peroxyde de manganèse par la présence du protoxyde de fer qui lui enlève uue portion de son oxygène, peut se produire aussi par Pintroduction de matières charbonneuses dans le verre coloró parle peroxyde de manganèse. Ces matières charbonneuses, en s’emparant d’une portion de Poxygène du peroxyde de man-ganèse, détruisent plus ou moins sa coloration violette, Cette pro- priété est misea profit par le verrier quand il s’aper^oit qu’il a outre-rpassé la dose de manganèse. Ainsi, par exemple, dansles yerreries de gobeletterie, on est généralement dans l’usage, lors- que le verre est fondu, d ’y introduire de 1’oxyde de manganèse pour
Jc blancbir; on appelle celawftre le verre en couleur. L’effet est plussör qu’en introduisant le manganèse dans la composition, paree que, s’il se trouve dans la composition des matières char¬bonneuses, elles détruisent l’effet du manganèse, qui peut d’ail- leurs se trouver détruit aussi par la fuméo du four de fusion, ou des parcelles de combustible lombant dans le creuset. (lette mise cn couleur s’opère done généralement lorsque le verre est fondu; on y met 1’oxyde de manganèse, soit en 1’introduisant jusqu’au fond du creuset dans une sorle d’éteignoir renversé en fer au boutd’un long manche en fer, soit en le mettant sur le dessus du verre, et brassantde suite le verro avee unespalule en fer. Quand 1’effervescence produite par ce brassage dit maclage est passée, on fait une montre pourvoir la couleur du verre. Si on a oulre-passé Ja dose nécessaire de manganèse, le verre se trouve d’une nuance violette trop foncée, et alors il suffit de plonger une perche è quelques reprises jusqu’au fond du creuset pour diminuer celte tointe trop forte : dans celte operation, la combustion presque iuslantanée du bois dela perche au moyen de 1’oxygène du man¬ganèse, ramène celui-ci a un degré moindre d’oxydation, et cor- rige Ia couleur.
Observons que nous avons dit : Si le verre se trouvait d’une 'nuance violette trop foncée, paree qu’en efïet il faut que le verre a eet état ait une teinte Iégèrement violette qui va en s’alténuant pendant le raffinage du verre, pendant le travail du soufflage, et surtout pendant la recuisson, car on peut remarquer que les ro- gnures du verre résultaut du travail sont d’une nuance plus vio¬lette que le verre sorli de la recuisson, operation pendant laquelle le manganèse parait perdre encore une portion de son oxygène. Ilrésulte naturellement de ce que nous avons énoncé que le ni-trate de potasse doit próduire un effet öpposó a celui des matières charbonneuses; aussi le ineilleur moyen de fixer la couleur vio¬lette du manganèse esl-il d’ajouter a la composition du nitrate de potasse ou de squde qui fpurnit au manganèse de 1’oxygène qu’il pourrait perdre en vertu d’aulres réactions. On peut démontrer, par une experience facile, les effets du manganèse dans le verre : si on fond au chalumeau sur un charbon un globule de verre ou un fragment de borax auquol on ajoute de 1’oxyde de manganèse, è l’instant rnême il devient violet, mais bientót après, Ie charbon qui le supporte le désoxyde. et la couleur redevient bfanche ; si
cusuitc on ajoute une petite parceile de nitre,, Ie verre repasse au violet, et ainsi de suite tant que 1’on veut continuer 1’expérience; ou bien encore, si 1’on fond ce globe vitreux au chalumeau sur un support incombustible, la pointe désoxydante de la flamme du chalumeau le rend blanc, et la flamme oxydante du méme cha-lumeau le fait repasser au violet. Ainsi il depend de celui qui souffle de donner alternativement et a volonté de la couleur au globule vitreux. Toute Ia théorie de la coloration du verre par le manganese est contenue dans cette jolie experience.
L’acide arsénieux, ou arsenic blanc, produit sur le manganese un eflet analogue a celui du charbon; cottime il tend a s’emparer de 1’oxygène pour passer a 1’état d’acide arséhique, on peut, et celaestpréférablea 1’emploi dela perche de bois, projeter quelques fragments d’acide arsénieux (dont 1’habitude du verrier lui fait apprécier la quantité) dans le verre fondu dont la teinte est trop violette. Cet acide étant plus pesant que le verre, tend è aller au fond, désoxyde le manganese et détruit en consequence une partie de sa coloration.
D’après ce qui précède, les effets produits par le manganese dépendent non-seulement de sa pureté, mais surtout de son degré d’oxydation. Les minerals de manganèse contiennent toujours de 1’oxyde de fer; ainsi, sous ;ce rapport, celui qui en contiendra le moins devra être préfóré. Voici, par exemple, [’analyse d’un oxyde de manganese que j’ai été dans le cas d’employer :
Oxyde rouge ou deutoxyde de manganese... 67,50
Oxygen e 9
Peroxyde de fer 2,50
Matieres insolubles 19,20
Eau 2
Oxyde de cuivre -. 0,15
99,95
Les matières indiquées comme insolubles étaient presque on totalité silice et alumine. Par la formule du deutoxyde de man-ganese Mzz3O% les 67,30 d’oxyde contiennent :
Oxygène 18,55
L’oxygfene en surplus est de ........ 9
Total de l’oxygène. 27,55
Si a ce manganèse j’avais eu a comparer un© autre sorte dont
1’analyse aurait indiqué un total pour cent de 22 d’oxygène, j’aurais accordé au premier une préférence dans la proportion de 27,55 a 22.
II ny a pas d’aütre opération a faire subir au minerai de man- ganèse avanfc de 1’employer que de le broyer et de le tamiser avec un tamis assez fin pour que les matières insolubles qu’il conlicnt, quartz ou autre, ne puissent pas se trouver en frag¬ments assez gros pour résister a la fusion par la combinaison avec les autres matières de la composition.
Les prix du manganese varient beaucoup suivant les localilés, de 20 a 40 francs les 100 kilogrammes^
Arscnie. Acide arsénieux, AP2O3; acide arsénique, Ar2O5. — L’arsenic blanc du commerce, qui est employé dans les verreries, est 1’acide arsénieux. Nous avons vu, a Partiele du Manganèse, qu’on s’en servait quelquefois pour neutraliser un excès de cou¬leur violette produite par ce dernier; on se sert aussi de 1’arsenic en raison de Paction mécanique qu’il exerce. Cette substance étant trés-volatile, les morceaux d’arsenic que 1’on introduit dans le verre fondu tombent au fond par le fait de leur pesanteur spécifique, font bouillonner la matièreet exercent ainsi une sorte de brassage mécanique, qui mélange les parties inférieures avec les parties supérieures, rend le tout homogène et facilite aussi le dégagement des autres gaz qui se trouvent dans la p&to du verre, Quand tel est le résultat que 1’on veut obtenir de 1’ar- senie, je pense qu’il vaut mieux Pemployer ainsi, en le projetant dans le creuset, quand la fusion est terminée, et au moment de 1’affinage, que de le mêler avec les autres matières dans la com¬position; car, dans ce dernier cas, 1’arsenic étant très-völatil, une grande partie de la quantité employée est déja volatilisée quand il s’agit d’opérer Pelïet qu’on en attend. Toutefois une
partie dans ce cas même est utilement employée, car il n’est pas douteux que 1’arsenie ne facilite Ia fusion et n’équivaille a une proportion notable d’alcali.
Quelquefois il arrive que 1’arsenic, introduit dans les mélanges, trouve a s’emparer d’oxygène aux dépens d’un des autres élé- ments et passe è Pétat d’acide qui est fixe et prodüit dans le verre des taches blanches opaques, qu’on peut faire disparaitre, si on s’en est aper<ju avant le travail du verre, en y introduisant une substance combustible, ense servant, par exemple, d’une perche, ainsi que noüs 1’avons indiqué pour le manganese. On pourrait aussi corriger ce défaut en ajoulaut du sulfure d'antimoine, qui désoxygénerait l’arsenic et le ferait redevenir volatil, il nö res- terait dans le verre qu’un peu do teinte jaunc produite par 1’anti- rnoine,
L’acide arsénieux, employé en forte proportion dans la compo-sition du verre, environ 3 pour 100 de la composition et avec le soin de mettre le nitrate de potasse parmiles éléments, produitun verre laiteux, uri veritable émail blanc, devenant d’autant plus opaque qu’on le fait refroidir et réchauöer un plus grand noinbre de fois. Dans Fétat de transparence, 1’acide arsénieux élait-il a
Fétat de base, c’ost-a-dire de silicate d’arsenic, ou bien s’unissait- il a 1’une des bases en formant un arséhite? Dans Fun et 1’aulfe cas, il parait que eet exces d’acide arsénieux se sépare ou de 1’a- cide ou de la baselors du refroidissement, et forme dans la masse ce nuage qui se traduit par de 1’opaeité.
Jusqu’a présent nous avons parlé des ólémenls qui se trouvent, soit aceiden tellement, soit intentionnellement, dans la fabrication des verres blancs; les oxydes mélalliques que nous alloiK passer en revue ne sont guère employés que dans la fabrication des verres de couleur.
Cuivrc. Oxyde rouge de cuivre, C?rO; oxyde noir, CaO. —■ L’oxyde de cuivre a, de tout temps, joué un grand role dans la coloration des verres. Les alchimistes lui ont surtout attribué une grande importance, et des qu’ils parvenaient a oblenir un oxyde rouge de cuivre, comme cet oxyde produisait un verre rouge, ils se regardaient déja comme possesseurs du principe dont 1’or est formé, paree que 1’or aussi colore le verre en rouge; de 1& tous les procédés secrets ou annoncés mystérieusement pour calciner le cuivre de manière a en oblenir un verre rouge. On en trouve un grand noinbre indiqués par Néri, et surtout son commenta- teur, Kunckel, puis ensuite par Haudiequer de Blancourt. Ge fait de la coloration du verre en rouge par l’oxyde de cuivre était connu bien antérieurement a cet auteur: nous en avons la preuve bien manifeste non-seulement dans les vitraux les plus anciens existant encore, ceux du douzième siècle, oil le verre irouge est colore par le cuivre, mais dans les mosaiques et certains verres antiquos cqlorés également en rouge par Foxyde de cuivre.
Nous savons aüjoürd’hui que cette couleur rouge, par le cuivre, ne peut être obtenue qu’autant que le mélal est mainlenu a 1’état de protoxyde. J
Ce protoxyde tend toujours è passer è. fétat de deuloxyde : on est done oblige d’introduire dans la composition des matières désóxygénantes pour mainlenir eet état de protoxyde, et naturel- letnenl 1’efïet voulu peut facilement être dépassé, et alors le cuivre, au lieu d’être mainlenu a Fétat de protoxyde, est ramené a fetal métalliqüo, et se précipite au fond du creuset. De la vient la difficult© de la fabrication du verre rouge dont nous repar- lerons en détail au chapitre des verres colorés du livre IL Nous remarquerons cependant encore ici que le verre coloré en rouge par 1’öxyde de cuivre n’a cette transparence rouge qu’au- lant qu’il est a l’état de lame extrêmement mince s en masse il est rouge opaque ; etce n’est done qu’en 1’employant a fétat de coucbe de moins d’un dixième de millimetre d’épaisseur qu’il produit cette belle couleur rouge transparent.
A fétat d’oxydc noir, ou deutoxyde, le cuivre produit dans le verre une couleur bleue qui ne peut être confondue aveela cou¬leur bleue resultant du cobalt dont nous parlerons lont a fheure : la couleur bleue du cuivre est moins intense d’une part, et,.d’autre part, elle est de la nature de bleu plus voisine du vert que du violet. Si, dans Ia composition qui doit donner le bleu produit par le cuivre, on introduit une substance opalisante, comme les os calcines, on obtient uue couleur pure de la plus belle turquoise ; mais il est è remarquer que, pour obtenir cette couleur bleue, il faut que la composition ne cohtienne aucune.mafière qui ne soit parfaitement exempte de fer, car la présence d’une quantilé tres¬mini me de fer ou les moindres parodies combustibles font de suite inclïner au vert la couleur bleue produile par le cuivre; aussi trouve-t-on très-souvent dans les livres que le cuivre donne uue couleur verte au verre. Le cuivre donue, il est vrai, une cou¬leur verte, mais moyennant qu’on y ajoute de foxyde de fer, et c’est ainsi, en effet, qu’en variant les proportions d’oxyde de fer et de cuivre, on produit toutes les teintes de vert, depuis le vert
bleüètre jusqu’au vert jaunatre.
Le cuivre est aussi 1’élément essentie! de la fabrication de 1’a-
ventürine artifi'ciellé que fantiqüité aVait su fabriquer, et que les Vénitiens onl produite avecunérare perfection, et au moyen age,
et jusqu’a nos jours. Le cuivre, dans Paventurine, est a 1’état mé- tallique cristallisé, ainsi qu’on le reconnalt facilement a Paide d’une simple loupe. Nous étudierons plus tard, au livre V, dans quelles circonstances eet effet so produit; remarquons seulemént ici que le fond de 1’aventurine est unc couleur jaune brun qui est le produit de l’oxyde de fer qui entre dans la composition de 1’aventurine, et qui, resté seul a 1’état d’oxyde, produit du jaune qui, combine avec les reflets rougeatres du cuivre a 1’état de métal naissant, donne cette couleur rouge-jaune a 1’aventurine.
En traitant des verres de couleur, nous parlerons de la prepa-ration des oxydes de cuivre, que le verrier fera bien d’opérer par lui-même pour la süreté de ses résultats.
Étaïu. Acide stannique ou métastannique, SfO2, appelé autre¬fois oxyde blanc d’étain. — L’étain est parfois employé dans la fabrication du verre rouge, ainsi que nous Ie verrons au livre II; on 1’emploie aussi pour la production du verre blanc opaque ou de Pémail blanc. L’acide stannique s’interposant entre les mole¬cules du verre sans se vitrifier lui-même, le rend blanc de lait.
Enfin l’étain est encore utilise dans la production de la potêe d'étain, qui est employée dans le polissage des cristaux taillés. Mais nous n’avons pas ici a nous étendre sur eet usage, pas plus qu’a parler de Pemploi de 1’élain pour 1’étamage des glacés, puisque nous ne mentionnons ici que les éléments constitutifs des différents verres.
Cobalt. Protoxyde. de cobalt, CoO; peroxyde, Co2O3. — L’oxyde de cobalt donne aux compositions vitreuses une tres-belle couleur bleue très-intense, très-solide au feu le plus violent. On en fait un grand usage dans la verrerie.
Avant que la chimie eüt fait connaitre le cobalt comme un métal sui generis, on savait toutefois employer Ie minerai qui Ie contient et qui se trouve toujours mélangé a du nickel et a du fer, mais alors on employait le cobalt a i’état de safre, ou de smalt, ou bleu d’azur.
Le safre est le produit du grillage du minerai de cobalt. C’est a eet état qu’il a été le plus anciennement employé, et cette ex-pression de safre a même donné lieu a des erreurs de traducteurs qui, par exemple, imaginèrent que I’abbé Suger, voulant ne rien épargner pour les vitraux de 1’abbaye de Saint-Denis, avait fait colorer des verres en bleu avec des saphirs. Ces traducteurs ne
savaient pas, bien entendu, ce qu’était le safre. On a plus tard employé lo smalt, ou bleu d’azur, qui était et est encore employé beaucoup dans les poteries. Ce bleu d’azur est simplement un verre coloré très-fortement par le safre, puis broyé et pi Ié, dé- canlé et séché en poudre; ce bleu'd’azur est d’un prix d’autant plus élevó que 1’intensité de la couleur est plus grande et que la poudre est plus ténué.
Mais le safre et les bleus d’azur qui en proviennent ne con- liennent jamais le cobalt qu’accompagné d’un peu de fer, et sur- tout de nickel, qui ótent au cobalt la pureté de son bleu; ce n’est qne depuis environ vingt a vingt-cinq ans qu’on a trouvé, en An- gleterre, un procédé pratique pour extraire le nickel, appelé en Angleterre argent allemand, du minerai de cobalt, et obtenir 1’oxyde de ce dernier è un état de pureté chimique qui le rend inflniment preferable au safre et au smalt pour 1’usage et des poteries et des verres fins.
Cet oxyde de cobalt se vend & présent environ 20-francs la livre anglaise de 450 grammes, prix élevé sans doute; mais sa puis¬sance colorante est plus intense que celle d’aucun autre oxyde, ainsi que nous le verrons par la suite.
Nickel. Oxyde de nickel, NfO. — L’oxyde de nickel donne au verre une teinle brune, quand il est chimiquement pur, mais, étant extrait du minerai de cobalt, il relient toujours une petite portion de cobalt qui modifie sa coloration, en sorte que Foxyde de nickel qu’on se procure dans le commerce donne au verre une teinte d’un violet brun. L’oxyde de nickel ne se vitrifie pas fa- cileraent, aussi n’a-t-il pas été jusqu’a présent d’un grand usage, On Fa employé récemment toutefois, mélangé avec de Foxyde de cuivre, pour produire une teinte neutre ou enfumée très-apte, quand elle est foncée, a êlre placée devant les oculaires pour observer le soieil, qui alors parait parfaitement blanc, et très- favorable quand elle est plus claire pour verres de lunettes pour les vues qui ne peuvent supporter la grande clarté du jour.
Quelques verriers d’Allemagne et de France se servent aussi du nickel en place du manganese pour corriger la teinte du verre blanc. Nous concevons en effet cet emploi; toutefois le violet que produit le nickel étant moins gai, plus brun que celui produit par Foxyde de manganese, ce derniei\-ilnpus semble, devrait être
fixe, plus stable. Il y a done lieu a une élude plus suivie de ses résultats, étude a laquelleje ne me suis pas livré.
Antimoine.—L’antimoine Tend peu de services dans la verrerie qüoiqü’il ait été placé dans beaucoup de recettes que nous ont données les auteurs qui ont écritsur la verrerie.
J’ai employé le sulfure d’antimoine et l’oxyde d’antiinoine de bien des manières, pour pouvoir apprécier les propriétés qui 1’ont fait próner, sans pouvoir arriver è des effets justifiant ces éloges. Le résullat de mes recherches a été, qu’a petites doses Poxyde ni le sulfure ne produisent aucun effet appréciable; qu’a forte dose l’antimoine colore plus ou moins les verres en jaune, jamais d’un jaune assez franc, assez éclatant pour être employé comme Vitre jaune; que, de plus, il agit comme corps désoxydant, snrtout si on Pemploie a Petal de sulfure. Cesulfure peut aussi servir a agiter la masse du verre fondu, par la volatilisation du soufre qu’il con- tient; mais, dans ce cas, 1’emploi de Parsenic est bien préférable. Si on veut 1’employer a détruire une couleur légèrement bleuatre dans un verre a base métallique, dans le cristal, par exemple, il faut bien faire attention a ne pas se servir de sulfure, qui préci- piterait le plomb a Pétat métallique : il faudrait employer 1’oxyde d’antimoine, mais ce ne serait memo pas un genre de correction
que je conseillerais, car du bleu on tomberait dans le verdêtre, qui est plus désagréable encore. Regie générale, le bleu, en fait de cristaux, ne peut pas se corriger: il tient al’impureté d’une des matières premières, il provient en général de ce que le mineral a été fait avec un plomb con ten ant du cuivre, et, dans ce cas, le fabricant doit rejeter Pemploi de ce plomb.
L’oxyde d’antimoine a la propriété de se vitrifier seul a une température qui n’est pas très-élevée, ét produit un verre d’un jaune orange sale. Si on avait a employer Poxyde d’antimoine, je conseillerais de le prendre a eet état de verre d’antimoine ; on serait plus sur de 1’avoir ainsi toujours identique. Ou bien encore a 1’état d’antimoine diaphorétique, e’est-a-dire antimoniate de potasse. On 1’emploie quelquefois a eet état avec le pourpre de Cassius pour la couleur rose.
Urane. Oxyde d’urane, U.O. — Ce n’est que de nos jours que Poxyde d’urane a été employé en verrerie. Les Allemands ont les premiers produit ces jolts verres d’un jaune clair citron a reflet verdfltre produit par Poxyde d’urane, qui n’a d’ailleurs été
trouvé qu’en AUemagne. On a fait depuis,\en France, des verres semblables, mais il y a celte remarquè essèntielie a faire, qué le cristal, c’est-a-dire le verre dans lequel entre 1’oxyde de plomb, prend une teinte d’un jaune clair, terne et sans Teflet verdétre. On ne réussit a 1’obtenir belle qu’en fabriquant le verre eomraë en Bohóme, c’est-a-dire compose de silice, de potasse et de chaux.
Ce reflet verdótre que renvoie Ie verre coloré par 1’urane est une fluorescence, c’est-a-dire une emission dé courte dürée de lumière verte propre a ce verre; cette emission est de Ia même nature qüe la lumière bleue produite par le cristal avec d’autant plus d’intensité qu’il contient plus de plomb. Celte dé- couverte de 1’émission du bleu par le cristal pendant un temps très-courl aprés qu’il a été soustrait aux rayons de lumière a expliqué un voile qui était produit par les objeclifs de chambre noire, voile qui est très-alténué quand, au lieu d’un flint conte- nant parlies égales de silice et d’oxyde de plomb, on se sert d’un flint ne contenant en oxyde de plomb que les deux tiers de la quantité de silice.
C’est a M. Edmond Becquerel que sont dus les principaux tra- vaux sur la phosphorescence et la fluorescence, et c’est dans ses mémoires qu’il faut les étudier.
Chrome. — Le chrome communique aux verres oü il est intro¬duit une belle couleur verte franche, de la nuance de 1’émeraude.
C’est a 1’état de bichromate de potasse qu’il faut employer le chrome dans la fabrication du verre. Le chromate de potasse donne une teinte verte demi-opaque, tandis que le bichromate produit un vert tres-brillant inclinant plutót au jaune qu’au bleu (vert pré). Toutefois nous devons remarquer que le bichromate de potasse est d’une vitrification difficile, et il est rare, si cette substance est seule employee pour la coloration, par conséquent en assez forte dose, et si elle n’a pas été triturce, que le Verre ne contienne pas une assez grande quantité de grains non vitrifies. Je conseille done de 1’employer conjointement avec 1’oxyde de cuivre et l’oxyde de fer: il donne plus de vivacité a la teinte pro¬duite par ces deux derniers oxydes.
Argent. L’oxydo ou les seis d’argent produisent dans la vi- trifieation de très-belles teintes de jaune, depuis le jaune orangé foncé jusqu’au jaune citron; mais son action n’a'pas, je crois, étéjusqu’a présent bien expliquée. Je ne pense pas qu’on ait clai-
rement défini si 1’argent se conibinail a 1’état d’oxyde, ou bien, en raison do sa tendance & se désoxygéner, s’il ne repassait pas a Pétat métallique, agissant alors comme corps extrêmement divisé in¬t er posé dans les molecules du verre. Je Vais done dire ce que Pexpérience m’a appris sur les effets de 1’oxyde d’argent; la science ét dé nouvelles expériences apprendront ensuite, je 1’espère, la théorie réelle de son action.
A quelque état que j’aie employé soit 1’oxyde d’argent, soit Ie nitrate d’argent, soit le chlorure d’argent dans la composition du verre ou du cristal, j’ai obtenu un verre qui, au moment oil il était cueilli, paraissait incolore, mais qui, a mesure qu’il se re- froidissait, prenait des nuances agatisées, s’augmentant a mesure que la pièce était réchauffée et refroidie pour son achèvement, et devenant semblable a un marbre veine de différentes nuances, d’un fond jaune verdatre très-clair. Ainsi, par le refroidissement, il se forme non point une dévitrification, mais un précipité de plus en plus abondant.
Je dois dire, cependant, pour ne pas détourner les verriers de Pespérance d’obtenir par la vitrification un beau jaune transpa-rent au moyen de 1’argent, qu’une fois j’en ai obtenu dans un pe¬tit creuset, et que ce verre, élant travaillé, est demeuré jaune transparent très-beau. J’en ai conscrvé une coupe que je dé- pöserai au Conservatoire des arts et métiers. Je n’ai malheu- reüsement pas noté les conditions exactes dans Iesquelles celte production a eu lieu; je dirai seulement que je n’avais pas mélange 1’oxyde d’argent avec une composition neuve, c’est-a-dire sable, potasse, oxyde de plomb, etc., mais avec du groisil pilé. Je n’ai pas noté au moment même la provenance exacte de ce groisil., le petit creuset fut brisó. Je ne sais quelles circon- stances firent que je ne continuai pas dans ce moment les essais de coloration par 1’argent; quand je voulus y revenir, je ne pus obtenir que du verre agatisé. Je n’ai pas vu, du reste, dans le
. commerce qu’aucune verrerie ou cristallerie en France, en Alle- magne, en Angleterre, ait produit du verre coloré en masse en jaune transparent par 1’argent. Mais puisqu’il est certain que cc résultat a été obtenu, les verriers devront, il me semble, tenter de le reproduire.
Nous devons dire toutefois que peu de recherches auront, sans doute, été faites dans ce but, car ou ohtient cette coloration si
belle, si pure, et ajoutons par un procédé si sur, en n’agissant.' que sur la surface, qu’on ne peut regretter beaucoup de ne pas 1’obtenir dans la masse du verre. . .
La coloration sur la surface n’est pas, pour ainsidire, du do- niainé de la Vitrification; nous n’en parlerons en détail qu’au livre des Verves colorès et vitraux. Disons settlement ici que ce dépót de Pargent, a un élat très-divisé d’oxyde ou de métal, est favorisé par la température de la moufle dans laquelle on opère, et qui, en quelque sorte, ouvre les pores du verre et facilite certaines affini- tés qui donnent lieu a ce dépot; mais que ces affinilés se témoi- gnent a la longue, même a la température ordinaire. J’en ai pour preuve un vase en verre, dont je m’étais servi pendant plusieurs années pour contenir le mélange dont on couvre la surface du verre que 1’on veut teindre en jaune, et ce vase avait fint par être teint lui-mêmé intérieurement en jaune. Je déposerai également ce vase au Conservatoire des arts et métiers.
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Or. — C’est au moyen de 1’or qu’on donne au verre cette belle couleur rubis, qui diffère de la belle couleur rouge produite par le cuivre en ce que celle-ci, quand elle est bienréussie, doit être d’un rouge inclinant a Porange, tandis que le rouge de Por est un rouge groseille, c’est-a-dire inclinant au pourpre; ily a aussi cette difference que 1’or peut donner un rouge dans la masse, tandis que le rouge de cuivre ne peut être travaillé qu’en coucho mince. Cependant, le rouge d’or étant très-intense, on pretere générale- ment 1’employer comme doublure, plutöt que de fabriquer uu rouge clair et en masse. Ou évite d’ailleurs ainsi une partie des déchets de rognure, ce qui est assez important pour un verre dont la composition est asséz dispendieuse, quoique Por ait une puissance colorante très-intense.
C’est èl’élat de précipité pourpre de Cassius qu’on emploiel’or dans la vitrification. Les aichimistes, qui ont tourmenté 1’or de toutes les facons, et les auteurs qui ont écrit anciennement sur la verrerie, se sont beaucoup étendus sur certaines precautions, cer-tains tours de main indispensables dans la préparation de ce pour¬pre de Cassius, chlorure d’or et d’étain. Comme ils avaient reconnu que 1’eau regale seule dissol vait Por, ils avaient imagine différen- tes espèces d’eau régale, et tous leurs procédés consistaient & mêler ensemble des substances qui continssent de 1’acide chiorhydrique {esprit de set) et de 1’acide nitrique (esprit de nitre). Dureste, plus
la recette étail compliqnée et plus on la regardait comme sa van to, tandis quo la science réellé tend toujours a simplifier les méthodes, et c’est le résultat qu’ello a alteiut, dans la préparation du préci¬pité pourpre de Cassius, que nous engagcrons les verriers a opérer
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eux-mémes, quand ils vöudront 1’employer. Ils devrónt pour cela employer dé 1’or très-pur, car le moindre alliage d’argent, d’après ce que noüs avons dit de 1’effet de ce métal dans le verre, nuirait beaucoup au résultat. J’engagerai done a se servir d’or en poudre provenant de 1’opération du depart. On prend partie égale d’acide chlorhydrique et d’acide nitrique; on les mêle après avoir mis dans ï’un des deux 1’or qu’on veul dissoudre; par Faction de 1’acide nitrique sur 1’acide chlorhydrique, il se forme du chlore et de 1’acide nitreux, et on óbtient ainsi un chlorure d’or qu’on pourrait dessécher et employer dans la vitrification: mais Fexpérience a prouvé qu’il était préférable de faire un précipité par Fétain, et, pour cela, il suffit de prendre de 1’ëtain bien pur, bien divisé en copeaux, et dele dissoudre dans un mélange de deux parties d’acide chlorhydrique et une d’acide nitrique. Quand le dissol vant est sa- turé, on 1’étend de deux ou trois parlies d’eau, et, pour faire le précipité pourpre, on mêle les deux dissolutions ensemble, en ayant soin d’étendre le tout de beaucoup d’eau pure. C’est ce pré¬cipité qu’on emploie après Favoir décanlé, lavé, séché. Quelques verriers sont dans 1’habilude de ne jamais employer de pourpre de Cassiiis sans y joindre un peu d’oxyde d’antimoine ou 1’aulimö- niate de potassëj je puis assurer cependant que j’ai obtenu de
très-bèaux résultats sans l’adjonction de cettè matière.
II est a remarquer que le verre dans leqüel on a fait entrer 1’or
n’est pas coloré par la première fusion. Quand on le cueille, on ne voit qu’un verre incolore: iL faut, póur faire apparaltre la couleur rubis, laisser refroidir le plus qu’ön peut sans opérer la fracture, püisréchauffer. Alors, a mesure que le verre reprend une tempéra- türe élévée, vous voyez Ia couleur se développer. Que se passe-t-il alors? A quel état se trouve 1’or, lorsque le verre est transparent et incolore? a quel.état se trouve-t-il, lorsque le verre a revêtu cette belle couleur rubis ? II y a sans döute, dans ces deux cas, deux degrós différents d’oxydation; mais a quel élément For cède-t-il ou prend-il son oxygène? Le peu d’affinité de For pöur 1’oxygène nous ferait croire que c’est en perdant de 1’oxygène qu’il donne la couleur rubis. Cette disposition de For est telle, que si, dans le
travail du verre cöloré par For, on ne prend pas des precautions et qu’on expose les pieces a Ip fumée du four pour les réchaufïer, il so fait a la surface une revivification d’or et eii même temps la piece deviént opaque. C’est ausSi en grande partie pöur cela qu’on pré- fère généralement, quand on a fondu lë verre préparé avec le précipité pourpre, travailler toute la potée simpleniènt en baguet¬tes ou petits cylindros de 10 a 15 centimetres de long sur 2 a 4 de diamelre, qu’on fait recuireet qu’on met de cöté pour 1’usage. Quand done on veul faire des pieces de couleur rubis, on rechauffe succèssi vemen t une certaine quantité de ces petits cylindres. Nous ne décrirons pas ici la manière dont on les emploie, ce serait an- ticiper sur les verres colorés des livres U et V.
Souire. ;— Le soufre a 1’élat ptor a, jusqu’a présent, óté très- peu employé dans le verre; toutefois on sail que le soufre, quoique Irès-volalil, peut être fixe dans le verre, et produit, a la dose de 2 a 4 pour 100, un verre d’une belle nuance jaune transparante. Esl-il, dans ce cas. a 1’état de base, ou uni a 1’une des bases, et formant un sulfure ou un sulfite, ou bien enfin n’esl-il qu’inter- posé? C’est aux savants de décider. Généralement les verriers préfèrent produire le verre jaune au moyen du carbone Carbone. — Ce n’est pas du carbone comme combustible que nous avons a parler ici, mais de son emploi dans la composition du verre. Nous avons déja dit que Ie charbon était nécessaire pour la decomposition du sulfate do soude; mais, dans ce cas, il no roste pas de charbon dansle verre, il.se trouve entièrement brülé.
11 n’en est pas de même quand on outre-passe la quantité de charbon necessaire pour opérer la decomposition du sulfate; une partie de ce charbon donne au verre une teinle jaune qui est fixe. D’oü vient cetle teinte jaune? A quel état se trouve le carbone dans ie verre jaune? N’est-il qu’è 1’clat de molécules inlerposées? ou bien est-il en combinaison? Ce qui nous ferait croire qu’il y a combinaison, c’est que ce verre jaune, éteint dansl’eau et divisé, puis refondu même plusieurs fois, conserve loujours cette teinle jaune une fois acquise. Cette propriélé a été raise a profit pour obtenir des verres colorés en jauiie dans la masse. Mais cetle couleur ne s’obtient pas sans certaines precautions : ainsi, du charbon ou du bois, mis dans la composition du verre, lerend gé-néralement très-bouillonneux, ce qui s’explique facilement, car ce charbon eri brülant produit du gaz dans toute la masse du
verre. Cettè coloration par le charbon est loujours d’un jaune terne plus ou moins bruu, si on emploie du charbon ou de la braise de bois, ou de la houille. Pour avoir une couleur franche, il faut employer du bois très-divisé, par conséquent de Ia sciure de bois; et notez, en outre, que si vous employez de la sciure de bois dur, tel que le chêne ou quelque autre bois anciennement abattu, vous aurez le même résultat que si vous aviez employé du char-bon de bois ou de la liouille. 11 faut prendre de la sciure de bois d’aune ou de bois de peuplier, et, en outre, il faut que ces bois soient fraichement abattus, que cette sciure soit encore impré- gnóe de sóve. Cette assertion ressemble fort & de 1’einpirisme, il est bien difficile d’expliquer de tels faits, mais je 1’ai trop de fois expérimentée pour ne pas la donner comtne fait incontestable. Le verre a colorer en jaune doit aussi êlre d’une composition un peu tendre, pour que les bulles de gaz, auxquelles il est très- sujet, puissent se dissiper pendant 1’opération de Yafflnage du verre.
Au sujet de la coloration du verre en jaune par Ie charbon, je dirai encore qu’avee do la sciure de bois d’aune, j’ai, a quelques reprises, obtenu un verre jaune qui, a la dernière chauffe du manchon, prenait une teinte rouge très-prononcée. Je 1’ai ainsi obtenu, & deux ou trois reprises, a une époque oü la fabrication du vérre rouge par le cuivre n’avait pas encore été retrouvée; ce qui lui donnait alors beaucoup de prix. Plus tard, je voulus refaire de ce verre rouge, je n’y pus jamais parvenir. Cela tient-il a cer- taines matières que j’employais alors, je ne puis le définir; mais je constate le fait, que d’autres verriers pourront poursuivre, el, comuie preuve a Pappui, je dépose au Conservatoire des arts et métiers quelques carreaux de ce verre coloré en rouge dans Ia masse par le bois *.
Basal te. — Dans les basaltes on trouve pour ainsi dire le verre
1 Depuis que Partiele précédent, Carbone, a été écrit, M. Pelouze a communi¬qué al’Académie des sciences, le 15 mai 1865, unMémoircinséré dansles Comples rendus, et qui traite « de faction des métalloïdes sur le verre, et de la présence des sulfates alcalins dans tous les verres du commerce. » .
a Résumant, dit M. Pelouze, les principaux résullats de mon travail, on voil: c 1° Que tous les verres du commerce contiennent des sulfates; a 2° Que 1c Yerre fait avec des fondants exempts de sulfates n’est pas coloré par
tout fait; souvent meme il a conserve son apparence vitreuse produil© par 1’action des feus volcaniques, ét Ton doit être étonné que ces matériaux n’aient pas ©té exclusivement employés a la fabrication des bouteilles, quand on considère la profusion avoc laquelle ils sont répandus, et dans des contrées oü la houille abonde également, tandis qu’on compose ces bouteilles avec des . substances plus dispendieuses. Plusieurs savants s’étaient occupés de la nature des substances volcaniques et avaient annoncé la pos- sibilité d’en fabriquer du verre; mais il était donné a Chaptal de faire ici, comme dans bien d’autres cas, 1’application aux arts des principes de la science: il fit faire des bouteilles de lave dans une verrerie a Saint-Jean, pres d’Alais, oü les essais réussirent parfai- tement bien, et donnèrent un verre d’une qualité très-remarquable pour la ténacilé, 1’homogénéitó et le brillant de la paté. Et, tou- lofois, on ne tarda pas a cesser 1’emploi de cette lave. Quoique
je ne sache pas quels furent exactement les motifs qui firent re- ïioncer a eet emploi, je serais porté a croire que ces laves, n’ótant pas généralement très-homogènes, se trouvant plus ou moins fu-
le charbon; qu’il n'cst pas coloré non plus par le bore, le silicium, I’hydro- gene, etc.;
« 3« Que le soufre et les sulfures alcalins ou lerreux col or ent direclement en jaune soit le verre pur, soit les verres du commerce;
« 4° Que la couleur que prend le verre sous 1’influence des métalloïdes est due a une ssuleet même cause, consistent dans leur faculté reductive, n
II nc m’est certes pas permis de contester des rcsultals obtenus par un savant (cl que M. Pelouze, mais je ne puis m’empêcher d’expriraer combienil m'en coüte d’abandonner 1’idée que le carbonc colore le verre en jaune.
M. Pelouze a signalé le premier la présence du soufre a l’état de sulfate dans lous les verres qu’il a analysés, et atlribue a ce'soufre seul la coloration en jaune que donne a la composition du verre 1'addition d’un des métalloïdes, le carbone, par exemple, Et, pour preuve, M. Pelouze a fondu dans un creuset de platine une composition de:
Sable blaue •
Carbonate de soudc purifié par plusieurs crisEallisations.
Carbonate de chaux pure,...
Charbon d’amidon.
250 grammes. 100 —
50 —
2 —
Le verre obtenu était bien fondu, bien affiné el parfaUemenl blanc.
J’avoue que je ne trouve pas cette experience suftisamment concluanle : le char* bon d'amidon n'est la que dans la proportion de i/2 pour 400 du poids de la com* position. N’eül-il pas fallu essayer successi vemen t de plus forles_doses ? Ce qui me fait hasarder cette question, c’est qu’il est connu en pratique de verrerie que, lorsqu’on veut colorer en jaune par le charbon, cetle coloration commence brus-
sibles dans certains filons, on ne devaït pas póuvoir procéder duno manière suivie avec des résultals identiques; en outre, les bou- tëillës faitesavec la lave devaient être très-sujettes a devenir ga- leuses,c’ësUêi-dire a se dévitrifier pendant le soufflage même. J’ajouterai que Ces essais n’onl pas du être repris depuis, paree
. que dë nös jours on fait les bOüteilles en verre beaucoup plus clair qu’on ne les fabriqüait autrefois. Le commerce n’admettrait plus aujourd’hui les bOüteilles d’un vert presque noir ou brun que l’on faisait alors.
On a voulu faire de nos jours une application nouvelle de la fusibilité des produits volcaniques: un ingénieur anglais avail pris uti brevet pour la production de pieces d’ornement poüvant rem- placer les marbres, ou la pierre taillée, ou la fonte de fer, au möyen de basaltes fondues dans un four a réverbëre et coulées dans des moules en sable, ainsi qu’on le fait pour la fonte. L’auteur coulait même ainsi des tuyaux qui auraient été très-avanlageuse- ment substitués aux tuyaux en fonte pour la conduite des eaux ou
quement a une certaïne dose, Ainsi., dans une quantité donnée de composition;
500 grammes, puis successivemeni 700, 800 grammes de carbone n'auront donné aucunè esp'ece de coloration. Le verre aura été parfaitement blanc; puis, au lieu de 800» meticz 825 grammes, et vous obtiendrez un verre d*une nuance jaune tres-prononcée.
Beaucoup de verriers mettent une petite dose de poiidre de charbon dans la composition du verre ayant pour fondant le carbonate., dans le but de decomposer une partie du sulfate que conlient le carbonate du commerce. Cela ne donne au¬cune leinte jaune au verre. Nous ajouterous que, dans Texpérience cilée par M. Pelouze^ Ia composition d'üne matiëre reiativement assez dure a du ètre fondue a une temperature assez élévéc dans ce creuset de plaline, ét qti’ori s’expliquc aisément que les deux parties de charbon d’amidon aient pu être brulées sans affecter la coloration. Ges deux parties de charbon ont du être brulées bien plus facilement dans ce creuset de plaline d’une contënance de 400 grammes qu’ellës ne Veussent été dans la masse d’un creuset de verrerie.
Je suis amené a faire ces objections paree que les verres jaunes que j’ai fabri- qués a plusieurs reprises^ et en bien grandes quantiles, au möyen du charbon, étaient fondus a Vaide de carbonates plus ou moins purs. j’ai même employé des crislaux de soudé desséchés (non pas cependant cristoHisés plusieurs fois), et, dans les divers cas, la coloration én jaune, plus oü móihs pure, plus ou moins foncée, dépendait de la nature et de la proportion du charbon, et non de la pu- reté flu'carbopale,
Je crois done que les résultals énoncés par M. Pelouze devraient être confirm ós par des expériences en grand, et, jusque-Ia, je conserverai encore la croyance que le verre pent être coloré en jaune par le charbon sans aucune intervention du soufre,
du gaz. Cétte éntreprise n’a pas réussi, etne pouvait pas, jè crois, réussir, paree que les frais de moulage ©talent considérables- Ces pièeés moulées dëvaient, d-ailleurs, en leur qualité de verre> èire recuites avec söin, et dans leur moule, au tremen t ellëS so seraient brisées pendant Ié refroidissement. 11 fallait donedes fours dé tres grande dimension pour recuire le produit d’unê Joule, en sórte que ces frais de recuissón venaient encore accroltre considérablement les dépenses de production, qui se sont troüvées hors dé proportion avec la valeür du produit. Les piërres völca- niques avec lesquelles ces essais furent fails étaiehl composées en moyenne de:
Sil ice. 45
Oxyde de fer 16,50
18,50
Chaux.. ; . 12,25
Manganese . 5,5Ö
jSoude>• 4,25
100,00
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On congoit qu'avec de tels elements cette pierre devait fondré avec beaucoup defacilité et produire un verre d’un très-beau noir, maïs qui, natureliement aussi, pendant la.longue cuisson nécessaire a des pièces d’un grand volume et fort épaisses, devait se dévitri- fier et reprendre 1’apparence de la pierre qui avait déja elle-même été soumise aux raêmes influences, c’est-è-dire fondue par les feux volcaniques et refróidie lenlement.
Groisil. — A la suite des matières qui entrent dans la compo¬sition des verres, je dois placer les groisils provenant des pièces de verre qui se cassent pendant la fabrication, des rognures pro¬venant de cette même fabrication, des Casses de magasin, enfin du verre que 1’on tire a L’eau du fond des creusets, des eserémaisons et des mors ou meulcs de canne.
Les groisils, avant de les employer, surtout pour les verres fins, doiventêtre soigneusement examines surune table pour en séparer les corps étrangers qui peuvent s’y trouver mêlés, puis.lavés pour enlever les poussières. 11 est inutile de recommander de ne meier les groisils qu’avec des compositions donnant les mênies verrei que ces groisils, par des groisils de composition de nature difl’ó-
rente produiraient un verre qui ne serait pas homogene et se travaillerait fort mal. .
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Le groisil appelé meutes ou »iors de canne, provenant du verre attaché aux cannes et aux pontils, et qu’on en détache en frappant sur ces oulils, ne peut pas être employé tel qu’on le dé-tache, s’il s’agit de fabriquer du verre hlanc ou du cristal, car ce verre, étant refroidi, contracte avec le fer une telle adherence, qu’il ne s’en sépare qu’en emportant des parcelles de fer ou écailles qui porteraient dans le verre blanc une teinle facheuse. Il faut done, si on veut se servir de cette sorte de groisil, faire séparer, avec un marteau en forme de coin aigu, les portions adhérant au for, qu’il faut, ou jeter, ou employer dans des verres plus communs, ou dans des verres verts.
Généralement, dans une verrerie, les groisils de loute nature
form ent environ le tiers de la quantitó totale de la matière en-
fournée dans les creusets. .
Quoique les groisils soient, a vrai dire, un verre déja fait, il ne * «
faut pas croire que ces groisils fondent plus facilement que de la composition neuve. Le verre, nous l’avons dit, est mauvais con-ducteur du calorique; il en rósuite que les portions qui touchent au creuset ou qui se trouvent en dessus, réverbérées par la voüte du four, se liquéfient assez vite, mais qu’il s’éeoule un temps assez long avant que les portions intérieures soient pénétrées par la chaleur. II faut, (Tailleurs, faire un aussi grand nombre d’enfour- nements avec du groisil qu’avec de la composition neuve, car un creuset rempli de groisil ne se trouve guère qu’a moitié, lorsque ce groisil est fondu. Enfin, Yaffinage d’un pot rempli avec du groisil seulement, est plus long, le verre étant plus sec, moins li¬quide que du verre provenant de matière neuve, paree qu’a chaque fusion une portion d’alcali est évaporée. Cet effet, qui est sensible pour le verrier qui travaille ie verre et le trouve moins souple, se déyeloppant plus difficilement quand il est composé de groisils seulement, ou qu’il est entré une grande qüantité de groisils dans sa composition, est apprécié par les opticiens quand ils font des operations très-délicates. Ainsi, il y a un changement sensible entre les pouvoirs réfringents et dispersifs d’un verre fait d’éléments neufs, et du verre provenant des groisils du même verre; une dif¬ference se fait même sentir avec le verre dans lequel il entre seu¬lement moitié de groisil. Un célèbre opticien allemand, M. Voigt-
lander, qui a fait sans contredit les mei Beurs instruments poür la photographic, et qui, opérant sur des quantités très-considérables, ne v oud ra it pas être astreint è modifier ses outils et ses courbes pour chaque instrument, qui, en un mot, ayant adopté certaines courbes pour des Verres d’une qualité déterminèe, veut que 1’objectif, aehevé dans les conditions usuelles de sa fabrication, soit parfait sans avoir besoin de corrections, m’a signalé è plusieurs reprises ce résultat des differences introduites dans ses instruments, quand, par addition de groisils des mêmes compositions, j’aVais ainsi modifié cetto même composition. II m’eut fallu renoncer a lui fournir le flint-glass et le crown-glass qu’il consommait, si je ne m’astreignais pas a faire pour lui des fontes spéciales toujours identiques.
Nous avons enfin a faire une dernière remarque au sujet des groisils, c’est que, a chaque fonte, Ie verre perd de sa blancheur. Certainement, quelque blanc qu’on puisse fabriquer le Verre, il a toujours une légère teinte, hou pas au transparent par une faible épaisseur, mais sur la tranche. La glace de France, a une épaisseur de 1 et demi a 2 millimetres, ne changerait pas sen- siblement la teinte d’un papier blanc; mais, si vous prenez un carré de cette glace de 8 è 10 centimètres et que vous Fexaminiez sur la tranche, vous verrez une teinte bleuêtre très-prononcée: du verre même de gobeletterie de Bohème, plus blanc encore que la glace de I^rance, aura une teinte très-prononcée dans les mêmes conditions. Je dis done que si on prend du groisil de glace de France bien pur, et qu’on le fasse refondre sans additions de ma- tières neuves, la teinte bleuatre sera plus intense. Si le groisil proveuant de cette seconde fusion est refóndu de nouveau, Lin¬ie nsi té de la teinte augmentera encore. Get effet n’est pas dü seu- lément a 1’influence du combustible, qui agit toujours plus ou moins sur la surface des creusets ordinaires. J’ai fait a différentes reprises cette experience sur des groisils de cristal en pots cou¬verts, et j’ai obtenu le même résultat. Cet effet est bien connu des verriers, qui, quand ils veulent faire une polée de verre plus spé- cialement blanc, n’y ajoutent que fort peu de groisil.
Ce fait, cotnnie nous le verrons par la suite, a une grande im-portance et se rattache a cet autre fait qu’ün verre, composé dans des conditions tropdures ou exigeant une temperature plus intense, est moins blanc qu’un verre è peu pres dans les-mêmes conditions,
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maïs d’une fusion plus facile. Nous le constatong sans pouvqir en donnar une explication satisfaisanle; nous dirons seulement que ia substance du creuset, qui contient loujours un peu de fer, ayantpar cela même de Finfluence sur la coloration du verre» qn doit supposer qu’a chaque refonte il y a addition de cette colo¬ration.
Nous avons mentionné dans ce chapitro les principaux oxydes métailiques en usage dans les verreries, indiqué quelques-unes des combinaisons, ré actions, colorations qu’ilsproduisaieht; mais nous sommes bien loin d’avoir épuisé ce sujet, qui, pour un jeune savant praticien, pourrait donner lieu a des études bien intéres- santes. La chimie seule ne peut donner lex plication de tous les phénomènes que présenten! les colorations par les oxydes métai¬liques,, qui sont modifiées par les conditions de température et aulres dans lesquelles sent places les mélanges. Ainsi, nous avons
dit que le fer, suivaut le degré d’oxydation, pouvait produire une couleur jaune, bleue, ou verdatre resultant des deux autres; mais on peut dire, eu outre, que le fér peut produire toules les cou- leurs du spectre. Les fabricants de porcelaine savent très-bien qu’on fait avec le fer un émail d’up beau pourpre (compose de rouge et de bleu); que si eet émail est soumis & une température plus élevée, il perd cette couleur pourpre et devient orange (compose de rouge et jaune). Les terriers savent également que si, pendant le travail d’une potée de verre, il tombe un fragment de fer dans le pot, et qu’on retire ce pot du four après le travail, on trouve au tour de ce fragment de fer, en par lie oxydé, une portion de verre colorée en jaune orangé. Les couleurs rouge, orange, jaune, vert, bleu, violet peuvent done, suivant les circon¬stances, être produces par le fer. Le cuivre, 1’or, 1’argent peuvent aussi produire toutes les couleurs du spectre, ainsi qu’ont pu le
remarquer les verriers qui ont fabriqué du rouge par le cuivre, du verre pourpre par For, du jaune teint et du Verre agatisé par 1’argent. Nous ne connaissons guère que le cobalt qui produit in¬variablement dans toutes les circonstances une couleur fixe inal¬terable : le bleu.
La fluorescence, dontnous avons dilquelques mots a Foccasion de 1’öxyde d’urane, et sur laquelle M. Edmond Becquerel a fait déja des travaux importants, les changements que la Iumière ap- porte dansla coloration de certains verres a la température ordi-
naire, oü Ton ne peut guère supposer que des modifications dans ]a combinaison des éléments puissent avoir lieu, sont des faits dont Ia physique doit rechercher les causes. C’est done a la science générale, qui aujourd’hui ne sépare plus la chimie de la phy¬sique, qu’il appartient d’explorer ce vaste champ d’études.